Oracle, miracle, débâcle.

Le scénario, on commence à le connaître avec Dortmund. D’abord se mettre en difficulté. Se dire que ça va jamais le faire. Que c’est impossible. Prendre un but au match retour contre Malaga, après avoir échoué bêtement à l’aller à convertir ses occasions. Et revenir du diable. Revenir des enfers. Se prendre pour Orphée, chanter et revenir, comme si rien ne s’était passé avant.

Dortmund a perdu 3-0 à Madrid il y a une semaine. Entre temps, les rapports de force se sont sensiblement rapprochés si on regarde les joueurs dont on pourrait avoir le poster grâce à Onze Mondial. D’un côté, Cricri d’amour est absent. De l’autre, Lewandowski est là et re-là. Tremble donc, Real Madrid.

Ah, oui, par contre, Sokratis est blessé, Sahin est blessé, Kehl est suspendu… Quand Dortmund revient et rétablit le rapport de force, il le fait en se diminuant. Nous sommes des putains de génies de l’auto-trolling de qualité. Friedrich, chômeur il y a quelques mois, est titulaire en défense centrale. Oliver Kirch, arraché en échange de notre prometteur Löwe pour faire le troisième latéral droit derrière Piszczek et le constamment blessé Owomoyela prend place… en milieu défensif. Et pour compléter l’équipe et avoir onze gars, Kloppo lance Milos Jojic, au club depuis trois mois, titulaire pour la première fois de sa carrière en Ligue des champions.

Alors que le match commence, Jean est encore devant des élucubrations de Philippe Katerine, vire-voltant sur une île déserte avec son saxophone tricolore et cherchant une ligne de conduite pour guider son navire de A à Z, aux côtés d’une bite-langue frottant son propre anus.

 

Renseignements pris dans les reflets du téléphone en sortant de la salle. Vingt minutes de jeu. 0-0, toujours. Tout va bien. Dans le détail… un penalty raté pour le Real ? Woh.

Sur un pont ordinaire, Jean sent son cœur prendre une autre allure. Y a Marco Reus qui a marqué bordel. Peu importe la forme, peu importe le contexte, Jean y est. C’est en train de se passer. À la maison et vite.

Sur le trajet, des occasions, rien d’autre. Hum.

Jean arrive chez lui. Franchit la porte. « Dépêche-toi, il y a le deuxième. » Comment qualifier un moment comme celui-ci ? Malgré tout, malgré le #BVBelieve, malgré le Westfalenstadion et malgré Klopp, malgré l’envie d’y croire, tout cela se passe beaucoup trop bien pour y croire. La magie est en route. We exist. La fin de mi-temps est belle. Dortmund se régale, les espaces dans la défense madrilènes sont béants. Comment peuvent-ils être à un tel niveau ?

 

La mi-temps est l’occasion de reposer les esprits. Revoyons les buts déjà.

Une erreur de Pepe. Le sang froid du petit gars Reus, qui évite Casillas sobrement et marque dans le but vide. 1-0.

Une passe propre de Reus. Lewandowski fait un geste culotté, maîtrisé… sauf que ça touche le poteau. Et Marco est là, où il faut, pour claquer le 2-0.

Ici arrive le soir, le grand soir. Il reste quarante-cinq minutes au moins. Avec cette mi-temps, Dortmund est capable de le faire et sortir le Real. Il ne faudra pas louper la reprise, pour ne pas laisser une once de confiance aux autres. Et alors…

Et alors, c’est ce que gère Dortmund. Sans se précipiter bêtement sur le but, Dortmund prend place, réduit l’espace et n’offre pas de solutions dans sa défense. Il faut un exploit de Bale, tout seul, pour une demie-occasion qui finit à côté. Les personnes normales du Borussia sont au charbon.

Et alors, les Borussen peuvent repartir et compter sur un duo somptueux. On le connait déjà : Lewandowski fixe la défense, Reus la dynamite. Sur un service dans le timing vers Mkhitaryan, l’Arménien récupère la balle seul devant Casillas. Il le contourne facilement, en deux-trois pas, et peut frapper dans le but vide. Jean sautille déjà. Jean exulte déjà. Jean fait tourner sa bite déjà. Jean écoute les voix qui crient dans sa tête. Jean se prend pour Jeanne. Arc et feu.

Mais c’est le coup de la panne. Le coup du poteau. Ca ne rentre pas. Ici vient le soir. L’autre soir. Le soir II. Le soir qui ne réussit pas.

L’histoire du match, elle est là, Dortmund y est. Dortmund a fait son miracle. Dortmund l’a fait à la perfection. Mais Dortmund a regardé son amour avant d’être sorti de l’enfer. Dortmund s’est laissé aller au son horrible du poteau, du cri de joie étouffé dans la stupeur du manqué.

Et si ce n’est jamais fini et que les actions qui suivent tournent parfois au FAP pour Jean , qui continue de se régaler de voir les siens profiter de petits espaces et se faire des passes dans la surface adverse, il n’y aura pas d’autres matches retours pour autant. Pas de vie après la mort non plus. Pas de super-symétrie en forme de 3-0 pour contre-balancer l’autre.

Orphée s’est retourné contempler sa belle Eurydice.

Les notes :

Weidenfeller (5/5) : Fuckin’ clean sheet. Roman arrête toujours ses penaltys sur sa gauche. Ne le dîtes à personne, puisqu’on continue de les lui mettre là.

Durm (4/5) : il a paru plus expérimenté encore qu’Oliver Kirch.

Hummels (5/5) : un caillou, un rocher, que dis-je ? Une montagne insurmontable ! Demandez à Benzema ce qu’il a pensé de son tacle dans la surface.

Friedrich (3/5) : le job, héroïquement quand on repense à son parcours.

Piszczek (4/5) : amour de centres, amour d’activité sur son côté, amour de jeu en première intention à distance avec Mats ou dans les trente derniers mètres avec (au choix) Jojic, Reus, Lewandowski, Mkhi, Kirch…

Kirch (4/5) : qui était-ce à Lautern ? Dis-le nous maintenant. Aujourd’hui, tu ressembles à un jeune garçon ambitieux, qui ne se pose pas de questions et fait ce qu’il veut sur un terrain.

Jojic (4/5) : Jürgen semble avoir beaucoup hésité à lui faire confiance pour être titulaire en Ligue des champions. Peut-être le non-choix le plus préjudiciable du match aller. Mais cette fois-ci, Klopp n’avait pas le choix et a lancé Milos dans le grand bain. Pas effrayé par la chaleur, Milos a ramené ses choix et éclaboussé tout le monde de sa joie de vivre, son talent, sa classe. Merci.

Grosskreutz (3/5) : comme souvent. Attachant, motivant, à défaut d’être brillant.

Mkhitaryan (va savoir/5) : le drame de la soirée est pour lui. Le drame des matches aller et retour est pour lui. Mkhi, achat coûteux de l’intersaison. Mkhi, joueur qui devait compenser un départ encore difficile à digérer, celui de l’enfant Götze. Mkhi, joueur qui parlait de la pression ressentie à Dortmund en une du dernier 11Freunde. Mkhi, enfant malheureux qui rate l’intérieur du cadre par trois fois. Une fois à 3-0. Une autre à 0-0. Une dernière à 2-0. Une dernière qui signifiait l’égalisation – et potentiellement de quoi faire sombrer le Real. Mkhi, Jean est de tout cœur avec toi et attend tes futurs buts décisifs. Liebe an dich.

Reus (amour/5) : fais moi l’amour ; prends moi dans les positions que tu veux ; fais de moi ta chose, comme tu as su le faire du Real.

Lewandowski (ne peut plus être noté/5) : la question restera à jamais. Pourquoi veux-tu partir ? Pourquoi veux-tu nous abandonner quand tu vis de tels moments avec nous ?

 

Le remplaçant :

Aubameyang, une minute sur le terrain, un carton jaune bête, puis rien.

 

Jean vous fournit les images pour aller avec son Akadémie. Mais il n’oublie pas non plus la BO. Oui, par contre, il te la donne à la fin seulement.

Tout gif acquis dans la sueur de l’Internet, notamment via ce site et ce site, pour ceux qui ne sont pas crédités directement.

Des küssen et des anales par milliers.

Jean Colère.

9 thoughts on “Dortmund – Real Madrid (2-0) : la Borussia Akadémie sèche ses larmes

  1. J’en veux un peu à Dortmund de m’avoir laissé espérer alors que je ne voulais plus y croire, histoire de ne pas être déçu. Mais bon, superbe match, et une dose de spleen supplémentaire pour goûter la vie.

  2. Bonjour xxss,

    Entre l’album d’Arcade Fire et ce match, mon coeur bat la chamade. Bon, la partie 2 m’emmerde un peu plus. Mais dans l’ensemble, je suis satisfait et j’y reviens assez souvent. Bien plus que The Suburbs.

    Cordialement, des bisous,

  3. Merci pour ta réponse. Je note que tu préfères le premier disque mais que tes deux références académiale que sont Orphée et Supersymétrie se trouve dans la seconde partie. Commun symbole de paradoxe nantais.

  4. Ah non. Toute l’Akadémie fait référence à l’ensemble de l’album, qui fait référence lui-même à Orphée tout du long. Les traductions sont souvent douteuses, et souvent moins voyantes que la super-symétrie (difficile de faire autrement). Mais les références sont là, éparpillées.

  5. Bon ben j’avais lu à la va vite seulement car effectivement toutes les références sont assez visibles. L’acad est encore meilleure qu’à la première lecture.

    J’avais pas vu le lien à la fin de l’article également. Je suis un tocard.

    Pardon.

  6. Pourquoi Gotze et Kagawa sont partis.
    Dortmund, c’est comme A.Madrid (et Porto), plus ils perdent de joueurs, plus ils en trouvent/forment de meilleurs^^

    A part le salaire, je comprends pas pk des joueurs de Dortmund ou B Leverusen voire Schalke préfèrent partir au Bayern plutot qu’essayer de gagner le championnat avec leur équipe!

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