Les vacances de Bernard Delavillumière, dernière, tome 1.

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Merde, il est de retour. On avait commencé l’AFP sans lui de toute façon.

Résumé de l’épisode précédent. Tentant désespérément de sauver Franck Ribéry de sa maladie et des griffes de Wahiba, Bernard n’a pas compris les réelles motivations du joueur français. Ce dernier, excédé par notre reporter à Ibiza lui fit absorber des substances hallucinatoires et le fit monter en barque de force afin de se débarrasser de lui.

Dix-sept jours en mer. Dix-sept jours pendant lesquels, à bord de notre frêle esquif, nous avions dérivé au gré des courants et des vents marins. Au-dessus de nos têtes subissant le charivari des lames de fonds de la méditerranée, nous n’avions pour détente que les tournoiements de mouettes nous incitant à espérer la rencontre d’un rivage.

Rien. Rien ne s’avançait à nous. L’horizon horizonnait, impassible devant notre soif de repos et de dégourdissement de jambes. Au loin, nous ne pouvions qu’imaginer le bord du précipice universel, celui qui prévalait au temps des navigateurs d’avant Colomb, cette ligne qui désormais représente la tournure de notre planète à son arrondi le plus parfait dans nos esprits rassasié par les connaissances amassées par les découvreurs des vastes mondes d’antan. Pour tromper l’ennui nous mettions-nous en tête la triste apparence que nous avions d’un papillon les jours de beau temps ou d’un Cortez échoué au large de la Colombie les jours de pluie. La nourriture, bien sûr, n’était pas abondante. Aussi, grâce à la fameuse technique d’alimentation du Docteur Bombard, faite de plancton et d’eau de mer, nous avions réussi à tenir le temps de notre traversé du désert salé, mouvementé et impétueux. Mer, infatigable berceau de toute forme de vie, impétueuse créatrice et destructrice de toutes choses sur Terre, nous te saluons et te rendons grâce, de la même manière que les hellènes en des temps révolus invitaient à leurs prières le courroucé Poséidon. Mer, jamais apprivoisée nous te remercions de nous avoir gardé en ton sein, et de nous avoir recraché un beau matin sur des côtes habités et civilisés bien qu’un peu hostiles.

Nous ne nous souvenions pas de comment nous étions arrivés là, et ne pouvions deviner le pourquoi. Les mystères de la vie et les voies du Seigneur sont aussi impénétrables que notre sœur, pour des raisons d’ablation strictement intime et personnelle que nous nous refusons de divulguer. Face contre le sol, ressassé par le ressac d’un lagon en furie, nous émergions tant bien que mal de notre grande traversée. Ouvrant un œil, nous remarquions une incroyable variation de couleurs et de lumière contrastant avec le bleu terne et triste qui nous accompagna tout ce temps.

Ici, du jaune de Damas ; là du rouge vermillon ; du turquoise, de l’orange, du rose, beaucoup de rose et quelques touches de noir. Ecartant d’un revers de la main, boursoufflée par des morsures de méduses, notre mèche si représentative de notre personnalité, nous tentions tant bien que mal de nous redresser et d’évaluer le panorama qui s’offrait à nous afin de nous donner quelques points de repères.

Tournant notre tête sur plus de 180°, nous nous rendions compte que nous n’étions pas en terrain sauvage, loin de là. La plage, car c’était sur une plage de sable fin que nous étions arrivés -nos molaires en croustillent encore- la plage donc était ainsi large de deux mètres tout au plus, sentait le mazout et le sac plastique et se trouvait bétonnée devant un remblai routier et un chemin de fer. Ouvrant nos écoutilles, nous tentions d’entendre quelques baragouinements amicaux, votre serviteur que nous sommes pratique de nombreux dialectes, vous n’êtes pas sans le savoir.

Hélas, la variété de représentants nationaux m’empêcha un instant de savoir où je me trouvais réellement. En effet,  ici un Batave, là un Allemand aux chaussettes remontées à mi-tibia arborant de splendides Crocks mauves, et là un Russe, reconnaissable à son portable et son portefeuilles montés à même le slip de bain. Or ça, impossible de me retrouver dans ces contrées lointaines et nordiques, nous aurions mis bien des mois avant d’atteindre Rostock, Saint Petersburg ou même Schiltigheim. Puis forçant notre vue, exercée quoi que légèrement terne à ces moments précis, nous dénotions une incroyable recrudescence de joggings blancs ornés de trois bandes roses dans le sens vertical sur le côté dudit vêtement. En remontant sur ces silhouettes, nous pouvions admirer le pardessus de même style, des lèvres pulpeuses et glossées, un maquillage outrancier, et des lunettes fumées Dolce et Gabbana. Aucun doute, ce sont des cagoles. (cagole n.f. : femme sudiste de petite vertu, vulgaire, indécente ne pensant qu’au luxe à la luxure et angoissée par le lavage à froid de leur dernier string de marque, in Les petits roberts, Patrice Laffont MMVIII).

Nous étions dans le sud de la France.

Nos doutes s’estompaient aussi rapidement qu’un journaliste russe meurt. A l’écoute des « ta race », « touche moi pas ou j’te nique » et autres « i’ m’a baisé en diagonale », il était à présent certain que nous nous trouvions sur la côte d’Azur. Nous extirpant de cette plage, quittant les lézards humains trempés dans leur bouclier au lait de coco surabondant, nous claudiquions en direction de quelque station de repos, d’une hostellerie ou quelconque bonne auberge. Nos guenilles faisaient sourire le local, mais peu nous importait. Seul le yoyotement de notre appareil digestif et les soubresauts de notre anus nous intéressait. Cela faisait deux semaines que nous mangions et évacuions liquide, autant vous le dire, nous n’avions plus aucun contrôle sur nous-mêmes.

Nous longions à présent une voie de chemin de fer sur notre gauche, ornée d’un superbe château d’eau, tandis que les vacanciers de tous azimuts profitaient nonchalamment des bienfaits de l’iode et du soleil. Nous arrêtant devant une buvette caustique au nom de Bitch-bar (soit le propriétaire est Lorrain et a un certain sens de l’humour, soit le propriétaire est une andouille de la plus basse des espèces) nous restions stupéfaits devant la présence d’un dessin connu et tribal à l’occiput du client nous précédant. Serait-il possible de tomber sur pareil énergumène en ce temps si délicat pour nous. Aura-t-il vent de notre notoriété et nous reconnaitra-t-il ? Car oui, chers lecteurs, vous l’aurez compris, puisque vous nous lisez, vous êtes assez futés pour savoir, Jérémie Janot, le portier de Saint Etienne campait à présent sous notre mèche.

D’un doigt fripé et encore humide, nous tapotions avec toute la délicatesse possible sa toison dorsale dans le but de le faire se retourner. Cette stratégie aussi fine qu’ingénieuse fonctionna. De face, rougie par ailleurs au niveau des yeux, (preuve qu’il porte son masque Spider Man pour contrer les U.V.  Il n’y avait aucun doute c’était bien lui.) il ouvrit alors la bouche, rota du soda, et nous dit :

« Ouais ? quoi ? »

-Jérémy, vous nous reconnaissez ?

-Non. T’es qui toi ?

-Bernard Delavillelumière, grand reporter polyglotte naufragé d’horsjeu.net.

-Ah ouais, tu parles d’un naufrage.

Nous ne pensions pas Jérémy capable de ce genre de boutade spirituelle. Nous ne savions si c’était cette fine galéjade ou le manque de nourriture qui nous fit vaciller, mais l’espace d’un instant, après avoir défailli vers le portier, nous tombions dans les granny smith.

D’intenses lumières clignotaient sur nos orbites et le son syncopé venu d’on ne sait où parvenait à nos oreilles. Puis, avançant dans notre évanouissement, nous voyions Jérémy se trémousser l’entrejambe auprès de nos lèvres au milieu du V.I.P Room, Jean-Roch tenant le pot de Savora destiné à l’appareil reproducteur de Jérémy. Nous perdions notre souffle, notre, respiration, notre dignité. C’en était trop pour notre faible cortex qui se mit à envoyer des signaux d’alarmes à notre système général.

Nous nous retrouvions allongés sur le bitume, entourés de quelques badots et  de Jérémy, bienveillant qui nous avait donné une knacki de son hot dog pour nous réveiller. Tout cela n’étaient que visions et pur imaginaire de notre inconscient malmené par nos journées en mer forcées.  Ces quelques secondes nous avaient paru une éternité. Rassuré, rasséréné et requinqué par la saucisse savoureuse et salvatrice, nous nous remettions dans la posture de l’homme noble, droit quoi qu’un peu chancelant. Jérémy dans son infinie bonté, nous offrit d’aller à la cafétéria casino la plus proche nous rassasier à ses frais au buffet froid à volonté. Mieux que le flunch dominical, ce bon représentait une offrande divine et nous nous adressions au Seigneur tout puissant et le remerciions pour ce Deus Ex Machina. Jérémy répondit merci. Ce garçon est plus drôle qu’il n’y parait. En outre, il m’offrit la moitié de sa serviette, tel un Saint Martin des temps modernes, et me fit également don d’un bon d’achat chez Rica Lewis.

Il avait  en effet en sa possession des bons que son président détenait jalousement dans l’un de ses coffres. Nous notions d’ailleurs que Jérémy possédait un appareil photo Minolta autour du cou. Coïncidence ? Une enquête devra être ouverte par nous, une fois remis d’aplomb.

Après un repas divin et un pantalon jean coupe droite avec le pli sur l’avant (très tendance m’a-t-on affirmé à pussycat, le magasin des cagoles de 7 à 77 ans), nous reprenions notre route d’un pas gaillard et quasi-militaire, nos soucis gastriques étant derrière nous (au sens propre) il était toutefois nécessaire de nous arrêter à bons nombres d’édifices disposant de tout le nécessaire à ces pauses diarrhéiques.

8 thoughts on “Les vacances de Bernard Delavillumière, dernière, tome 1.

  1. Jérémy J. à la cafet’ Casino, c’est mieux que Jérémy T. à la cafet’ Leclerc.
    J’espère que tu vas mieux Bernard. Et écris indécente au lieu de indesente, si ce n’est pas une blague que je n’ai pas comprise.

  2. Cher Chantivlad,

    Merci, nous allons mieux, c’est à cause de l’hippoglissémie que nous avont contractait. Notre français va se remaitre d’issy peut.

    Bien à vous,

    BDLV.

  3. Bernard, est ce que, comme ton confrère de M6, il t’arrive de caresser un chat en regardant une chatte, lors de tes reportages ? (et Moké ne parle pas de la chatte mexicaine dont tu nous a parlé avec Gomina)

  4. Et désolé pour le doublon, mais ma nationalité allemande m’oblige à vous signaler, cher Bernard, que les véritables Allemands ne portent pas de Crocks mais des Birkenstock…

  5. 1 Les méduses mordent pas.
    2 Y a pas d’mouettes en méditerranée mais des gabians (goéland en français).

    Il aurait pu au moins arriver à Marseille, il aurait parler foot au moins. Là même pas une référence au free-fight…

  6. Bon bah c’est Jérémie ou Jérémy le Jouhanno ? Et pis les Badots je pense que c’est les badauds en fait. Badot ça renverrait plutôt à Bigitte.

    (oui on est chiant mais c’est parce qu’on est super content que vous soyasses en vie c’est pour ça)

    Pas capté le coup du Minolta. C’est rapport aux minots ? Bon courage pour la remontée sur la capitale

  7. Padls, je pense que c’est en référence à un ancien sponsor maillot.
    Max Big, patience, peut-être que dans le tome 2, Bernard aura droit à une initiation par Wanderleï Silva.
    Bernard, dans quelle station balnéaire avez-vous débarqué ? Connaissant le bon goût stéphanois, je miserais sur la Grande Motte ou le Cap d’Agde.

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