OM-Angers (2-2), La Canebière académie ne se donne plus d’espoir

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Bienvenue chez les mous.

Aïoli les sapiens,

On raconte bien des légendes sur cet objet. D’aussi loin que l’homme s’en souvienne, il fut conçu dans un âge de ténèbres, en un lieu souterrain et hostile. Certaines peuplades nommaient ce lieu le Mordor, d’autres Saint-Étienne, toutes s’accordaient à l’éviter. Qui fabriqua cet objet, et à quel dessein ? Qu’il existât seulement un dessein était même une incertitude, tant l’objet semblait mû par sa volonté propre; une volonté qui consistait essentiellement à détruire, à salir, à avilir.

Au fil des siècles, l’objet navigua au gré des caravanes de brigands, de pillards, de voleurs d’enfants. On ne sait guère quand il échoua à Marseille ; il y a longtemps, sans doute, puisque tout le monde semblait avoir oublié jusqu’à son existence néfaste. Pourtant il était là, tapi, laissant sa force d’attraction faire venir à lui tout ce qu’il pouvait exister de mauvais en cette ville. Par chance, murmurait-on dans le monde des esprits, la déesse Erzulie s’était entichée d’un des représentants de ce bas-peuple ; sans que personne n’en prît conscience, sa présence en ces lieux suffisait à tempérer la nocivité de l’objet.

Mais Erzulie finit par partir et l’objet, nourri en silence par les années de médiocrité qu’il avait su agréger autour de lui, put enfin exercer son emprise sur les âmes plus faibles. Il suffit d’une après-midi de fin d’été pour que le veule Rudi, que l’Histoire retiendra sous le nom de « dehors », ouvrit négligemment l’armoire de droite au lieu de celle de gauche, comme il le faisait d’habitude. Au fond du meuble se tenait l’objet jaune. Rudi (« dehors » soit son nom , ajoutaient les conteurs) s’en saisit, et celui-ci se mit à briller. Puis, au faîte de son incandescence mauvaise, l’objet se mit à afficher : « Pour les gouverner tous, pour les trouver tous, pour les amener tous et dans les ténèbres les lier. »

On ne sait pourquoi Dimitri passait alors en ces lieux. Rudi lui tendit mécaniquement l’objet. Fasciné, Dimitri s’en saisit et l’enfila. Grisé, il sentit le pouvoir de l’objet l’envahir ; ivre de puissance, il s’élança vers les sommets sans s’apercevoir que le pouvoir maléfique de l’objet le minait chaque jour un peu plus. La chute de Dimitri n’en fut que plus rude. Rudi le veule, que les Anciens ne mentionnent jamais sans prononcer le mot « dehors », se saisit de l’objet et le tendit à Luiz Gustavo. Lui que l’on disait pur, lui que l’on disait fier, l’objet en fit sa proie,comme les autres. Pis, même, comme une œuvre d’art trop fragile, Luiz Gustavo fut détruit plus rapidement encore que ne le furent de moins braves.

Steve par exemple, Steve le vieux guerrier, crut reconnaître dans l’objet le talisman qui l’avait accompagné dans ses conquêtes passées. L’objet scintilla, le séduisit, et dès lors fit sourdre chez le vieux Steve ses pires aspects. Son corps se flétrit, enfla, s’alourdit ; sa démarche féline se fit pachydermique. Il se mit à attirer quolibets et moqueries mais l’objet maudit n’avait de cesse de le presser jusqu’à la dernière extrémité. Il ne se laissa glisser du bras de Steve qu’une fois celui-ci anéanti, mort sans gloire après un ultime trait pathétique tiré à côté de sa cible.

Notre histoire du jour débute ici. L’objet dort dans son armoire, où l’a replacé Dehors (celui dont la mémoire collective avait fini par oublier qu’il se nommait Rudi Garcia, avant que l’objet n’en fît son esclave). Il attend, en quête d’une nouvelle âme à souiller. Or voici justement que Florian s’avance ; sans en connaître la raison, il ouvre les portes et ses yeux s’écarquillent devant l’objet jaune fluorescent. Sous les yeux de Dehors (Rudi Garcia), Florian avance la main vers le brassard en chuchotant : « précieux… »

L’équipe

Pelé
Sarr (expulsé, 80e) – Rami – Caleta-Car – Amavi
Thauvin (Payet, 81e) – Lopez (Strootman,72e) – Sanson (Luiz Gustavo, 56e) – Ocampos
Germain – Balotelli

Mandanda, Kamara et Sakai sont suspendus après la traditionnelle rouste parisienne, ce qui est peu de choses comparé à la cascade d’absents à laquelle doit faire face notre adversaire du soir. Dehors (Rudi Garcia) effectue contraint et forcé les ajustements nécessaires, qui se matérialisent notamment par le retour d’Adil Rami.

Le match

Mâtin ! quel démarrage ! Sans doute pas encore chaud pour lancer son gegendribble favori, Ocampos choisit de lever la tête au lieu de foncer droit sur son défenseur. À la réception du centre, Balotelli contrôle et ajuste le gardien une main dans le slip, sans émotion apparente vu que l’assistant a levé son drapeau. Une séance vidéo plus tard, il s’avère que Mario n’était pas du tout hors-jeu : le but est donc validé (1-0, 4e).

Privé de sept éléments, Angers n’a rien de l’équipe chiante à jouer qui nous est habituellement opposée. Volontaires, collectifs et – n’ayons pas peur des mots – talentueux, nos joueurs font passer leurs adversaires pour des piquets de canisites. Ajoutez à cela un avant-centre qui marque, et le bonheur est complet : Lopez exécute un amour de récupération du ballon, qu’il projette illico à l’avant. Ocampos, Germain et Balotelli combinent à toute vitesse, Lucas décale l’Italien à l’entrée de la surface, pivot, lourde à ras-de-terre, l’affaire et le SCO Angers sont dans le sac (2-0, 16e).

L’OM fait d’Angers sa chose, et la rencontre prend des allures de fessée intersidérale, de celles qu’il nous plaît d’infliger une ou deux fois par saison à quelque médiocre de passage. Les Olympiens ont bien retenu l’adage selon lequel les buts sont comme le ketchup : une fois que ça commence à couler, ça ne s’arrête plus. Les Olympiens ont en revanche oublié l’adage selon lequel le ketchup c’est comme l’amour : faut quand même un peu songer à taper au cul de temps en temps. Nous nous endormons ainsi dans la routine, et les signaux inquiétants ne tardent pas à s’accumuler. Les ballons se perdent bêtement, les fautes et les cartons se succèdent (notamment un attentat d’Ocampos pour qui la sanction d’un simple avertissement tient du miracle) et le ballon ne sort plus guère de notre camp.

Une passe en retrait abominable de Rami élève le slipomètre à des altitudes encore impensables quelques minutes plus tôt. Angers insiste, multiplie les incursions avec une série de centres défendus plus ou moins en catastrophe. Alors que l’OM parvient enfin à dégager, le répit est de courte durée : l’arbitre s’éclipse pour reconsidérer à l’écran l’une de nos interventions défensives. En question, un contact d’Amavi sur Traoré que tout footballeur digne de ce nom classe dans la catégorie « viril mais correct ». C’est oublier que la vidéo, au lieu d’aider l’arbitre à appréhender la réalité d’une action, lui substitue une toute autre réalité dans laquelle les contacts ne s’apprécient plus à vitesse réelle : rediffusées dix fois, ralenties, décortiquées, les images laissent en effet apparaître que Jordan a, dans son mouvement, autant touché l’attaquant que le ballon lors de son intervention musclée. Dans le match normal Traoré n’a absolument rien demandé, mais la Matrice, elle, décrète : pénalty. Mangani botte plein axe un tir que Pelé aura sans doute des regrets de n’avoir pas su repousser (2-1, 36e).

Piqués au vif, nos joueurs montrent un regain de concentration que l’on peut approximativement évaluer à que dalle (angevine). À quelques actions près, c’est Angers qui fait l’essentiel du jeu : à la mi-temps, tous les espoirs nés de notre premier quart d’heure sont déjà envolés. Le beau jeu entrevu n’est déjà plus qu’un souvenir, si bien que le gain de trois points dégueulasses reste notre seule ambition de l’après-midi.


Le début de la seconde période est du même tonneau, et l’entrée de Luiz Gustavo peu avant l’heure de jeu change peu de choses à notre production offensive. Bouna Sarr se charge de mettre de l’animation, tout d’abord après une remarquable percée finalement repoussée par le gardien, puis par un enchaînement exemplaire « contrôle trop long + semelle de porc » qui le fait passer tout près du carton jaune. À ce propos, on a trop souvent dénigré ici les mauvais arbitres pour ne pas saluer l’effort de M. Miguelgorry : plutôt que de parler avec ses cartons, l’arbitre convoque Bouna et lui administre une leçon exceptionnellement longue, de l’ordre de la minute. Comme quoi, prendre le temps de la discussion,expliquer, faire comprendre, reste toujours le meilleur moyen d’amener les joueurs à la raison.

Sur ces entrefaites, l’OM se montre toujours aussi nul, tandis qu’Angers peine malgré toute sa bonne volonté à s’approcher de notre surface. Vous aurez compris que l’on se fait alors copieusement chier, QUAND SOUDAIN ! Alors que s’amorce le slipo-time, celui où les gonades se rétractent comme des bigorneaux et où tous les organismes se préparent à passer un quart d’heure en apnée, Jordan Amavi se met en évidence d’une façon particulièrement anale. Sa relance est interceptée dès l’entrée de notre surface : immédiatement lancé, Cristian Lopez est descendu par l’hippopotacle d’Adil Rami et obtient le pénalty le moins contestable du monde. Mangani prend une nouvelle fois Pelé à contre-pied (2-2, 76e).

Ayant reçu la baffe qui lui pendait au nez, l’OM se rue à l’attaque pour éviter le ridicule. Bouna Sarr récupère un corner mal renvoyé, réalise un dribble trop long et plante ses crampons dans le torse du défenseur en essayant de le récupérer, sous les yeux de M. Miguelgorry qui l’avait sermonné pour exactement la même faute dix minutes plus tôt. L’arbitre prend acte de l’échec de sa pédagogie positive, se met sa méthode Montessori au cul et administre à notre cancre la seule chose que cet abruti semblait ce soir en mesure de comprendre : le carton rouge.


Dans la foulée, Payet est appelé pour sauver la patrie, dans des conditions idéales comme on s’en doute. C’est pourtant à l’autre entrant Strootman qu’échoit la balle de match, quand il dérobe le ballon dans les pieds d’un défenseur pour aller défier seul Butelle. En angle fermé, le gardien parvient à sortir de justesse sa tentative. Angers rate à son tour l’occasion de l’emporter, quand Thomas reprend un corner de la tête, pleine barre.

Le match s’achève sur le gain de temps du gardien angevin, amenant la balle au fin fond de sa surface pour grappiller quelques secondes en vue du match nul : sans doute le seul observateur de Ligue 1 à croire encore, à cette ultime minute, qu’il existât encore quoi que ce soit à craindre de notre équipe de viers.

Les joueurs

Pelé (2+/5) : C’est terrible à dire, mais le pénalty qu’il ne parvient pas à repousser était plus important que celui arrêté devant Mbappé il y a quinze jours.

Sarr (0/5) :

Soixante-septième minute :

« Alors, je ne vous mets pas de second carton jaune car je sais que votre geste était maladroit. Mais il faut absolument que vous fassiez attention, vous auriez pu blesser le joueur. C’est bien compris ?

– Oui, Monsieur l’arbitre.

– J’insiste, je veux que vous ayez conscience qu’à la prochaine faute de ce genre, même involontaire, je serai contraint de vous expulser. C’est à vous de vous maîtriser, je ne vous sauverai pas la mise une fois de plus. Je veux être certain que vous ayez intégré cela, vous avez compris ?

– Oui, Monsieur l’arbitre.

– Non mais vous avez VRAIMENT compris ? C’est pour cela que je prends beaucoup de temps pour vous parler, vous ne me ferez pas regretter ma décision ?

– Non non, Monsieur l’arbitre, pas de problème, j’ai compris. »

Soixante-dix-septième minute :

« GNÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉ »


Rami (1/5) : « L’important, c’est d’être jeune dans sa tête ». Adil l’a bien compris ce soir, lui qui a allié le temps de chauffe d’une Citroën BX diesel à suspension hydropneumatique, aux émois du puceau redoutant l’éjaculation précoce à chaque mouvement.

Caleta-Car (2/5) : Il n’a pas manifesté son autorité désormais inhabituelle. Le fait qu’il soit passé « d’associé de Kamara » à « chaperon pour pensionnaire d’EHPAD en permission » y est peut-être pour quelque chose.

Amavi (1+/5) : Jérémymorellisé au dernier degré : un match irréprochable dans l’engagement et assorti d’interventions décisives, mais tout de même deux buts pour sa pomme par ce mélange si caractéristique de maladresse et de poisse. Si l’on veut se pencher sur les solutions, à l’époque, Marcelo Bielsa avait sur rendre une deuxième vie à l’intéressé en le plaçant en défense centrale. Mais c’était Marcelo Bielsa.

Thauvin (1+/5) : Déjà en perte de vitesse, Florian n’a pas tenu longtemps avant d’être victime du brassard maudit qui rend invisibles ceux qui l’enfilent.

Payet (81e) : Lancé avec la consigne de se démerder pour faire un miracle en dix minutes à 10 contre 11, dans un épisode de « vis ma vie de Nemanja Radonjic ».

Lopez (2/5) : Toujours aussi régulier et percutant dans notre temps fort, avec le regret que celui-ci n’ait duré que vingt minutes. Remplacé avant qu’il ne commence à distribuer ses passes depuis la tour France3, à force de reculer.

Luiz Gustavo (57e, 2+/5) : Apporte un peu plus de sérénité, mais pas au point de voir ses coéquipiers cesser de se comporter comme des effarouchés.

Sanson (2-/5) : Une première mi-temps contrastée, où récupérations et percussions autoritaires ont alterné avec des pertes de balle ineptes. Il a par la suite réussi à trouver un équilibre entre ces deux extrêmes, un équilibre quasi-bouddhique : il n’a plus rien fait.

Strootman (72e) : Alors que son association avec Luiz Gustavo promettait de le voir marcher ensemble sur tous les milieux de terrain de France, les vingt dernières minutes de ce match de merde avaient tout de la promenade de deux dépressifs dans les jardins de leur maison de repos. Sans pitié, le gardien adverse l’a de surcroît privé d’un but-Prozac.

Ocampos (3/5) : Deux passes décisives qui furent autant de sommets de lucidité et de précision, ainsi qu’un authentique tacle de taré pour ne pas oublier de satisfaire les groupies en manque de sang, de sueur et de salive.

Germain (2/5) : Rouage essentiel dans le premier quart d’heure, avant que les Angevins ne parviennent à isoler nos attaquants sur une île déserte.

Balotelli (4-/5) : Deux buts en un quart d’heure et rien du tout ensuite. Mario s’est tellement bien adapté à Marseille qu’il s’est déjà mis au fini-parti.

L’invité zoologique : Ludovic Butor

Échassier discret, le butor ne laisse pas grand chose à dire sur son compte. Grand mais pas trop, fragile mais pas non plus super menacé, le butor fait sa vie, en quelque sorte, et l’on ne se souvient guère de son existence qu’au moment où on le croise. Un animal sans grand éclat, à l’exception parfois d’un exploit qui peut occasionnellement faire de lui le héron du match.

– Les autres : Complètement largués, ils ont eu comme mérite premier de bien nous connaître, et donc de savoir qu’on pouvait se chier dessus à tout moment. Ils ont donc profité de notre relâchement satisfait pour se remettre sur pied, avec une absence de renoncement qui les honore.

Le classement : Le podium est mort, vive la saison suivante (qu’il faut donc préparer sans plus attendre, i.e : « dehors »).

– Les boutons : lecteur, tu remarqueras quelques lignes ci-dessous de nouveaux et beaux boutons intitulés respectivement « faire un don » et « rejoins-nous ».Tu es cordialement invité à cliquer dessus.

– Les réseaux : ton dromadaire préféré blatère sur Facebook, et sur Twitter. Julien R. remporte le concours zoologique.


Bises massilianales,

Blaah.

4 thoughts on “OM-Angers (2-2), La Canebière académie ne se donne plus d’espoir

  1. Il y a très souvent un 2-2 dans une journée de L1. Mais j’aurais misé sur n’importe quel autre match que celui-ci…

    En attendant, je file relire l’intro.

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