Aioli les sapiens,

Chacun connaît la Pastorale, cette charmante tradition provençale consistant à rejouer chaque année la scène de la Nativité comme si elle s’était déroulée dans l’un de nos villages. Ce que l’on sait moins, c’est que le clergé a de longue date tenté d’adapter d’autres épisodes bibliques à notre région. C’est ainsi que l’on m’a rapporté un curé d’une paroisse marseillaise qui, au catéchisme, narrait l’Ancien Testament en ces termes :

« Les enfants, aujourd’hui je vais vous raconter le mythe de Samson. Samson est né dans le quartier des Accates, consacré à Dieu dès sa conception. Samson était doué d’une force colossale. Il la consacrait à faire respecter le temps de travail des agents municipaux, que l’on nommait en ce temps les Phorçouvriens. Cela lui valut des haines profondes, vous vous en doutez. Les Phorçouvriens ont longtemps cherché le point faible de cet envoyé de Dieu, sans le trouver. C’est alors que Gyptis séduisit Samson. Curieuse comme toutes les Marseillaises, elle réussit à découvrir que le secret de sa force résidait dans sa chevelure. Bazarette, elle ne put s’empêcher d’en parler autour d’elle, et l’histoire vint naturellement aux oreilles des Phorçouvriens. Ceux-ci convainquirent  Gyptis de trahir son bien-aimé en échange d’une place de maire-adjointe et d’une priorité sur un anneau au Frioul. La nuit, Gyptis rasa la chevelure de Samson, qui perdit instantanément toute sa force. Les Phorçouvriens l’attrapèrent et le jetèrent au Lacydon, et purent instaurer leur loi qui court encore aujourd’hui. Gyptis, elle, se dit que les Marseillais était vraiment trop cons, et attendit plutôt qu’un estranger passe par là pour se maquer avec. Et c’est ainsi, mes chers enfants, depuis que Samson perdit sa chevelure, que tous les chauves de passage dans notre ville se vengent en nous emmanchant notre race à la première occasion. »

Il nous paraissait intéressant de rappeler cette anecdote en préambule, avant de passer au compte rendu de ce match arbitré, justement, par l’alopécique Amaury Delerue.


L’équipe

Mandanda
Sarr – Kamara – Alvaro (Caleta-Car, 8e) – Amavi
Sanson (Radonjic, 67e) – Strootman (Rongier, 77e) – Lopez
Germain BenedettoPayet


Le 11 de départ est inchangé : Sakai est encore trop juste pour redevenir titulaire, et Rongier est reconduit sur le banc.


Le match

Vous nous permettrez ici un second prémabule puisque, une semaine après nous avoir privés de 10 minutes de match, Canal Plus récidive en ne diffusant pas le coup d’envoi pour cause de tirs au but dans un Lyon-PSG féminin. Ou comment un groupe doté d’environ 72 chaînes dont 28 consacrées au sport réussit quand même à faire empiéter la diffusion d’une rencontre sur l’autre.

Cet incident étant purgé, place au jeu, et à un OM confirmant ses bonnes dispositions offensives du moment. Pour tout dire, nous sommes même près de voir Jordan Amavi se muer en passeur décisif, lorsqu’il trouve Lopez dont la frappe est détournée par le gardien.

Petite frayeur en revanche quand Mandanda effectue une sortie hasardeuse mais sans conséquence… du moins sur le moment : il apparaît rapidement que dans l’histoire, on ne sait trop comment, Alvaro s’est donné une fracture du péroné qui l’éloignera des terrains pour 5 semaines, plus les 82 minutes restant à jouer dans cette rencontre. Dans un premier temps, cela n’émeut guère les Olympiens, qui poussent Rulli à devoir exécuter une nouvelle RAIE devant une reprise de Germain.


Le jeu, et c’est une honorable surprise, se montre depuis quelques semaines d’une qualité inespérée en début de saison. La défense, et cela surprend déjà beaucoup moins de monde, est à l’image du parti socialiste : non seulement l’effectif est décimé, et ceux qui restent ne sont de surcroît pas les couteaux les plus aiguisés du tiroir. Amavi se fait pourrir au duel, un centre arrive sur Delort, absolument seul et qui bat Mandanda d’une tête plongeante. L’arbitrage vidéo nous sauve en discernant une position de hors-jeu d’un nanopoil de couille. Le nécessaire temps de chauffe de Caleta-Car n’aide pas à rendre l’édifice moins branlant, aussi considérons-nous la domination marseillaise du meilleur œil : malgré notre maladresse rageante à l’approche du but, c’est toujours du temps où le ballon n’approche pas de chez nous.

Las, nos latéraux se mettent en valeur sur une action pourtant anodine, Amavi couvrant au départ son espace une main dans le slip. Mais pas assez impliqué, Jordan se fait dépouiller du ballon par Mollet, qui adresse un centre dans les 6m. Kamara est trop court, mais pas Bouna Sarr qui bat Mandanda d’une reprise imparable. Pas aussi belle que celle de Francfort, pour les esthètes, mais tout aussi efficace (0-1, 17e).

L’OM met quelques minutes à rétablir sur le match une emprise excessivement frustrante. On aimerait bien qualifier les défenseurs montpelliérains d’intraitables, pourtant voir leur surface de réparation aussi fréquentée qu’un chemin de grande randonnée laisse à penser que l’OM pourrait se procurer des occasions plus nettes. Tergiversations, maladresses, sans compter les inénarrables centres pour dégun, limitent les sollicitations du gardien adverse qui, lorsque le ballon lui parvient enfin, finit de nous écœurer.


L’OM accélère encore au retour des vestiaires, tandis que Montpellier mise sur ses contre-attaques. C’est ainsi qu’après nous être fait trouer au milieu de terrain, nous voyons Delort échapper à Bouna Sarr et tromper Mandanda. Le slipomètre se calme vite en voyant l’assistant lever son drapeau, ce que confirme la vidéo (encore une fois à un poil près).

A ce stade, les plus perspicaces de nos lecteurs demanderont : « mais pourquoi diantre accabler ce pauvre Amaury Delerue en préambule, puisque de toute évidence ce brave homme et ses assistants nous ont sauvé les miches à deux reprises ? ». Certes, mais ce serait oublier un peu vite qu’en trois occasions, notre camarade a rejoué sa scène favorite depuis qu’il officiait dans le car-régie d’un Nîmes-OM de sinistre mémoire. Qu’il s’agisse d’examiner un raffût de rugbyman dans la face de Maxime Lopez, un bloc de menhir sur Payet ou encore une délicate déviation de la main sur un tir de Kamara, M. Delerue ferme les yeux, met la main sur l’oreille et crie « LA LA LA, JE VOIS RIEN, J’ENTENDS RIEN ». Accordons-nous : prises individuellement et hors contexte, aucune de ces décisions n’est à proprement parler scandaleuse ; mais dans la mesure où régulièrement de même gestes se traduisent par un arrêt-vidéo, lui même très régulièrement ponctué d’un pénalty, la question qui peut légitimement se poser est : « mais pourquoi pas pour nous, ici et maintenant, bordel de merde ? ».


Ceci étant dit, au milieu de ces minutes crispantes, l’OM parvient à égaliser. Payet décale sur la gauche le nouvel entrant Radonjic, dont le centre dévié parvient à Germain. Valère reprend d’un plat du pied infiniment appliqué : comme son illustre homonyme apache, Géronimo finit enfin par se rendre après avoir fait chier son monde pendant une durée exceptionnelle (1-1, 74e).

Le gardien adverse nous fait cependant quelques nouvelles misères dans le dernier quart d’heure, alors que Montpellier ne passe plus le nez à l’extérieur avant le temps additionnel. Jordan Ferri profite de cette rare incursion dans notre camp pour rappeler l’adage « lyonnais un jour, lyonnais toujours », en faisant preuve d’un magnifique comportement de salope vis-à-vis de Radonjic. Une faute d’anti-jeu mesquine, une baffe grotesque : il n’en fallait pas plus pour que le match parte en couilles. Kamara, notamment, a la mauvaise idée d’aller lui dire sa façon de penser. Dans un monde juste, gifler Jordan Ferri, tout comme insulter Alain Finkielkraut, devrait être passible de la légion d’honneur. Une sombre histoire de règlement rend la chose sanctionnable, paraît-il. Légaliste en diable, Amaury Delerue démontre son désamour total du football en traitant l’agresseur et le justicier de la même manière : rouge pour les deux.

Fort heureusement, notre effectif peut compter sur ses cadres expérimentés pour apaiser la situation. C’est ainsi qu’à la dernière minute, Dimitri Payet, 33 ans et ancien capitaine, se rend coupable d’une faute d’agacement sur Hilton, avant de traiter d’enculé (selon certaines sources) l’arbitre qui l’admonestait. Si l’excuse de vérité est admissible dans un procès en diffamation, elle ne figure pas hélas dans les lois du jeu : expulsion et grosse suspension à venir pour notre meneur de jeu. Prions pour que la chaste Roxana ne se pique pas, en plus d’en faire, l’emblème d’une nouvelle croisade contre les gros mots.


Voici comment, au terme de notre partie la plus séduisante depuis bien longtemps, nous terminons avec deux points perdus, un joueur blessé et deux autres sans doute lourdement suspendus. Un tableau bien sombre, et encore le pire est peut-être à venir.

Le pire.


Les joueurs

Mandanda (3-/5) : Sauvé par la vidéo à deux reprises avant que Bouna Sarr, le John Connor du pauvre, ne vienne rappeler à la Technologie que l’être humain resterait à jamais imprévisible.

Sarr (1+/5) : Bouna est ce que l’on appelle un joueur de percussion : il passe son match à taper sur les défenses, et surtout sur nos nerfs.

Kamara (3-/5) : Un match passable sur le plan défensif, plein de responsabilité sur le plan offensif. Et, donc, un carton rouge dû à la naïveté de la jeunesse, une erreur qu’avec la maturité il ne reproduira sans doute jamais plus : la prochaine fois qu’il croisera Jordan Ferri, il aura retenu la leçon et lui collera un authentique coup de boule dans le pif. Tant qu’à se faire expulser, autant que cela serve à quelque chose.

Alvaro (NN) :
« Ne craignez-vous pas que l’effectif soit un peu court ? – Après quatre journées de championnat, on est le seul club qui n’a pas de blessé. » Jacques-Henri Eyraud, août 2019.
« Ne craignez-vous pas de manquer de pompes ? – Après cinquante ans, on est la seule centrale à ne pas avoir connu d’inondation. » Le directeur de Fukushima-Daichi, avril 2011.

Caleta-Car (8e, 3/5) : après un moment de flottement bien compréhensible, Duje a profité du faible nombre d’attaques adverses pour se rassurer, et apporter sa contribution à nos propres tentatives.

Amavi (1/5) : N’a pas réussi à défendre, n’a pas réussi à centrer, et pour une fois il n’a même réussi à blesser personne. Et pourtant, dans les trois cas, ce n’est pas faute d’avoir essayé.

Strootman (3/5) : Homme de base sobre d’un milieu enfin équilibré. On constate que Jordan Ferri a attendu sa sortie avant de foutre le oaï : l’ancien lyonnais (vous ai-je seulement dit que le bougre venait de Lyon ?) est peut-être un connard, mais il n’est pas inconscient.

Rongier (77e) : Après une première entrée timide, le voici qui s’est d’emblée fondu dans le collectif. C’est ça ou il est collé d’office au dépannage en défense centrale, de toute façon.

Lopez (3/5) : Inhibé ? Vous allez voir, moi si je suis inhibé. De la provocation incessante, des passes offensives, des projections, des dribbles ambitieux : Maxime s’est évertué à montrer qu’il n’avait plus rien à voir avec le puceau apeuré du début de saison. D’accord, il en a mis un peu partout au passage, mais bon, c’est l’âge qui veut ça.

Sanson (3/5) : Hier j’ai vu Hulk avec Edward Norton dans le rôle-titre. Ca me paraissait un casting assez improbable, jusqu’à ce que je voie Morgan réussir des charges à l’épaule en pagaille cet après-midi. Comme quoi, faut pas rester sur ses premières impressions.

Germain (4/5) : « Yahaaaaa, c’est l’heure des dessins animés », s’écria Dromadette en se ruant sur le canapé, arrachant au passage la prise du boîtier internet qui mit deux minutes à se réinitialiser. Tout ça pour dire, Valère, qu’après la panne de Canal Plus la semaine dernière, je n’ai toujours pas vu un de tes buts en direct cette saison. T’as plus qu’à recommencer.

Radonjic (67e, 3/5) : Une passe décisive (chanceuse certes) et un début d’engatse vite réfréné quand il a vu que l’avorton d’en face (formé dans le chef-lieu du Rhône) ne portait pas de casque de CRS et n’était donc pas un partenaire de bagarre digne de ce nom.

Payet (1+/5) : Une première mi-temps en manque absolu de spontanéité, avec d’agaçantes tergiversations ne réussissant qu’à ralentir le jeu et à voir les occasions de tir se refermer. Une seconde mi-temps nettement plus spontanée, où il mène le jeu avec la même constance, mais de manière bien plus efficace. Et enfin, un temps additionnel excessivement spontané, où il invite l’arbitre à aller niquer sa grosse pute de mère (selon certaines sources), avec les conséquences que cela implique.

Benedetto (2/5) : Notre Argentin n’a une nouvelle fois pas ménagé ses efforts, mais n’a pu empêcher l’interruption de sa série de buts. La situation devenant désespérée, il a fait comme Lucas Ocampos : il a tenté des retournés. Je ne sais pas si tout le monde fait ça en Argentine, si c’est le cas ça doit donner des résultats curieux. Je vois bien le président Macri faire une bicyclette sur la table de réunion, quand le FMI lui demande les mesures qu’il compte prendre contre l’inflation. Ou encore chez le médecin : « Hélas, Monsieur, tous vos traitements ont échoué. – Il n’y a donc plus rien à faire docteur ? – Attendez, je vais tenter un retourné. »


L’invité zoologique : Jordan Furet

On a tendance à l’oublier, le furet c’est avant tout un putois, à savoir un truc nauséabond, agressif  mais qui crie sa mère dès qu’on le menace d’un peu trop près. Bref, un truc sournois et nuisible, qui est bien l’invité approprié pour évoquer nos adversaires – enfin surtout un ; les autres, après tout, j’ai rien contre eux.

– Les autres : Pas sexy, mais leur blocquéquipe à double rideau de barbelés assorti de leurs contres assassins a le mérite de la cohérence. Ajoutons à ça un gardien de haut niveau, et voici le prototype de l’équipe casse-couilles. Attention cependant, Der Zakarian semble lui aussi sujet aux rétractations gonadiques dont soufrent nombre d’entraîneurs français et qui, à force de faire reculer son équipe à l’excès, pourraient anéantir ces bonnes dispositions.

– Le classement : Nous ratons l’occasion de prendre pour un soir la tête du championnat ; voyons-y du positif, c’est une chance de plus de continuer à progresser dans l’humilité. L’enchaînement Dijon-Rennes-Amiens pourrait être propice à l’accumulation de points, n’était notre défense dont le niveau de rafistolage s’annonce dantesque.

– L’anniversaire : La Canebière Académie fête ses dix ans le mois prochain. Donnez-nous vos idées pour célébrer dignement cela.

Les boutons : les petites choses ci-dessous intitulées « faire un don » et « rejoins-nous » te font de grands yeux attendrissants pour que tu viennes cliquer dessus.

– Les réseaux : ton dromadaire préféré blatère sur Facebook, et sur Twitter. Florent L. gagne le concours zoologique.

Bises massilianales,

Blaah.

6 thoughts on “OM-MHSC (1-1), La Canebière académie s’agace

  1. Comme idée pour célébrer tes 10 ans d’écriture, moi je te donnerai ce conseil : »continue comme ça, tu es un artiste de l’inutile, tu es au journalisme sportif ce que pîerre Soulages est à la nuit ».
    Et si josé (Touré), je rajouterais « bravo et merci ».

  2. Une suggestion pour les 10 ans : une acad d’un des gros matchs de la geste Marseillaise, selon tes envies : Bari, Munich, CdF 89, Montpellier 98, Milan 91, Benfica 90, ou dans la période Skoblar/Magnusson/César…

    Sinon encore merci, chaque match apporte son lot d’incertitude, mais tu nous offres une bonne tranche de rigolade quelque soit le résultat obtenu par nos pinpins.

  3. Pour les dix ans, une présentation PowerPoint s’impose (même si elle contient dix slides de Monsieur Lapin).

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