Salzburg-OM (2-1 a.p.), La Canebière académie gagne le droit de rêver

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Ode aux joueurs moches.

Arracher une finale de coupe d’Europe avec une colonne vertébrale Pelé-Rolando-Zambo Anguissa-Njie, voilà qui vaut tous les Champion Project® du monde.

Aioli les sapiens,

Après l’euphorie de la folle remontée contre Leipzig, c’est à une émotion européenne d’un autre genre que nous confrontait cette demi-finale contre Salzburg. Nette au tableau d’affichage, la victoire 2-0 du match aller masquait mal un match aux nombreux instants slipométriques, notre cage terminant aussi vierge de le casier judiciaire des Balkany et par un miracle à peu près semblable.

Emotion nouvelle, donc à l’orée de cette demi-finale : point de remontée à accomplir cette fois-ci, il s’agit seulement de ne pas tout perdre. Toute réside alors dans ce « seulement », dont les milliers, les centaines de milliers même de ventres et d’âmes blanc-et-bleu par le monde, tordus dès le réveil par l’attente angoissée du coup d’envoi, mesurent la perversité. Conserver deux buts d’avance, cela n’a rien d’infaisable, c’est même fréquent. Les médias ergotent sur le nombre d’orteils devant compléter le pied que nous avons d’ores et déjà en finale. C’est alors que l’enthousiasme le dispute à l’angoisse : point de perdant valeureux qui tienne, ce soir nous n’aurons d’autre choix que la récompense ou le ridicule. Tout, ou rien.

Une journée à se ronger les sangs, à s’adonner sans implication à n’importe quelle occupation à même de nous distraire du compte à rebours, dans ce curieux masochisme qui, pour emprunter l’élégante formule de notre lecteur Clint Horris, consiste à »attendre toute la journée mais même pas pour être soulagé, pour commencer à se chier dessus.« 

Et de quelle élégance, de toute façon, peut-il bien être question lorsque l’OM, enfin libéré, joue sa demi-finale comme une armée de branques, sale, fatiguée, maladroite, malmenée, mais dotée d’un courage sans pareil. Tous ont été moqués à un moment où à un autre, coupables chez nos esprits mesquins et prompts à la raillerie facile de ne pas être onze surdoués. Mais oui, même au-delà des têtes d’affiches désignées, c’est l’albatros au gros cul, c’est le colosse prognathe, c’était à l’automne le camerounais épileptique, oui, chacune de ces figures de poulpe ont, à un moment ou à un autre, sauvé notre parcours européen ; sans une seule d’entre elles, nous ne vivrions pas ce rêve jamais rencontré depuis 14 ans.

Si le Projet® suit son cours comme on l’espère, nos joueurs moches seront condamnés à la raréfaction. Puisse leur mentalité, elle, ne jamais s’éteindre.

 

L’équipe

Pelé

Sarr – Rami – Luiz Gustavo – Amavi

Lopez (Zambo Anguissa, 67e) – Sanson (Rolando, 101e)

ThauvinPayetOcampos

Germain (Njie, 84e)

Rudi Garcia doit toujours composer avec les indisponibilités de Sakai et Mandanda, et désormais de Mitroglou. Il fait par ailleurs le choix de Luiz Gustavo en défense, Lopez et Sanson étant associés au milieu.

 

Le match

L’OM se prémunit de toute démarrage en trombe de ses adversaires, en appliquant lui-même une intensité considérable dès les premières secondes. Ce n’est qu’à partir de la dixième minute que Salzburg achève les rares slips qui n’avaient pas été consommés plus tôt dans l’attente du coup d’envoi : nos placements et nos duels au milieu manquent de tranchant et, sans pour autant concéder d’occasion énorme, l’OM peine à maîtriser son sujet.

Les minutes ne défilent pas assez vite pour nous emmener à la pause dans la sérénité : coup sur coup, Sarr puis Lopez sont avertis pour des fautes grossières, traduisant la facilité de Salburg à nous dépasser sur quelques accélérations. Dans la mesure où la qualité de notre jeu offensif est elle aussi touchée par cette nervosité, c’est avec soulagement que nous voyons l’arbitre intimer le retour au vestiaire. Aux yeux d’un spectateur neutre, ces 45 premières minutes se sont sans doute avérées très fades : à nous, elles conviennent parfaitement,

Un petit coup d’accélérateur ne serait toutefois pas de trop, pour conserver un peu plus paisiblement cet avantage de deux but. C’est aussi ce que se disent nos joueurs, revenant sur le terrain disposés à montrer davantage d’autorité et de créativité. Une contre-attaque fulgurante aboutit notamment à un centre que Payet dépose sur le pied de Germain. Las ! l’intérieur de Valère échoue à attraper le cadre, un incident que les spécialistes nomment parfois « le tournant du match » et que nous nous contenterons plus modestement de « putain de raté à se bouffer les couilles ».

De fait, en ce qui concerne la mastication de nos gonades, les Autrichiens ne tardent pas à nous offrir la vinaigrette idoine. Haidara s’empare ainsi du ballon à 40 mètres, puis s’offre en toute décontraction un slalom au milieu de Sanson, Lopez et Luiz Gustavo pour, de l’entrée de la surface, finir par tromper Pelé d’un petit extérieur (1-0, 53e).

L’ouverture du score déclenche le slipomètre de niveau européen – celui avec les douze étoiles en rond. Aucun duel n’est gagné facilement, et d’ailleurs très peu sont gagnés tout court; l’équipe est désorganisée, en panique, et même le patron, le grand, le sage Luiz Gustavo convulse en permanence tel un Jérémy Morel des grands soirs. L’OM accumule les pertes de balles jusque parfois dans sa propre surface, concède coups-francs et corners en pagaille, et finit par céder sur une action qui vaut carton plein au bingo de la lose. Notre côté gauche se fait disperser, et le centre qui s’ensuit est repoussé par Rami sur un Autrichien. Celui-ci contrôle plus ou moins de la main, et adresse un tir non cadré que Bouna Sarr bonifie d’une déviation imparable pour son gardien (2-0, 65e).

Récapitulons : les joueurs viennent de dilapider leur avantage, sont en panique totale, se montrent sur chaque action soit paralysés, soit maladroits, et qui plus est nos adversaires bénéficient d’un arbitrage maison (pas plus que nous à l’aller, cependant). Les 25 minutes qui restent semblent donc vouées à l’attente de la troisième et fatale réalisation autrichienne, qui viendra achever ce match retour raté dans les grandes largeurs.

Et pourtant, c’est alors que… après quelques alertes incluant un tir très bien sorti par Pelé, l’OM sort la tête de l’eau dans le dernier quart d’heure. Payet retrouve un poids plus constant sur le jeu, le nouvel entrant Zambo Anguissa réussit des dribbles et – oui – même des frappes, et les corners s’accumulent en notre faveur, à défaut d’être bien tirés.

La délivrance est tout près de survenir à trois minutes de la fin, quand un centre de Thauvin est grossièrement et volontairement contré de la main par un défenseur. Néanmoins, l’harmonisation des pratiques et des règlements étant ce qu’elle est depuis l’instauration de l’espace Schengen, nous sommes arbitrés en Europe comme en France : nous pouvons donc nous carrer notre penalty où il faut malgré cette faute évidente.

C’est donc en prolongation que doit se faire la décision. Nous évoquions plus haut le parallèle entre Luiz Gustavo et la réincarnation de Jérémy Morel ? Eh bien Yohann Pelé, lui, s’est décidé à révéler au monde qu’il était le fils illégitime de Gordon Banks et Keylor Navas, en parant d’un réflexe extraordinaire une tête de Caleta-Car sur corner. Sans être franchement dominé, l’OM ne se procure pas d’occasion. L’entrée de Rolando à la place de Sanson permet alors à Luiz Gustavo de remonter au milieu de terrain, où son impact se fait apprécier.

Rincés, les 22 joueurs se vouent à des tentatives hasardeuses. Les Autrichiens échouent ainsi sur notre défense, avant que l’OM ne reprenne position dans le camp sale zbourgeois. Après un corner et plusieurs centres repoussés, une reprise de Zambo Anguissa nous procure un nouveau coup de pied de coin. Tiré par Payet, celui-ci atterrit sur Rolando; celui-ci profite de son surprenant isolement pour, d’un habile intérieur du droit, placer le ballon au fond des filets et Jean-Michel Aulas sous respirateur artificiel (2-1, 116e).

Cette action marque également la péremption de l’arbitrage à domicile, puisque le corner ayant occasionné cette libération n’était tout bonnement pas valable : ce n’était pas un défenseur qui avait contré le ballon, mais Lucas Ocampos. Victimes de cette autre grossière erreur d’arbitrage, les sales zbourgeois trouvent-là un prétexte pour totalement vercoutrer la fin de match.

[Ndr : vercoutrer, v. trans. : face à la malchance ou l’injustice, ne rien faire qui puisse en contrecarrer les effets afin de mieux pouvoir se lamenter ensuite.]

Ainsi, alors qu’il reste quelques minutes à jouer, nos rivaux font fort obligeamment tourner la montre, notamment quand Haidara adresse une baffe à Payet et passe une bonne minute à contester son expulsion. Finalement, ces minutes qui auront suivi le but de Rolando auront été les moins difficile à vivre de la journée.

 

Les joueurs

Pelé (5/5) : Salzburg a marqué un but que Pelé a arrêté.

Sarr (2-/5) : Sa percussion offensive habituelle mais un but contre son camp et quelques courants d’air notables, comme pour mieux nous rappeler l’époque héroïque où l’on se demandait qui avait eu cette idée à la con de le placer en défense.

Rami (2+/5) : Ce n’était pas un match que les sales zbourgeois ont imposé à Adil, c’était un escape-game à l’intérieur d’une lessiveuse. Il en est ressorti victorieux, mais éprouvé.

Luiz Gustavo (1+/5) : Des effrois de pucelle assez incompréhensibles. De la même manière que certains ont des retour de paludisme, peut-être subit-il parfois des retours de 7-1 lorsqu’il affronte une équipe germanique ?

Amavi (2+/5) : Valeureux à défaut d’être gracieux, à l’image de toute la bande de grognards en fait.

Lopez (1+/5) : Petit mousse au cœur de l’ouragan ; s’il ne se noie pas, s’il ne se fait pas manger, il ne pourra que sortir grandi de l’épreuve.

Zambo Anguissa (67e, 3+/5) : Fossoyeur des subtilités déplacées, il répond présent lorsque l’harmonie du monde doit se rétablir à grands coups de charges dans le buffet et de reprises déviées.

Sanson (3/5) : Celui que l’on surnommait pourtant Morgan-le-frêle a livré une première période sous le signe du beau baston, avant, comme toute l’équipe, de se reconvertir en pressoir à huile durant tout le temps fort adverse.

Rolando (101e, 5/5) : Depuis trois ans, des hauts, des bas, et désormais une place bien méritée dans notre légende.

Thauvin (2-/5) : Je ne prétends pas savoir à quel point il est fatigué, je dis juste que s’il lui arrivait demain de disputer une partie de squash contre Jean-Claude Gaudin, le maire n’aurait pas forcément une cote à deux chiffres.

Payet (3/5) : Sur un régime intermittent, à part pour ce qui est des coups de pieds arrêtés qu’il a tous foirés, sans exception. Ah si, pardon, une seule, et mâtin ! quelle exception.

Ocampos (2-/5) : Malgré l’ardeur qu’on lui connaît, sa réussite la plus notable est d’avoir dévié la frappe de Zambo Anguissa en se faisant passer pour un défenseur autrichien.

Germain (1+/5) : Une combativité exemplaire dans un rôle ingrat. Ingrat, tout comme sa note, qui retient surtout cette occasion foirée juste avant que l’on n’encaisse le premier but. Les teintureries marseillaises ainsi que les fabricants de détachants pour canapés lui doivent en effet beaucoup.

Njie (84e, 3-/5) : Une entrée plutôt rafraîchissante, malgré les quelques miettes habituelles laissées sur la moquette.

 

L’invité zoologique : Duje Caleta-Carcajou

Agressif, féroce, gourmand le bien-nommé glouton (ou carcajou, donc) est ce que l’on appelle dans le langage zoologique un gros bourrin. Peu importe qu’il rende plusieurs quintaux à sa proie, il l’attaquera tout de même avec une absence de complexe qui force le respect. Bon, évidemment, il arrive fréquemment que, lors de ses assauts, la différence de gabarits se fasse sentir, et que l’agressé ramène l’agresseur à la réalité d’un bon coup de griffe ou de sabot en travers de la figure. Le carcajou était donc bien l’invité approprié pour nous parler de ce match contre ces casse-burnes de première.

– Les autres : Aucun complexe, donc, et cette capacité dans leur stade à imposer une pression assez insupportable à leur adversaire. La confrontation s’est ainsi jouée à très peu de choses, nous pourrions même oser dire qu’ils se sont fait éliminer aussi bêtement que des Français.

– La suite : après quelques joutes de championnat qui se termineront vraisemblablement en capilotade vu notre état de fatigue, rendez-vous le 16 mai pour rencontrer l’Atletico de Madrid, vainqueur de sa demi-finale contre Arsenal. Ici encore, nous prétendre favoris relèverait d’un optimisme très légèrement excessif.

– Les images : savourez.

La statistique : Ceci étant dit, remporter la finale serait historique à plus d’un titre : en effet, il est excessivement rare que les lyonnais connaissent l’humiliation de voir leur ennemi triompher dans leur propre stade, le dernier en date étant Jesse Owens aux JO de 1936,

– Les réseaux : ton dromadaire préféré blatère sur Facebook, et sur Twitter. Padls remporte le concours zoologique.

Bises massilianales,

Blaah.

11 thoughts on “Salzburg-OM (2-1 a.p.), La Canebière académie gagne le droit de rêver

  1. bravo pour ta » statistique » et le parallèle entre les abrutis lyonnais et ceux du JO.
    tu m’as fait rire même à 3:17 du mat.
    bravo aussi à nos marseillais! encore un match et ça sera le paradis!

  2. Ce soir le morvan sera bleu et blanc. Mon papa va me prêter son khalifa Airways pour l’occasion.
    Ps : « vercoutrer » aura une place de choix dans le dictionnaire, juste avant le mot « verge ».

  3. Magnifique !!! à 2-0 j’ai été obligé d’éteindre la télé pour laisser une chance à l’OM de se qualifier. Je suis content parce que ça a bien marché mais quand même : elle est un peu chiante cette malédiction.

  4. merci pour cette acad ! Hier soir, notre OM était plus proche de Maryse Joissains que de Scarlett, mais j’ai fini par jouir quand même.

  5. A 2-0 j’ai été arroser mes tomates le fly à la main. Tout le monde s’en cague mais ça fait du bien de le dire.

  6. Ah oui et la note de Pelé et son commentaire rentrent directement au Panthéon des moments historiques du football

  7. Ah les Marseillais et le révisionnisme… On sait bien que vous êtes nostalgiques de la bonne vieille période où la Gestapo vous fournissait pleins de jobs étudiants enrichissants (en même temps, entre ça et la mafia, c’était les mêmes postes et les mêmes tâches au final…) et où les Marseillais faisaient tout ce qu’ils pouvaient pour aider la carrière de Bousquet. (et plus sérieusement, faut reprendre les interviews d’Owens pour lire qu’il a été bien mieux reçu par les nazis que par son propre pays…).

    Sinon, Aulas sous assistance? Parce qu’il a eu l’assurance que le stade serait plein pour la finale et donc qu’il pourrait filer des merguez trop cuites et de la pinte de bière sans alcool à 8 euros à un tas de blai… de supporters marseillais enthousiastes à la dépense? Attendez vous qu’il ose même balancer qu’il a pu recruter un gars cet été grâce aux recettes de la finale…

  8. Pas la peine de répondre au frustré qui ne sait pas que le MBF fut, hélas, aussi bien reçu à Lyon qu’à Marseille. Nos dirigeants semblent malheureusement tomber dans le piège — pourtant évident ! — tendu par Aulas pour nous détourner de nos objectifs et aviver les conflits pour tous nous mettre sur le dos ensuite.

    Pourtant, après la qualification acquise à l’issue de ce match slipométrique, il y a fort à faire. Et ce fut en partie fait ce soir face à Nice. Et nos joueurs feront tout pour que ce soit fait les prochaines semaines.

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