Aioli les sapiens,

Il ne fallait pas trop d’une trêve internationale pour laisser s’apaiser le souvenir de l’incandescente réception de Lyon. Quinze jours plus tard, c’est ainsi une seconde place que nous sommes appelés à défendre dans le 112e quartier de Marseille. Plus éloignée que Planier, plus peuplée que le Frioul,  l’Île du Ramier est en effet l’un de ces quartiers pittoresque où s’exprime l’identité particulière de notre ville. Traditionnellement, le match contre le TFC a lieu au « Stadium », un stade municipal annexe situé sur ladite île. Chaque année, cette délocalisation permet à de nombreux supporters marseillais de venir assister à un match au prix de 4 heures seulement de trajet, soit une heure de moins que pour se rendre au Vélodrome depuis les quartiers Nord. C’est ainsi que 23 000 personnes arboraient les couleurs bleu et blanc face à leurs visiteurs du soir.

Parlons-en, justement, de ce Toulouse Football Club : avant-dernier du championnat, entraîné par Antoine Kombouaré, et comptant dans ses rangs l’inénarrable Aaron Iseka Leya, cet adversaire ne peut que nous appeler à la vigilance. On est bien, on est détendus, on a évité la honte suprême de perdre contre un club de Lyon entraîné par Dehors, bref tous les voyants sont au beau fixe. Alors par pitié, ne gâchons pas tout en nous faisant torcher ce soir par ces mastres.


L’équipe

Mandanda
Sakai – Kamara – Perrin – Sarr
Rongier – Strootman – Sanson (Germain, 75e)
Lopez (Radonjic, 64e) – Benedetto (Aké, 87e) – Payet


Amavi, Alvaro et Caleta-Car sont suspendus, ce qui confère à notre défense la fiabilité d’un immeuble Marseille Habitat. André Villas-Boas étaie l’édifice comme il peut, en rappelant le jeune Perrin tout en faisant redescendre un Kamara qui ne déparait pourtant pas un cran plus haut. Le poste de sentinelle se trouvant dépourvu de jeunes qui bossent, on en vient à demander au cadre A échelon 12 syndiqué FO Municipaux d’avoir l’obligeance d’écourter ses RTT pour bien vouloir donner un coup de main, ce à quoi Kevin Strootman se plie volontiers.

Devant, Maxime Lopez est une nouvelle fois préféré à Germain pour pallier l’absence longue durée de Thauvin.


Le match

Après deux victoires basées essentiellement sur la notion de « couilles », notre équipe semble préférentiellement s’orienter vers une pratique plus fine du jeu de football. Sage précaution, sachant qu’il était illusoire d’espérer disputer une quelconque suprématie à Antoine Koubouaré sur ce terrain, l’entraîneur toulousain étant plus qu’aucun autre le chantre du football testiculaire.

Et pourtant, pendant dix bonnes minutes, le TFC nous fait l’amabilité de nous regarder jouer, en s’abstenant de nous opposer le moindre duel. Nous en profitons pour accumuler les corners, sans autre occasion qu’une tête de Perrin sauvée d’un arrêt-réflexe dès la 2e minute. Ayant sans doute attendu pour se mettre à jouer que leurs supporters aient pu entrer dans leur parcage visiteurs, les Toulousains se réveillent à compter de la 10e minute, profitant notamment d’erreurs défensives pour tirer deux fois au but.

Surpris de voir les Toulousains finalement ne pas se laisser passer dessus pendant tout le match, nos joueurs sombrent dans une certaine maladresse, que vient égayer de trop rares actions. Un très beau mouvement collectif Payet/Sanson/Benedetto/Rongier finit ainsi par un tir de ce dernier sur le gardien. Peu après, Valentin rend la pareille à l’Argentin, servi devant la surface et qui voit sa frappe frôler le montant.


La mi-temps s’approche ainsi mollement, et les Olympiens empêtrés dans leurs mauvais choix et leurs erreurs techniques semblent n’attendre que de rentrer au vestiaire pour s’y faire dûment secouer. C’était sans compter sur Steven Moreira, défenseur toulousain de son état et digne héritier de figures locales telles que Zinedine Machach (pour l’esprit d’à-propos) et Patrice Alègre (pour la violence psychopathe). Lorsque, après d’âpres duels en défense, l’OM réussit enfin à extirper le ballon d’une zone dangereuse, le Toulousain décide sans prévenir qu’Adolf Hitler s’est réincarné en genou de Bouna Sarr et mène illico son opération Walkyrie personnelle. Dans le car vidéo, la voix rigolarde de Michel Cymès invite l’arbitre à venir revoir cette action digne de figurer dans les annales de la chirurgie orthopédique, rubrique « bêtisier ». Tout est bien qui finit bien : Bouna se relève, le carton jaune initial se transforme en rouge, et nous nous préparons à 45 minutes de siège face à dix joueurs prêts à bétonner comme des porcs (avec des couilles).


De retour sur le terrain, Sakai et Sarr intervertissent leurs positions ce qui, contrairement à ce que cette phrase pourrait laisser entendre, ne rend pas la rencontre beaucoup plus émoustillante. L’OM s’englue ainsi dans une domination improductive, ne pouvant compter que sur l’usure des adversaires pour enfin se procurer des occasions. Radonjic et Germain entrent à cette fin, mais c’est au préalable Toulouse qui se montre tout proche de châtier notre inefficacité. Après un long moment de cafouillage, un centre parvient à Sangaré, absolument seul aux six-mètres : le stade retient son souffle, le slipomètre en ébullition, mais un formidable réflexe de Mandanda préserve le score.


La différence finit par se faire quand, à la suite d’une passe déviée de Radonjic, Germain parvient à arracher le ballon des pieds d’un Toulousain. Payet en profite pour délivrer un amour de passe à Benedetto dans le dos de la défense et, tout en maîtrise, notre avant-centre efface le gardien et parvient à conserver son équilibre pour conclure (0-1, 76e). Un bonheur n’arrivant jamais seul, Germain réalise un nouveau pressing victorieux dans le camp adverse et envoie Radonjic dans la surface. Avec un sang-froid étonnant chez ce niqué de la tête jeune ailier impétueux, Nemanja passe le dernier défenseur d’un dribble subtil avant d’enrouler calmement du gauche (0-2, 79e). Un but en 27 matchs, à ce moment-là, le sang-froid, on peut bien se torcher avec : le Serbe enlève son maillot et exécute une célébration à la lisière de l’hélicobite, avant de reprendre sa place et de se remettre à rater ses actions comme si rien ne s’était passé. Nous nous procurons enfin quelques occasions de 3-0, Rongier étant notamment mis deux fois en échec par Reynet.

On se satisfera bien aisément de cette victoire moche mais solide, de celles qu’il faut impérativement pour espérer un classement correct en fin de saison.


Les joueurs

Mandanda (4/5) :

« Vous voyez, ce gardien dépressif, qui s’est encore pris un but imparable sur la seule occasion adverse du match ? Eh bien c’est moi. Ou plutôt, c’était moi, avant de découvrir Comme j’aime. »

Sakai (2/5) : Du tréfonds du Japon ancien, le dit des Heike Monogatari , transporté par le luth des moines aveugles, a soufflé ses mille histoires aux enfants de l’Empire. Ceux-ci s’ouvrant au vaste monde, ont emporté avec eux ces contes, et c’est ainsi qu’Hiroki-san narre chaque soir le dit du Sabre dans l’Air :

Pendant la guerre des Heike et des Gengi, il advint qu’un soldat désespérât de voir son nom gravé dans l’histoire. Ne resteraient dans les mémoires que des samouraïs bien plus talentueux que lui, ainsi que, pire encore, quelques-uns aussi médiocres mais entrés dans les mémoires collectives à force de bourdes savoureuses. « Aie le courage d’être la surface que nulle brise ne trouble », lui avait enseigné son maître. « Il est des gens dont les étoiles brillent à la face du monde, la tienne ne scintille que pour toi. Nourris-la, agis en homme de devoir, impassible et sans souci du monde. S’il arrive que ta main soit malhabile, fais en sorte qu’elle guide toujours ton épée sur la voie du bien. »

Le guerrier avait appliqué ces préceptes pendant toute la guerre. Il connut des réussites, des échecs et des épreuves aussi, mais comme le lui avait enseigné son maître, il s’effaçait derrière son devoir, de sorte que son existence ne créât aucune turbulence dans le monde. Mais il ne pouvait s’empêcher de ressasser ce vers du poète Vitorji Lu : « À périr tout entier, que servirait-il de naître ? » « La mort peut me saisir à tout moment au combat, et que restera-t-il de moi ? Rien, pas même le moindre courant d’air. Des héros ont marqué leur temps, et même des bouffons ont laissé leur trace. Si je ne puis être l’un, ne puis-je pas être l’autre ? »

Comme saisi de folie, le guerrier prit son sabre et entreprit, furieux, d’en donner de grands coups dans le vide comme pour fendre l’air immobile. Ses compagnons le regardèrent un instant, intrigués, puis haussèrent les épaules avant de retourner vaquer à leurs occupations. Mais au moins, pour un temps, le soldat avait-il existé aux yeux des autres.

Et c’est ainsi que, de semaine en semaine, Hiroki-san applique les principes de son maître et se fond inlassablement derrière son devoir pour mieux masquer ses erreurs comme ses réussites. Puis, quand Hiroki-san en a assez d’être humble, il tente de se révéler aux yeux du monde par une figure inspirée des plus grands bouffons, à savoir le « tacle raté qui se transforme en charcuterie sur la cheville adverse » de Jordan Amavi.


Kamara (3+/5) : Un match absolument serein, avec même ce carton jaune stupide récolté à 10 minutes de la fin comme pour mieux éviter à Villas-Boas de céder à une confiance aveugle envers sa défense.

Perrin (3+/5) : Très poli, il a fait comme l’ensemble de la Ligue 1 cette année, il s’est essuyé sur Toulouse avant de repartir.

Sarr (3/5) : Essayé à un inhabituel poste d’arrière gauche, ce qui a eu pour effet immédiat de redéclencher le sort de titularisation éternelle de Jordan Amavi. La déesse Erezulie a alors pris possession d’un corps toulousain pour adresser un dernier avertissement avant amputation à ceux qui prétendraient occuper la place de son protégé. Message reçu, Villas-Boas a prudemment exfiltré Bouna côté opposé, où il a livré un math selon ses standards.

Strootman (2/5) : Pas une seule intervention défensive où il ne donne pas l’impression de traîner un chariot de 50 kg derrière lui, on pourrait presque parler de stroot attelé.

Rongier (4/5) : Vis-à-vis du précédent, l’équivalent de Kato dans le frelon vert. Supposé assistant du héros, c’est lui qui marave les méchants à sa place, conçoit les armes, répare la voiture et luifait le café en prime.

Sanson (3-/5) : Part sur ses bases hyperactives avant de s’essouffler à force de pédaler dans la glu toulousaine, un peu comme la légende de la petite souris qui se débat dans une jatte de lait et finit par en faire du beurre. Du beurre qui aurait d’ailleurs été fort utile aux Toulousains en fin de match, mais ceci est une autre histoire.

Germain (75e) : Alors que ses équipiers s’escrimaient sans succès à entamer la muraille violette, Valère a déboulé et te nous a réglé ça en deux minutes avec sa technique des points vitaux. Un coup de paume sur l’oreille, un autre sur le cœur, deux doigts dans le cul et pof, l’opposant est KO sans l’avoir vu venir.

Lopez (2+/5) : Cochonneur d’actions par quelques choix radonjiques (radonjique : adj., se dit d’un choix de passe ou de dribble pris en débit du bon sens ; syn. : njiesque).

Radonjic (64e, 4/5) : Si ce qualificatif n’était pas préempté par les pétasses sur Facebook, on pourrait presque qualifier Nemanja « d’attachiant », vu sa capacité à attirer autant l’affection que les paires de claques. Si j’étais le département marketing de l’OM, je sortirais un santon « Lou Ravic » à son effigie, succès garanti dans les crèches.

Payet (3+/5) : Bien sûr, c’est plus rigolo quand il passe 90 minutes à pisser sur ses adversaires, surtout quand lesdits adversaires sont lyonnais. Il n’empêche que, même en difficulté, sa petite passe décisive pour Benedetto fait des frissons tout partout.

Benedetto (4/5) : Magicien de l’alambic, capable de tirer trois points à partir de 50 kilos de patates et d’un sac de sciure.

Aké (87e) : Entré pour inscrire son premier but en profitant de l’anus béant des Toulousains, sans succès.


L’invité zoologique : Antoine Kombousier

Le scarabée bousier, également connu sous le nom de « Sisyphe de la merde », n’a pendant tout se vie active qu’une ambition et une seule : pousser une grosse boule de crotte partout où le hasard le mène. Lorsqu’il trouve un trou assez profond, il l’y fait tomber, puis quitte les lieux et s’en va voir ailleurs s’il ne trouverait pas une autre boule de crotte à faire rouler. Voici ses observations :

– Les autres : Une ambition et un jeu qui ne ressemblent à rien, au point que je suis convaincu que l’expulsion d’un de leurs joueurs ne les a pas pénalisés outre mesure.

– Le classement : Toujours fiers premiers de feu le « classement équitable » des Cahiers du Football.

– Les boutons : As-tu seulement remarqué les boutons qui figurent sous cette académie et qui t’invitent à nous donner respectivement de tes mots et de tes sous. Vois comme ils sont beaux, attrayants et doux au cliquer.

– Les réseaux : ton dromadaire préféré blatère sur Facebook, et sur Twitter. Homerc remporte le concours zoologique, malgré des tentatives de calembour qui feront date.

Non non, celui-ci n’a rien à voir avec le match, rassurez-vous. C’est juste pour le conseil municipal de ce lundi matin. Si des manifestants veulent s’en saisir, je le leur confie volontiers.


Bises massilianales,
Blaah.

3 thoughts on “Toulouse-OM (0-2), La Canebière académie comme chez elle

  1. Sans avoir atteint le niveau Ligue 1, Radonjic donne toute de même le sentiment d’avoir légèrement progressé ces derniers mois.

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