Yougoslavie / URSS (1-0) – La Krasnaiya Akademiya sur la route du boycott

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Split trempé.

Hello les cocos,

Que de bouleversements chez nos amis soviétiques, mes aïeulleux ! On s’était quitté.e.s fin juin sur une bonne branlée à Copenhague face à la hype danoise, qui avait signé la sortie un brin précipitée des Ruskofs de leur bel Euro anniversaire de 2020 (en 2021). Sur le coup, on s’était dit que le bon vieux Stanislav Tchertchessov allait continuer au moins une petite année et demie son mandat à la tête de la Sbornaïa, fort qu’il était de son beau Mondial à la maison d’il y a trois ans et de son début de parcours pas trop dégueu en éliminatoires pour le Mondial du boycott – fort qu’il se trouvait de plus du fait que les candidats ne se bousculaient pas au portillon pour reprendre le bousin.

On s’était donc préparé psychologiquement à une nouvelle plâtrée de mâches plus ou moins digestes sous la direction de l’Ossète, avec toujours le grand Dziouba et le génial Golovine pour nous mettre quelques étoiles et/ou coups de coudes dans les yeux (ouille), avec toujours aussi les petits kinks gérontophiles du Stan pour continuer à nous permettre de rager sur le dos bossu de Iouri Jirkov et l’irrégularité crasse de Fiodor Koudriachov.

Mais que nenni, le fouteballe a horreur de l’immobilisme, surtout en terre marxiste-léniniste, et le Stanoche se faisait effacer des photos officielles dès le début du mois de juillet. La damnatio memoriae à la soviétique – en plus aujourd’hui avec les logiciels de retouche c’est encore plus facile qu’à l’époque. L’histoire ne dit pas si Vladimir lui a demandé de renvoyer sa médaille de l’ordre d’Alexandre Nevski au Kremlin par courrier recommandé ou s’il est allé lui-même l’arracher séance tenante de son torse velu.

Mais qui pour prendre la suite, me direz-vous ? On a parlé de Joachim Lion, le Teuton amateur d’excrétions corporelles, ou encore d’André de la Ville-des-Bois, ancien fidèle compagnon de route au sang bleu (berk) de la Canebière Académie, et habitué des champs de patates et autres lobbies gaziers de la Mère Patrie après ses passages au Zenit et à Chelski. Passées ces possibilités farfelues, on se rabat sur une solution maison : ce sera Valeri Karpine, entraîneur du FK Rostov, qui ne se mouille pas trop puisqu’il n’accepte d’abord qu’un poste à mi-temps, jusqu’à la fin de l’année 2021. On ne lui en voudra pas trop de ne poser qu’une seule fesse sur le siège éjectable. Cependant, après avoir mal débuté sa saison en club, il finit par démissionner pour se consacrer corps et biens à la Sbornaïa. Le nœud coulant se resserre un brin sur la pomme d’Adam du natif de Narva.

[Fait amusant au passage : Valeri fût, en août 1992, le tout premier joueur à marquer pour la jeune sélection de la fédération de Russie, devenue orpheline de sa faucille et de son marteau après les malheureux évènements dont vous avez certainement eu connaissance, pas besoin d’épiloguer.]

Le désormais traditionnel interlude héraldique : Narva, en République socialiste soviétique d’Estonie

 

Quand une équipe change d’entraîneur, elle change de coiffure, comme dit le dicton. Et Valeri, ancien joueur et entraîneur du Spartak comme son prédécesseur, n’a pas dérogé à la règle. Ça renouvelle sec dans l’effectif jusque-là assez immuable de Stanislas, et ça se passe notamment de l’aide du grand Artyom Dziouba, capitaine de la Sbornaïa de son état. Non appelé au premier rassemblement de septembre sous prétexte qu’il ne jouait pas assez en club (voilà qui tranche avec les 6 mois sans jouer de papy Jirkov avant que le Stan ne le sélectionne pour l’Euro comme si de rien n’était), le golem du Zenit a ensuite refusé l’invitation pour les mâches internationaux d’octobre, en arguant ironiquement qu’il ne se trouvait pas assez en forme pour honorer la sélection rouge. C’est peu de dire qu’il y a de l’eau dans le gaz – mais quoi de plus normal dans la Mère Patrie de Gazporn – entre l’ancien capitaine des Rouges et leur nouveau camarade-entraîneur. On ne m’enlèvera cependant pas de l’idée que la fameuse affaire du pénis aérien n’est pas totalement étrangère à ce pataquès.

 

La qualité du détourage n’a d’égale que celle du choix de composition de l’image.

 


LA RENCONTRE


 

C’est donc sans son pivot aussi haut que large (ou presque) que la Sbornaïa attaquait la dernière ligne droite des qualifications pour le Mondial cet automne. Nous l’avions quittée, en mars dernier, en position de première de son groupe, ex-æquo avec ses copains (non) yougos de Dalmatie. Les débuts de Karpoche ont accouché d’un quasi sans-faute, avec notamment un bon nul au stade Lénine contre ces mêmes dissidents croates (0-0), deux bonnes dérouillées administrées aux Chypriotes (2-0, 6-0), trois points logiques contre Malte (2-0), une deuxième victoire chez les Slovènes du bel Ilicic (2-1), et la revanche contre les Slovaques, à Kazan, sur un but contre son camp de Skriniar l’intériste (1-0, bien fait). Dans le même temps, l’unique faux pas des joueurs au damier (un nul 2-2 face à ces mêmes maudits Slovaques), permettait à nos amis soviétiques de pointer seuls en tête, et de se présenter au stade Poljud de Split (à vos souhaits) avec deux points d’avance sur leurs adversaires du jour, pour la fameuse FINALE DE GROUPE ©.

 

Retour aux fondamentaux.

 

Dans ce derby sociogauchisse, les traditions centenaires sont toujours respectées : aux Slaves du Sud la technicité, la maîtrise du ballon, l’élégance dans la passe, les combinaisons chiadées dans un axe du terrain que leurs adversaires ne cherchent même pas à leur disputer ; aux Slaves de l’Est la puissance, les duels remportés, l’explosivité dans les contre-offensives, l’utilisation systématique de la largeur et de la profondeur du terrain pour envelopper l’adversaire et le faire plier sous le nombre. Seulement, si l’opposition de styles est la même qu’il y a 60 ans et plus (souvenez-vous, la première finale du championnat d’Europe des nations, à jamais les premiers), la différence de niveau et d’expérience est de nos jours flagrante. Ajoutez à cela le fait que les Croates ont un besoin impératif de gagner, tandis que les hommes en rouge (mais ici en blanc, berk) se contenteront bien volontiers d’un mâche nul et moche, et vous obtenez une première demi-heure d’attaque-défense du plus bel acabit.

Le jeune goal prépubère et les conditions météorologiques DANTESQUES © se chargent cependant d’annihiler les multiples occasions titistes et de mouiller les sous-vêtements rouges d’autre chose que de trouille, et nos Popofs se risquent même à la contre-attaque, sans beaucoup de succès cependant. L’heure de jeu arrivant, c’est également l’heure du choix pour Valeri Karpine : défendre, ou défendre. Exit donc les ailiers Golovine et Ionov – qui ne brillaient de toute façon pas beaucoup par leur utilité -, place à un milieu à 4 axiaux histoire de mettre toutes les jambes disponibles dans la trajectoire des passes et tirs adverses. La dernière demi-heure voit les Croates jeter à l’inverse leurs dernières forces offensives dans la bataille, et frôler la catastrophe à plusieurs reprises en cherchant inconsciemment à relancer court sur un terrain qui n’est plus très loin de pouvoir être homologué pour leur autre sport national, le waterpolo.

Mais, mais, mais. Nous voilà à la 81e minute. Alors que tout le monde y croit encore et s’arrache sur tous les ballons, le sort s’acharne sur le pauvre Fiodor Koudriachauve : perclus de crampes, le Sibérien dégage en touche, mais voit le ballon vite joué par les Damiers, qui renversent le jeu de l’autre côté avant de centrer et de retrouver Fiodor au second poteau, lequel est surpris par une déviation de la tête et glisse le cuir dans ses propres filets, au ras du poteau de Safonov. 1-0 pour les locaux, désespoir du Soviet-équipe. Les yeux russes, comme Split, sont trempés. Incontinent, Karpine et ses hommes doivent donc repartir au charbon, en bons stakhanovistes qu’ils sont, pour obtenir le droit de boycotter le Mondial de l’esclavage. Ce sera au printemps prochain, et la Sbornaïa recevra ses amis polonais dans un énième Slavico comme on les aime. Chic alors.

 


LE SOVIET TREMPÉ À SPLIT


 

Matveï Safonov (3+/5) : Malgré les trombes d’eau, le jeune Caucasien (22 ans) n’a pas eu les gants qui glissent, occupé qu’il était à les faire chauffer du début à la fin du temps réglementaire. En bon Russe qu’il est, il a pu tirer profit du terrain boueux digne d’une débâcle sibérienne dans lequel se sont enlisées les attaques adverses. Malgré le but encaissé en fin de mâche, et après un dépucelage un peu hardcore lors du dernier Euro, le p’tiot de Krasnodar commence à s’installer pour de bon dans les cages soviétiques. On ne va pas commencer à crier au nouveau Lev Yachine, mais tant que ça repousse le vil et mauvais Guilherme loin loin sur le banc, on prend volontiers.

Viatcheslav Karavaïev (2/5) : On le balade de droite et de gauche, mais le Zénitois demeure égal à lui-même, c’est-à-dire pas particulièrement ouf.

Igor Diveïev (3/5) : Patron de la défense en devenir, le Bachkir du CSKA a régné dans les airs comme un Tupolev. Décidément, y a vraiment que les jeunots pour apporter un brin d’espoir dans ce ramassis de branle-manches.

Gueorgui Djikiya (2/5) : Capitaine suppléant, digne héritier des beaux Géorgiens poilus qui ont fait la grande histoire du fouteballe soviétique.

Fiodor Koudriachov (seum/5) : Voir le nom de Fiodor couché sur une feuille de mâche, c’est toujours l’assurance de ne pas s’ennuyer, d’un côté ou de l’autre du terrain. Une fois encore, ça n’a pas loupé. La Mère Patrie lui dit merci (non).

Alekseï Ionov (1/5) : Pas super topov.

Remplacé à la 56e par Roman Zobnine, plus trop en odeur de sainteté depuis le départ de Tchertchessov, malgré son délicieux patronyme à faire rêver les lecteurices de Horsjeu.net (pfioulala, quel site !).

Dmitri Barinov (1/5) : La grosse flaque d’eau devant la surface de Safonov a réussi trois fois plus d’interceptions que lui.

Daniil Fomine (2/5) : Sans plussov.

Remplacé à la 80e par Danil Glebov, Rostovien d’adoption né et formé à Tomsk en Sibérie occidentale, ville connue pour ses pogroms, ses universités et ses déchets radioactifs.

Aleksandr Golovine (2/5) : Orphelin de son tonton Dziouba, le petit Alexandre a erré un peu mollement sur le terrain, avant d’être sacrifié précocement sur l’autel du 0-0.

Remplacé à la 56e par Dmitri Chistiakov, défenseur central du Zenit de son état, à un moment où l’enjeu était encore de ne pas prendre de but.

 

Allez, un deuxième blase pour la route : celui de Pikaliovo, sympathique bourgade de l’oblast de Leningrad qui a eu le plaisir de voir naître Dmitri.

 

Fiodor Smolov (1/5) : On avait plus trop vu l’attaquant du Lokomotiv en sélection depuis le début du dernier Mondial, lors duquel il s’était fait piquer la place de titulaire par Dziouba. Si on avait oublié pourquoi, voilà un bon rappel.

Remplacé à la 56e par Anton Zabolotny, fils de bidasse né en caserne en Lettonie, et forcément joueur du CSKA, du coup.

Zelimkhan Bakaïev (2/5) : Ingouche spartakiste, le quota de minorités ethno-religieuses.

Remplacé à la 78e par Andreï Mostovoï, aucun lien avec Aleksandr.

 

Au printemps prochain pour la suite du chemin de croix soviétique,

La bise trotskanale,

Georges Trottais

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