DESPERATE PSG : Episode 6

«Un récit raconté par un idiot, plein de bruit et de fureur, et qui ne signifie rien »
extrait du célèbre  « Lady Macbeth et Lady Macdo sont dans un bateau » de William Saurin Shakespeare

Previously in Desperate PSG…

Si vous avez raté les cinq  premiers épisodes – mais on n’ose le croire-, c’est ici, , là-bas, au-delà, et même plus loin encore, comme un Saint Bol de Sainte Trinité s’ils étaient cinq à la décomposer.

 

Episode 6 : Et enfin la défaite vint  

Nancy – PSG : H-4

Avachi et comme fataliste, c’est un homme profondément seul qui contemple le mur d’en face de sa table de travail, prestigieusement garni de portraits de glorieux anciens entraîneurs du PSG. Portraits criblés de fléchettes et qui arborent fièrement l’inscription « Au suivant ! » au dessus des têtes de Bergeroo, Lacombe, Coach Vahid, Fournier ou encore Jane Birkin à moins que ce ne soit l’inimaginaux David Douillet, mais à cette distance, on ne voit pas très bien. Ou bien alors c’est Luis ? Faut dire que leurs niveaux  respectifs de maîtrise de la langue française ne permettent pas de les distinguer avec certitude sur la photo. Quoiqu’il en soit, cet homme est, dans l’ordre, avachi, fataliste et seul.

Car il sait qu’il a failli à sa noble mission de journaliste. Il a promis mais n’a pu honorer sa promesse, sans même avoir l’excuse d’être un homme politique. Toujours pas de vraie crise au PSG alors que nous sommes quasiment à la fin du mois de novembre : c’est trop tendre et il sait que sa carrière peut un sacré coup en prendre. Car la sanction sera cruelle.

Il tripote nerveusement le dernier rapport sur les chiffres de vente en baisse de l’Equipe en attendant le coup de fil assassin qu’il sait inéluctable. Il jette un dernier regard attendri sur la photo encadrée de sa femme et de ses enfants. Soudain et avec une vivacité surprenante pour un appareil de son envergure, le téléphone sonne en hurlant comme un vulgaire Christian Jean-Pierre. Interdit, Jérôme Touboul fixe le téléphone avec effroi. Il sort d’un tiroir de son bureau une fiole étiquetée « urgences » et avale une grande rasade de whisky bon marché.

–   Euh…allo, euh bonjour, Jérôme Touboul à l’appa…

–   Où est ma crise, Jérôme ? Où est ma putain de crise Jérôme ? Tu me dois une crise de novembre et j’en vois pas la couleur.

–   Euh oui non mais attendez non… Marie-Odile, euh enfin je veux dire Mme Amaury, enfin euh votre excellence, votre majes…

–   Tu crois que dans ce milieu on se fait respecter en acceptant des excuses ?! Tu crois que je me suis fait une réputation en laissant des petits cons comme toi ne pas payer leur dettes, espèce de scumbag, comme on dit en vieux français ?

–   Je promets…je vous livre votre crise, laissez-moi juste un peu plus de temps…

–   Des promesses…Je dirige le groupe Amaury, connard, pas la Croix rouge ou la FFF, hein…T’as promis novembre, on est fin novembre et ‘y a pas de crise majeure.

–   Je vous promets que vous aurez votre crise sous quinzaine…je vous en supplie, j’ai une famille et des enfants ! Deux semaines, c’est tout ce que je demande. J’ai mes meilleurs gars sur le coup. Il y a même Duluc qu’il est prêt à faire un article sur la marche de l’histoire du PSG qui s’avance comme un machin inéluctable au soir de l’aube d’un bidule nouveau à la lumière d’un truc éternel qui recommence…  Vous allez voir, le PSG va perdre contre Nancy et ce sera le début de la fin. Et même s’ils gagnent, c’est pas grave, j’ai tout prévu, j’ai un plan B.

Silence métallique à l’autre bout du fil. Touboul retient et son souffle et sa vessie, en attente du jugement dernier. Que dira-t-il à ses enfants ? Aura-t-il seulement le temps de leur parler une dernière fois ? Alors qu’il est tout absorbé par son effroi, la voix froide de sa patronne fouette ses oreilles comme si elles étaient un esclave dhorassiano-capitaliste en pleine révolte marxiste :

–   Tu as 15 jours de plus pour me filer une bonne crise du PSG. Pour compenser, je veux en plus la tête de Kombouaré avant Noël. Ce sera mon cadeau à Leonardo. Sinon…

–   Bien sûr votre excellence Amaury, ce serait fait. Vous pouvez compter sur moi. Que la force euh, soit avec vous.

Aussitôt après avoir raccroché, Touboul fête son soulagement absolu avec une grande rasade de whisky et un énorme rot, rot qui malheureusement casse la vitre derrière lui en franchissant le mur du son. Presque suffocant, il compose fébrilement le numéro de son lieutenant, Damien Degorre :

–   Ecoute mon gars, on s’en sort bien, on pourrait être mort à l’heure qu’il est. D’abord, fais tout ce que tu peux pour foutre la merde au vestiaire avant le Nancy-PSG. Faut une défaite !

–   C’est dans 3h le match, qu’est-ce que tu veux que je fasse ??

–   M’en fous, tu te démerdes. Si tu peux rien faire, chope n’importe quel joueur après le match et fais-lui dire d’une façon ou d’une autre que c’est la crise au PSG, ok ? Je m’en fous comment tu t’y prends mais demain je veux publier l’info comme quoi c’est la merde en interne au PSG à cause de Kombouaré. Qu’ils gagnent ou pas, la crise n’est possible que si on vire l’entraîneur, alors c’est ça ton angle d’attaque, compris ?

–   Ok, ok, je te rappelle.

Quelques heures plus tard

Le PSG a enfin perdu et en plus contre Nancy. Complètement en sueur, la bave et un cigare aux lèvres, Jérôme Touboul danse sur son bureau en nu intégral pour fêter ça.

Pendant ce temps, Damien Degorre parvient à obtenir une interview d’après match exclusive de Christophe Jallet dans l’espoir de lui faire avouer des tensions internes avec Kombouaré.

–   Bonjour Christophe, ça fait mal cette défaite contre Nancy, hein ?

–   Oui, c’est sûr c’est frustrant mais on a fait notre maximum.

–   Vous pensez pas que ça risque de laisser des traces, surtout pour votre entraîneur, Kombouaré, très contesté ces derniers temps ?

–   Ben je vois pas pourquoi, on est premiers du championnat, tout va bien…

–   Oui mais là avec cette défaite contre Nancy, la question se pose : Kombouaré est-il l’homme de la situation ?

–   La question ne se pose pas. On est premiers, tout va bien.

–   Oui mais, Kombouaré ne fait pas l’unanimité au sein du vestiaire ?

–   Si, on est tous contents.

–   Ce soir contre Nancy, c’est un peu du mauvais coaching, non ?

–   Non, c’est nous les joueurs qu’on est sur le terrain.

–   Oui mais c’est le début de la crise un peu quand même là non ?

–   Non.

–   Un peu quand même, non ? Avec cette défaite ?

–   Non, pas du tout, on a fait une grosse série avant.

–   Sûr… ?

–   Sûr.

–   Qu’est-ce qu’on fait si le PSG perd son prochain match à Marseille ?

–   On se remettra à travailler et on prendra les matchs les uns après les autres parce qu’on est comme qui dirait des compétiteurs.

–   Non mais Christophe, tu sais…je peux m’assurer qu’on te mette une bonne note dans l’Equipe pour le prochain match, hein…je te mets 9/10 contre Marseille, pas de souci…donc pas de crise au PSG ?

–   Non.

–   Sinon je peux aussi écrire comment tu t’es fait une prostituée mineure…

–   Toujours pas.

–   Attends mais là perdre contre Nancy, le vestiaire est en train de lâcher Kombouaré ?

–   Pas vraiment, non. C’est plutôt l’union sacrée au PSG maintenant.

–   Je t’en supplie j’ai une famille à nourrir, dis-moi que c’est la crise !

–   Au contraire, je crois que bon, c’est l’union sacrée.

Légèrement déprimé après cet entretien, Damien Degorre rentre au bureau d’un pas complètement quelconque et qui ne mérite pas que l’on en parle spécialement ici. Sur le chemin du retour, anticipant avec angoisse la réaction de Jérôme Touboul à son entretien raté, il se dit qu’un verre lui ferait du bien et décide de s’arrêter au bistrot du coin, à 50 mètres des locaux de l’Equipe, au fameux bar-tabac « Au tout ira mieux ». Alors qu’il s’apprête à commander au comptoir un double whisky, il s’aperçoit que la totalité de la rédaction est déjà en pleine réunion à la table du fond. Avant même qu’il ait le temps de se dire « et merde… », Jérôme Touboul l’apostrophe en levant son 17e verre devant tout le monde :

–   Alors Damien, viens ici nous raconter ton interview qui va lancer notre campagne de crise parisienne!

De vives acclamations accompagnent l’affirmation de Touboul comme autant de signes de triomphe inéluctable, sans le moindre égard pour la situation économique des classes moyennes grecques, dont on se demande vraiment ce qu’elles viennent foutre là à ce stade du récit.

Piteux, Damien Degorre avale son whisky d’une traite, rote puissamment avant de lancer, les yeux baissés comme on baisserait le rideau sur une mauvaise blague :

–  J’ai rien. Que dalle. Tout va bien au PSG.

Après un instant de stupeur commune, Touboul lance furieux :

–   Purée de punaise, comment ça t’as rien ?? Ils ont perdu !

–   J’ai eu Jallet – oui ben, je fais ce que je peux – et il m’a ressassé le truc de l’union sacrée. Rien à faire.

–   Et rien d’autre ?

–   Que dalle…

–   Purée de punaise, Damien…bon mais on se démerdera avec ce qu’on a : « union sacrée ».

Le lendemain matin, l’Equipe titre à sa une : « Selon Jallet, le PSG de Kombouaré c’est l’Union soviétique. »

Quelques jours plus tard, au domicile parisien d’Antoine Kombouaré, 47 impasse de la Sérénité, Paris

Après avoir petit déjeuné une délicieuse viande d’aligator accompagnée d’un yaourt bulgare, Antoine Kombouaré prend un instant pour fixer l’horizon par sa fenêtre. A l’horizon, rien de nouveau. Du coup, lèvres serrées, il chantonne doucement :

« Mais je jure que d’entendre ces journaleux d’mes fesses
Ces Leo couverts d’allégresse et ces qataris aux dollars d’ivresse
C’est des coups à vous faire des titulaires impuissants
Au suivant, au suivant »

Puis il prend ses affaires et se met en chemin vers le Camp des Loges où l’attendent de sacrées surprises…

Vous aussi, vous voulez connaître la suite ? Alors courez tout de suite dans le kiosque le plus pro…ah ben non.  Cliquez, partagez, likez et puis aimez-vous les uns les autres et alors il y aura un 7e épisode. Sinon, c’est 7 ans de malheur à devoir regarder en boucle les matchs les plus chiants de l’ère Domenech entrecoupés d’une biographie de Pascal Obispo.

7 thoughts on “Desperate PSG: Episode 6. Enfin la défaite

  1. Barnabé, à chaque nouvel article, tu me surprends encore un peu plus !

    Quel talent ! On en redemande !

  2. « Soudain et avec une vivacité surprenante pour un appareil de son envergure, le téléphone sonne… »
    Très bon.

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