Boul sentimental

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Avec soif d’idéal, attiré par les étoiles, les voiles, que des choses pas commerciales

Et la danse des connards, tu sais faire ?

Quel spectacle. Quel magnifique spectacle auquel nous avons assisté en début de semaine. A peine remis des nombreux événements du week-end que lundi soir nous offrait un sans-faute de mauvais goût dans le fond, la forme, les animations, les résultats, le tout dans une soirée interminable.

Début décembre, la cérémonie du ballon d’or. Je ne fais pas les présentations, tout le monde sait ce que c’est. Je ne reviens pas sur le résultat ridicule comme il l’est une année sur deux, vainqueur et classements des suivants compris. Ce n’est pas une nouveauté évidemment, je vous vois me qualifier de naïf. Sur les dernières années, Buffon, Sneijder, Ribéry, Varane, Neuer, Iniesta, Xavi auraient dû l’avoir. Le système de vote a  eu beau changer, c’est visiblement le lot commun de ce trophée qui a au moins le mérite d’avoir un système plus transparent que les autres. J’imagine que les jurés des autres prix doivent faire cela sur un coin de nappe en se disant « je te parie que je vais passer ce tocard et personne ne va sourciller ». Passons.

Passons également sur ce qu’est devenu la forme de cette cérémonie : mi NRJ music awards, mi victoire de la musique, mi loto de fin d’année du Creusot, loin très loin d’une cérémonie des César. Animée par un vieux beau, ambiancée par la fine fleur de l’érudition musicale française, récompensant avec une lourdeur affichée des joueurs que l’on met sur un pied d’égalité avec des Nobel. En rien, cette cérémonie a été un moment agréable à suivre, tout le monde avait peur de la séquence qui allait suivre en se demandant bien ce qui pourrait advenir de pire.

Et bien reconnaissons aux organisateurs une certaine science du frisson en proposant en fil rouge ce qui se fait de pire en DJ ringard depuis Ariel Wizman : Martin Solveig. De programmation hasardeuse en sorties gênantes, c’est une prestation d’un fort beau gabarit à laquelle il nous a été obligé d’assister. Avec ce point d’orgue, ce zénith de beauferie assumée sans la moindre nuance d’humour, de connivence, d’ironie voire même de pénitence annoncée : « Et vous twerkez ? » lancé négligemment comme si la réponse qui allait venir pouvait être digne d’intérêt.

Imaginons les dialogues fictifs entre lui et une personne normale qui normalement auraient dû agiter les synapses de ce cerveau étroit.

Scénario 1 « Non » :

MS : Et vous twerkez ?
AH : Non pas du tout, mais j’aimerais beaucoup apprendre.
MS : On sent tout de suite en vous une curiosité pour les beaux mouvements du corps.
AH : Absolument et j’aimerais profiter de ma robe de soirée en mettant le ballon d’or entre mes jambes et twerker au-dessus en mondovision pour montrer enfin ce que vous attendez tous, montrer mon cul que les blaireaux comme toi imaginent en s’endormant après m’avoir vue en short.
MS : Euh.

Scénario invalidé.

Scénario 2 « Oui » :

MS : Et vous twerkez ?
AH : Oui absolument, on twerke souvent ensemble avec les filles dans les vestiaires après les matchs. Vous voulez que je vous montre ?
MS : Oui avec plaisir puisque vous le proposez. Je peux vous tenir votre boul d’or si vous voyez ce que je veux dire ?
AH : ahahah ce double sens… vous êtes très drôle.
MS : et hop musique madame !

Scénario invalidé.

Scénario 3 « fuck » :
MS : Et vous twerkez ?
AH : Fuck you bastard.

Scénario probable en tête à tête.

Scénario 4 « Mépris et dignité » :
MS : Et vous twerkez ?
AH : Non. Au revoir.

Scénario validé.

Au grand dam des brillants penseurs de notre époque, preuve en est qu’il n’y avait pas d’autres conclusions possibles à cette question débile. Le plus affligeant reste que Solveig n’a pas été capable d’anticiper deux secondes ces possibilités niveau brevet pas plus, je vous laisse en tirer les conclusions qui s’imposent.

Les excuses n’en feront rien, les arrangements du lendemain n’y feront rien, nous avons assisté à un grand moment de vulgarité sexiste, qui n’est pas sans rappeler d’autres sorties médiatiques remarquables comme l’inénarrable Denis Balbir qui enchaîne sexisme et homophobie depuis quelques mois sans craindre une vraie, une belle, une méritée suspension d’antenne à vie et une exclusion du territoire terrestre. Solveig s’en sort avec un sourire entendu, des regards interrogateurs, des producteurs dubitatifs, un public hagard et des spectateurs qui sont entre l’étonnement, le rire et le dégoût. Une belle manière d’inaugurer le premier ballon d’or féminin de l’histoire, symbole avant tout des esprits rétrogrades qui ont voix au chapitre dans ce sport et ailleurs.

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