Psychanalité du footballeur : Loïc Perrin

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Un geste incompréhensible ? Pas pour tout le monde.

Bonjour, prenez un siège. Un cigare ?

Pour être tout à fait franc avec vous, j’étais il y a peu de temps encore en villégiature dans un ravissant hôtel de mes Alpes chéries, afin de mettre la dernière main à mon projet d’ouvrage sur la mère de Michel Onfray. Mais quand la rédaction m’a rappelé pour ce projet de rubrique, je n’ai pas refusé un seul instant. Ne serait-ce qu’effleurer le quotidien des énergumènes qui fréquentent ce site, c’est un rêve pour tout psychanaliste qui se respecte.

Et donc, je vous invite à examiner ensemble ce premier cas qui nous est soumis, en l’espèce le tacle de Loïc Perrin sur Kylian Mbappé en finale de coupe de France.

Rappelez-vous ce geste, dont mes estimés camarades ont aussi fait l’exégèse ici et :

Du point de vue du praticien, la question se pose ainsi : que s’est-il passé dans la tête de  un homme exemplaire, à la longue carrière jalonnée d’une discipline irréprochable, pour ainsi saboter son tout dernier match ?

Même des ignares tels que vous, sans vouloir vous offenser, ne peuvent que relever l’évident conflit œdipien qui s’est joué sur cette action.  Loïc Perrin est considéré comme un sage, lui-même constate ses tempes grisonnantes chaque matin dans la glace. Et il y a Kylian Mbappé, le prodige, plein d’énergie et d’arrogance, à la peau lisse et aux muscles explosifs. Le père, le fils.

Un père aime son fils, et d’ailleurs tout le monde aime le jeune Kylian Mbappé. Mais soudain, le jeune effronté démarre à toute vitesse, et tout se bouscule dans le cerveau de Loïc Perrin. Plus le temps de mobiliser le cortex préfrontal, c’est tout le système limbique qui s’affole et envoie ce message : « défonce-moi ce petit con ».

« Défonce-moi ce petit con » , bien sûr, il y a deux niveaux de lecture : défoncer ce petit empaffé, bien sûr, mais aussi « con », du latin « cunnus ». Je ne pense pas qu’il ait besoin de vous faire un dessin.

A toutes fins utiles, je vous ai quand même fait un dessin, tout compte fait.


Est-ce que Loïc Perrin pense ainsi à sa mère, lorsque son subconscient lui intime « défonce-moi ce petit con ? ».  Imaginez ainsi le jeu de tensions inextricable dans lequel est empêtré le joueur et dont il doit se défaire en un dixième de seconde ! Père/fils, mari/femme, fils/mère… c’est insoutenable. Comment résoudre cette tension ? Par le moyen le plus apte à répondre à ces pulsions multiples : en arrachant la jambe de l’attaquant.

C’est insensé, dites-vous ? Nenni, car ce serait oublier un élément du trio œdipien : la femme – maîtresse ou mère, ou les deux à la fois – incarnée ici évidemment par l’arbitre.  L’agression prend tout son sens : « regarde chérie (ou maman, ou les deux à la fois), j’ai anéanti cet être qui s’immisçait entre nous, puis-je accéder à ta vulve maintenant ? ». Scène muette et inconsciente, bien sûr, aucun homme sain d’esprit ne prononcerait ces mots devant Amaury Delerue. Mais même sous-jacent, ce message n’en reste pas moins signifiant. Dualité d’esprit qui voit le coupable faire face à l’arbitre/la femme animé d’un désir contradictoire : être récompensé par une relation sexuelle, mais aussi être puni. Cette contradiction est très fréquente dans notre civilisation judéo-chrétienne : pourtant tout à fait naturel, le désir sexuel pour sa mère ou pour un arbitre est en même temps hautement répréhensible.

« Tu veux mon sifflet ? », cette évidente métaphore oro-génitale maternelle.


C’est d’ailleurs un geste pervers qu’accomplit alors l’homme au sifflet, en ne sanctionnant l’attentat que d’un carton jaune : « oui je t’ai vu détruire notre fils, je te punis mais sans te signifier clairement que c’est mal, ni ôter mes sous-vêtements en signe de soumission à ton désir ». Si l’affaire en était restée là, on aurait pu parier sans risque que l’après-carrière de Loïc Perrin en eût été ruinée, ces tensions restant en suspens sans plus jamais pouvoir être résolues autrement que par les drogues dures. Heureusement, et c’est là un point très marquant de notre époque, ces tensions sexuelles sont indissociables de l’Ecran. Occire un attaquant ou faire l’amour avec sa mère, oui mais à condition que cela soit filmé, c’est la loi de notre siècle. C’est tout naturellement que la séance vidéo livre ses résultats – avec un peu de retard suite sans doute à une bien compréhensible masturbation des assistants dans le car-régie : carton rouge, la tension est résolue, la coupe de France est fichue mais l’après-carrière de Loïc Perrin est sauvée.

Voilà, je pense que nous avons dit tout ce qu’il était possible d’analyser à propos du cas de Loïc Perrin. N’hésitez pas à me soumettre tout autre cas que vous trouveriez intéressant, je me ferai un plaisir de vous en livrer les clés psychanalytiques.

Ca fera 200 schillings. Mes amitiés à votre maman,

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