Metz – Lorient (2-1) : La Metz Que Un Club Académie donne son deuxième cours

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05h00. Rémi Valls se réveilla d’un bond. Il avait peaufiné son plan depuis une semaine. Il commença par aller se doucher avant de s’habiller proprement avec une jolie chemise blanche toute neuve et fraîchement repassée. Puis il se rendit au primeur du coin afin d’y acheter la plus belle pomme qu’il pouvait y trouver avant de se rendre en avance dans l’amphithéâtre Carlo MOLINARI. Il voulait déposer la pomme sur le bureau du professeur Legrasaully avant que celui-ci n’arrive.

07h00. Rémi était le premier assis dans les gradins. Son but ? Se faire pardonner et réintégrer le cours. Il fondait tous ses espoirs sur cette pomme, symbole de sa détermination.

07h45. Autour de lui, l’amphithéâtre se remplissait peu à peu. Il y avait plus d’élèves que la première fois. La réputation du professeur Legrasaully s’était répandu sur tout le campus. Tous voulait assister à son cours.

07h59. Rémi se voulait confiant. En lui, en son plan, en sa pomme… Il était bien… Il était bien… Il était…

08h00. Le professeur Legrasaully entra dans l’amphithéâtre. Les cheveux noirs. Une barbe de plusieurs semaines. Des yeux très sombres qui vous transperçaient lorsqu’ils se posaient sur vous. Une aura de puissance semblait accompagner chacun de ses mouvements. Un charisme presque animal. Il dégageait un sentiment complexe de pouvoir et de savoir.

08h01. Le professeur posa son sac sur le bureau et remarqua la belle pomme rouge qui trônait en plein milieu. Levant les yeux, il repéra Rémi Valls… et son sourire entendu…

08h02. Un énorme bruit de pomme qui s’écrase sur un visage trop naïf se fit entendre dans tout l’amphithéâtre.

08h37. On entendit derrière le bâtiment le bruit du claquement des portes de l’ambulance qui emmenait Rémi à l’hôpital.

08h38. Le cours du professeur Legrasaully commença.


« Bonjour à tous… Pour cette deuxième séance, j’ai décidé de vous expliquer une règle essentielle, à savoir que dans le Football : le passé chasse constamment le futur. C’est en effet après de longues années de recherche que j’ai découvert cette loi, apparaissant telle une évidence. Cette sentence s’avérera d’autant plus vrai au regard de l’histoire du Football Club de Metz. Mais j’y reviendrais plus tard. Là, je voudrais que vous intégriez une notion pointue et précise… »

Les élèves étaient tous entièrement captivés.

« … Parce que l’on a beau croire que notre destin est unique, sans équivoque possible – tel le bourgeon d’une fleur magnifique dont seule l’éclosion nous révélera enfin ses véritables couleurs. Et bien : il n’en est rien du tout ! Le futur n’est pas une fleur ! Prenez d’ailleurs la déclaration qui va suivre pour argent comptant… Oui, là, vous pouvez noter ce que je vous dis… »

Mouvement unanime de l’ensemble des élèves, baissant tous la tête comme d’un seul homme, stylo à la main, prêt à écrire la parole d’évangile selon Legrasaully

« Le futur… mon futur… et VOTRE futur aussi : c’est une crotte de bique ! »

Mouvement unanime de l’ensemble des élèves, relevant tous la tête comme d’un seul homme, stylo toujours à la main, avec un drôle de regard désabusé sur le visage…

« Il faut y voir un symbole bien sûr… Au fond, l’utilité de cette image réside dans le fait de vous offrir un accès plus facile à la vue d’esprit que j’essaye précisément d’inséminer dans votre conscience. Alors on se dépêche de l’écrire… Allez… Mais oui, parfaitement ! Une… crotte… de… bique…. Notez-le. Voi…là ! »

Ce lundi, sur les notes de cours d’absolument tous les étudiants de l’amphithéâtre Carlo MOLINARI, on pouvait lire : « crotte de bique ».

« C’est comme ça. On n’y peut rien. Et Dieu sait que j’ai essayé de démontrer le contraire au cours de mes trente années dans la recherche. Mais peu importe l’angle que j’ai essayé d’adopter, c’était à chaque fois en vain ! La conclusion restait invariablement toujours la même ! Cette théorie se vérifiant pour vous, pour moi, pour la totalité des êtres humains de cette planète, mais aussi pour le FC Metz… Surtout pour le FC Metz… Tellement pour le FC Metz d’ailleurs, que j’ai décidé d’intituler ce cours… »


Bug cérébral de tous les élèves. K.O technique généralisé de l’amphitéâtre. Reboot impossible. Ils étaient là, les étudiants, la bouche ouverte, les regards vides fixés sur l’écran. Incapable de bouger ni de se réveiller du choc qui venait de les ébranler. Seul, le professeur Legrasaully, indifférent au sort de ses étudiants, continua de développer son cours :

« L’histoire qui nous intéresse commence le 11 Septembre 1932, à une époque où le FC Metz ne s’appelle alors « FC Metz » que depuis le mois d’avril de cette année : date d’acquisition de son statut professionnel. Les hommes de l’Est entrent sur le terrain. Ils sont musclés, mais pas saillant. Larges d’épaules, mais pas dessinés. Beau, mais pas sexy. Ce sont des hommes comme on en fait plus. Avec une forêt vierge entre les jambes et des dessous de bras virils ! Que du 100% vrai mec en somme ! Pas comme 95% de baltringues soi-disant « métrosexuels » de ce cours ! Sérieusement… regardez-vous. Et maintenant : regardez-les ! »


« Mais ce que ne savait pas ces « vrais » hommes, c’est que leur premier match allait lancer le début d’une révolution. Un véritable coup de poing dans les entrailles du foot français avec la création d’un monstre à la longévité légendaire ! Un titan qui restera encore aujourd’hui comme l’un des plus vieux pensionnaires de Ligue 1 avec 60 saisons à son actif ! Une explosion grenat qui étalera sa classe à travers les âges et les pelouses de France. »

Le professeur fit une pause dramatique, attendant des applaudissements. Mais devant le silence, il préféra continuer tranquillement :

« C’est en effet au cours de ce match, le 11 Septembre 1932, que se dessinera le destin des joueurs du Nord-Est, héritiers des hommes de la mine, grands fils du charbon et possesseurs de la célèbre recette de la quiche Lorraine. Un match épique, au résultat pourtant tellement dramatique… Car, pour le premier match professionnel de sa carrière, le FC Metz commença par une défaite »

Le professeur prit une grande respiration :

« Une défaite contre Rennes en plus ! … Rennes quoi ! Merde les gars ! … Tout sauf Rennes enfin ! … On peut perdre, oui, mais pas contre ces rouqmoutes de bretons quoi… 1-2, EN PLUS ! Merde, de merde… de MEEEEEERDE ! »

Le professeur tenta de retrouver le contrôle de ses émotions. Il sentait qu’il avait de plus en plus de mal à se canaliser… Cela se ressentait dans ses cours. Et surtout, il savait que la cause, c’était cette maladie qui le rongeait petit à petit… Lui-même ne l’avait appris qu’il y a très peu de temps… Mais ses étudiants ne devaient rien savoir… Personne d’autre ne savait d’ailleurs. Il profita d’ailleurs de l’état de confusion de ses élèves face à sa dernière envolée pour discrètement avaler la pilule vert opale qu’il gardait dans la petite poche intérieure de sa veste… Il sortit ensuite une bouteille d’eau de son sac et s’en offrit une gorgée. Il fallait continuer… Enchaîner… Ne rien lâcher… Il avait encore tellement à leur apprendre…

« Et voilà que, presque 97 ans plus tard, des Bretons, à nouveaux, vennaient défier nos guerriers grenat, sur nos terres. Ils n’étaient pas rennais ceux-là… Ces fantassins n’arboraient pas le rouge et le noir comme autrefois, non… Ces barbares-ci, venus du Morbihan dans l’espoir de nous vaincre, étaient des membres du clan ayant pour emblème un terrible… et effrayant… poisson. »


« Hahaha ! Un merlu ! Hahaha ! Comment je suis trop un bâtard, sérieux ! Hahaha ! »

Après une sévère quinte de toux, le professeur reprit :

« … Hmm… Excusez-moi… Arborant donc un « habitant de la mer » comme emblème… Ces terribles chevaliers de l’Ouest venaient pour mettre à terre tous nos hommes, de même que notre emblème : le « Graoully » ! Un dragon géant, effrayant et mythologique ! … Un combat acharné allait donc s’engager entre ce fantastique dinosaure des temps anciens et un alevin dont le nom latin est… « Merluccius merluccius »… Hahaha ! Mais quel bâtard, hahaha ! »

Nouvelle quinte de toux plus tard :

« Ainsi… si la bataille entre les deux clubs n’était qu’idéologique, j’ai envie de dire que, normalement, on la gagne sans trembler des testicules, non ? Mais en Ligue 2, le combat intellectuel n’est pas tout, loin s’en faut… Alors, même si prudent il faut rester… je ne résiste pas à vous offrir la délicieuse description du « merlu » selon Wikipedia :



« Hahahaha ! J’arrête là, je fais trop le bâtard… »

Dans l’amphithéâtre, les rires rauques et gutturaux du professeur Legrasaully résonnait avec force…

« Quel fut donc le résultat de cette bataille ? Je pense que vous l’avez deviné. Nos valeureux héros grenat ont brillamment vaincu nos adversaires ! Déjà défensivement, grâce à une Maman Sunzu des grands jours qui a vraiment brillé sur le terrain, même sans son comparse John Boye. Et même si pour moi, ce sont vraiment les efforts défensifs de tout le groupe qui ont payé, j’ai envie d’accorder une autre mention spéciale à Ivan Balliù. Ce dernier nous a enfin accouché de son premier match propre de la saison. Bravo à toi. »

Legrasaully sentit que son fameux ton « professorale » revenait doucement. Il savait qu’il devait retrouver un peu de sérieux… Malheureusement, il avait oublié sa prochaine diapositive…

« Ça c’est pour la défense. Mais le plus gros problème fut, selon moi, l’arbitre de ce match qui passa les 90 minutes à jouer un numéro d’ours bigleux. Oui… C’est ainsi qu’il oscilla entre les largesses incompréhensibles devant les lorientais et leurs tacles assassins, et une sévérité anti-messine à la limite du supportable. Curieux de découvrir la raison de cette schizophrénie arbitrale, je suis allé voir son profil Linkedin… Et c’est en regardant sa photo de profil que j’ai réussi à comprendre et cerner un peu mieux le personnage… Voyez par vous-même… »













(Vous n’êtes pas prêt…)
















(Sérieusement… Je sais ce qui va suivre, et je sais que vous n’êtes pas prêt…)

















(Attention…)


















« MOUHAHAHAHA !! WOAH LE MONTAGE POURRI !! HAHAHAHA !! UN… BATARD… JE SUIS… TROP… UN BATARD !! »



« Haha… Excusez-moi, je ne sais pas ce qui m’a pris… Vous savez, c’est long d’écrire ces cours… Alors, parfois, on disjoncte, on disjoncte sec… Revenons donc à « OursMan »… alors que ce dernier aurait déjà dû normalement sortir plusieurs cartons contre Lorient, voilà que soudainement il claque un rouge à notre cher Opa Nguette ! Et que ce soit du terrain, ou en replay chez moi, je vous jure que je me demande encore comment on peut mettre rouge sur cette action… Je considère cette exclusion comme un véritable « kidnapping » ! J’insiste sur ce mot, retenez-le : vous comprendrez plus tard. »

« Et en soi, le match a été vraiment satisfaisant. D’un point de vue du jeu, on a joué technique, changeant les ailes, alternant les petites et les longues passes, sans trop abuser des exploits individuels de Boulaya ou Delaine. Un match où on se dit que l’équipe est franchement taillée pour la Ligue 1 ».

« A ce moment, vous devez vous demandez la raison qui m’a poussé à vous énoncer cette fameuse règle : Ce fameux passé chassant le futur. Le 11 Septembre 1932, le FC Metz old school va donc disputer son premier match pro en affrontant l’équipe de Rennes. Le match, se déroulant à Saint Symphorien, démarre bien. Un premier but à la première mi-temps pour notre équipe… Cela vous rappelle quelque chose ?

Le professeur Legrasaully posa quelques secondes afin de poser un effet…

A la seconde mi-temps, le FC Metz old school perdra ce match 1-2. Et dans, ma tête, il y a beaucoup de « coïncidences » qui trouble mon esprit entre le match de 1932 et celui de 2019. A commencer par nos adversaires, ces fameux bretons, ensuite le score miroir (1-2, 2-1), puis le fait que ce match se joue presque cent ans après le premier… J’ai commencé ainsi à développer quelques suspicions, et pourtant je me considère comme un homme très sceptique. Alors, pour être sûr, et cohérent avec moi-même, j’ai démarré des recherches poussées. Je me suis documenté, encore et encore, sur les faits de jeu de ces deux matchs… Et j’ai découvert l’histoire de Bubi Sold


« Cet homme, WILHELM ‘BUBI’ SOLD est né à Saarbruck en 1911. Très vite, son talent au milieu en fait une petite vedette en Allemagne. En 1932, il signe avec le FC Metz. Il figurera d’ailleurs sur la feuille de ce fameux match contre Rennes ! Mais Bubi ne jouera jamais ce match ! D’ailleurs, le mystère ira jusqu’à sa « disparition » purement, et simplement de Metz… En effet, la nuit précédente, Sold a fait sa valise et a disparu à jamais, vraisemblablement kidnappé(histoire véridique) »

Long silence dans l’amphithéâtre.

« C’est ainsi qu’a commencé le premier match officiel pro de notre club. Par un… kidnapping. Face à des Bretons… Avec le FC Metz qui marque le premier but… Et qui perd son premier match… 1-2… La suite, on la connaît… Les coupes Gambardella… Le titre de champion de France loupé de si peu… Nos meilleurs joueurs qui s’envolent… D’autres qui font encore la fierté et l’histoire de ce club… La descente en National… Les derbys gagnésCeux perdus… On ne peut s’empêcher de dire : Et si… Et si on avait gagné ce match… hein ? Que ce serait-il passé ? Dans quel timeline sommes nous ? La mauvaise ? Et si paradoxalement, c’était celle-ci la bonne ? … Alors ? … »

Les étudiants étaient fascinés, retenant leur souffle, ils attendaient la conclusion…

« Et voilà qu’aujourd’hui, presque cent ans plus tard… L’histoire se répète à Saint Symphorien… A nouveau contre des Bretons… A nouveau le FC Metz qui marque en premier… à la première mi-temps… Et qui voit « disparaître » un de ses milieux… C’est plongé dans mes réflexions, à ce moment précis, qu’une légère appréhension s’est emparée de moi. Score final, il y a cent ans, 1-2. 2-1 aujourd’hui… Le passé chasse toujours le futur. Je connaissais cette loi… Et à présent vous aussi… Maintenant écoutez moi bien… »

La concentration dans la salle était totale… Chaque fibre dans amphithéâtre semblait être polarisé vers le professeur Legrasaully

« Je vous ai parlé du symbolisme. Rappelez-vous ce que je vous ai dit… Je vous avais dit que si, au fond, j’utilisais ce symbolisme, ce n’était pas par hasard… L’utilisation de symbole ou image avait pour but de vous offrir un accès plus facile à ma fameuse vue d’esprit, celle que j’essaye précisément d’inséminer dans votre conscience… Cela vous revient-il ? »

A nouveau ce long silence qui devenait de plus en pesant à mesure que la touche finale se rapprochait…

Je vous ai parlé du passé. Du futur. Et ensuite, je vous ai parlé du présent. Et j’ai évoqué avec vous cette fameuse loi, universelle, issue de plus de trente ans de recherches avancées et qui m’a permis de me tenir aujourd’hui devant vous… Passé, présent… Le passé qui chasse le futur… C’est pourquoi je vais donc vous laisser tirer vos propres conclusions… vous mêmes…surtout à présent que j’ai inséminé votre conscience avec ma fameuse… vue d’esprit…

… Le cours est terminée. »

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