La vraie coupe d’Europe se meurt en été

Pour beaucoup, les coupes d’Europe ne commencent qu’avec le tirage au sort des groupes de Ligue des Champions effectué par le chauve de l’UEFA, voire pour les puristes par les barrages, s’ils incluent quelques grands clubs (PSV, Milan, Arsenal) ou des clubs français (en l’occurrence Lyon ou Saint-Etienne).

Mais pour de nombreux clubs européens de « ligues mineures », la coupe d’Europe a commencé dès début juillet et pour beaucoup se terminera avec les dernières lueurs de l’été. Doit-on le regretter ? Ces clubs de petits pays ont-ils leur place dans les prestigieuses Europa League et Champions League ? Y a-t-il une solution pour remédier à ce problème ?

Une Europa League sans 34 des 53 fédérations de l’UEFA représentées

Après ce quatrième tour de qualification pour l’Europa League qui a vu l’entrée en lice des mastodontes comme Swansea, Tottenham, Séville ou la Fiorentina, l’écrémage devrait être complet et très fin pour que seule la crème de la crème se retrouve pour l’automne européen.

Ainsi l’Albanie (Skenderbeu peut le faire mais…), Andorre, l’Arménie, la Macédoine, l’Azerbaïdjan, le Belarus, la Bosnie-Herzégovine, la Bulgarie, la Croatie, l’Ecosse, l’Estonie, la Finlande, la Géorgie, la Hongrie, les Féroé, l’Irlande du Nord, l’Islande, le Kazakhstan, la Lettonie, le Liechtenstein, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, la Moldavie, le Monténégro, la Norvège, le Pays de Galles, la Pologne, l’Irlande, la Roumanie, Saint-Marin, la Slovaquie, la Slovénie et la Suède pourraient ne pas avoir de représentants dans les groupes d’Europa League.

Alors certes, il y aura certainement quelques exploits dans ces barrages retours et cette liste va rétrécir, d’autant plus qu’il y aura les éliminés de Ligue des Champions renvoyés en Europa League mais cela ne met pas à mal le constat. De nombreux ensembles géographiques réellement amoureux de football ne seront pas représentés dans l’automne footballistique européen et vivront par procuration les soirées européennes. Y a-t-il une logique à ce qu’autant de millions de personnes soient privées de compétitions internationales ?

L’exemple de Kukes: 3 exploits pour rien ?

L’épopée du FC Kukes en Albanie a emmené tout un pays derrière les joueurs d’Armando Cungu. Ayant débutés leur campagne européenne début juillet, les Albanais ont réussi à éliminer difficilement les Estoniens de Flora puis les Bosniens du FK Sarajevo avant de réaliser un véritable exploit en sortant un club ukrainien : le Metalurg Donetsk. Après tant d’exploits, les Albanais devraient avoir le droit de s’asseoir à la même table que les « grands » d’Europe, non ? Ils ont fait leur preuve !

Et bien non. Avec ce système bâtard de têtes de série, protégeant les clubs de « grandes nations », Kukes était certain de devoir se taper un nouveau colosse avant d’avoir le droit de siéger à Nyon pour le tirage au sort des groupes d’Europa League. Le sort leur a offert le Trabzonspor des Malouda, Zokora et autre Bosingwa. Le match aller perdu 0-2 par les Albanais a déjà mis fin aux espoirs européens des valeureux joueurs de Kukes… Pas de place pour le romantisme avec l’UEFA.

Le niveau ou la ferveur : l’UEFA a fait son choix 

Avec ces tirages au sort biaisés par les systèmes de têtes de série, on comprend bien dans quelle optique l’UEFA se situe : celle d’avoir la compétition avec les meilleures équipes possibles. Cela peut tout à fait se justifier, étant donné que c’est également ce que le supporter/spectateur attend.

Cependant, ce que la compétition gagne en qualité footballistique, elle le perd généralement en ferveur et en émotions. Il n’y a qu’à regarder l’attitude des clubs français vis-à-vis de l’Europa League : peu enclins à la disputer à 100%, des spectateurs qui ne se transcendent pas pour ces évènements et des médias qui relayent sans plus.

Pour de nombreux pays privés de coupe d’Europe, le football fait partie de la Culture locale. Qu’un Zeljeznicar ait sa chance en Europa League et alors la compétition brillera de mille feux (de fumigènes)… Avant d’avoir vécu un match dans ces pays, il est difficile de comprendre ce que le football peut représenter pour ces supporters. Ils sont bien conscients du fossé de niveau entre leurs championnats et les championnats « majeurs » mais peu leur importe. Sans aucun doute, les confrontations de nos footballs de l’Ouest avec ces ferveurs de l’Est ajouteraient une atmosphère et un certain cachet à la C3.

Alors que faire ?

La solution de facilité serait d’éliminer tout système de têtes de série pour les phases de qualification pour que chaque club ait une chance réelle de passer. Certes cela pourrait offrir des Saint-Etienne – Tottenham en barrages mais au moins cela ne creuserait pas la tombe des équipes aux petits coefficients UEFA.

Une autre solution serait de ressusciter la feu C2. Dans mon souvenir, cette compétition avait une certaine aura et sa place à part entière dans le système européen. Elle permettait à chaque pays d’avoir son représentant et de participer réellement à une compétition européenne, à l’automne.

Enfin une autre solution radicale serait d’organiser une compétition européenne pour les clubs de ces « pays mineurs ». Comme dans certains tournois, il existe une consolante ; elle permettrait au moins à chaque pays de réellement faire partie des compétitions européennes après le mois d’août et aux supporters de voyager et d’échanger au-delà de leurs compétitions domestiques.

L’été : la période des illusions

Mais après tout, les quelques voyages estivaux ne sont-ils pas ceux qui nous font tenir un an au bureau ? Peut-être que les clubs de championnats mineurs doivent voir la chose de la même manière : un an de compétition nationale pour avoir la chance de connaître quelques périples estivaux et puis il faudra attendre une nouvelle année pour recommencer à voyager aux frais de l’UEFA.

Merci quand même Michel.

Tristan Trasca