LES CONFIDENCES DU JOUEUR MASQUE OHE OHE – LE DOPAGE

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Requiem for a dream peut aller se rhabiller.

« L’univers médical est corrompu et tu es dans la défonce »

Un footballeur de CFA2 a accepté de nous parler, une fois par semaine sur Horsjeu.net, des dessous du championnat. Chaque semaine, ce joueur abordera pour vous un sujet. En rapport avec quelque chose. Une chose est sûre: il connaît à fond les ballons la CFA2 et y joue actuellement. Mais vous n’en saurez pas davantage sur John-John-Kevin*.

Cette semaine, le footballeur masqué ohé ohé est encore plus masqué ohé ohé que d’habitude. Appel en numéro caché, voix modifiée (en se pinçant le nez), les révélations sans concessions qui suivent sont, à ne pas douter, digne de Paiement par Chèque Investigation*.

Si tu demandes à un joueur amateur s’il recourt de manière temporaire ou définitive à des produits dopants, tu auras à 99,999 % une réponse négative. C’est tabou.

Mais le dopage fait partie intégrante de la vie du footballeur amateur !

Ca peut commencer jeune. Je mets de côté les pétards de joints fumés en soirée pour faire cool, et les cuites à l’alcool. Je parle du vrai doping, qui te permet de te démarquer plus facilement sur le terrain et auprès des recruteurs.

Je connais bien le sujet, pour m’être dopé en début de carrière. J’ai mis en danger ma santé, ma flore intestinale, ma vie amoureuse, mes acquis sociaux. Aujourd’hui, je vois des bons gars de CFA2 se détruire, ça me fait mal et personne ne dit rien. C’est l’omerta.

Mon témoignage sur Horsjus.net* va, je l’espère, ouvrir les yeux des joueurs amateurs, en inciter certains à renoncer au dopage. Même un seul, alors là, je me dis que, ouais, mon John-John-Kev’ …tu auras sauvé une âme… (il marque une pause, ému)… ton passage sur Terre n’aura pas été vain…

A 20 ans, j’ai quitté ma province, j’ai signé à Brétigny-sur-Houblon* en DH, un club partenaire de l’AS Synthétienne*. Un bon tremplin et un pont entre les deux clubs, pour jouer avec la réserve des Rouges* en CFA2. C’est mon club de cœur, mon père masqué ohé ohé m’emmenait régulièrement au stade, je suis tombé dans la Marmite* quand j’étais petit.

« Les ébénistes sirotaient des cocktails »

En DH, j’ai découvert un dopage communautaire, avec des pratiques différentes selon l’origine des prévenus. Les sans-prépuces* buvaient une sorte de lait pourri, les blancos* s’enfilaient de la vitamine C et de l’aspirine. Les ébénistes* sirotaient des cocktails explosifs, des « remontants » comme ils appelaient ça.

Le plus atteint prenait des stimulants, du Lexomil *, du Xanax*, du Viandox* je ne sais pas trop ce que c’était, mais soi-disant, pour ses allergies, sa tachycardie… Des bobards ! Le coup classique de l’ordonnance médicale. Médecin conciliant, pharmacien complice, système de lutte antidopage absent, l’univers médical est corrompu et tu es dans la défonce !

Ce toxico avait sa boite à pharmacie personnalisée, il mettait 10 minutes à prendre ses cachets, mettre son écarteur de trous de nez, et nous embaumer avec une merde qu’il étalait sur son maillot pour mieux respirer. Il se prenait pour Tera Patrick Viera* ou Rigobert Pirès* alors qu’il n’était que gardien de but.

J’étais jambon, je me sentais pénalisé, loin de tout ça, mais prêt à tout pour franchir le palier DH à CFA2.

J’ai fauté avec un produit dopant autrichien : le Raid Boule*. Introuvable à l’époque en France, un copain m’en ramenait de l’autre pays du dopage, l’Espagne. Je m’étais constitué un bon stock, et je redistribuais le reste au réseau, des amis communs.

« J’ai enfilé le hamster de ma copine »

J’étais mouillé de chez mouillé, mais prudent. Avant de commencer le traitement, je tenais à tester le produit sur un cobaye.

J’ai enfilé le hamster de ma copine. A l’entonnoir, une demi-canette, je voulais démarrer en douceur. Il était tout gonflé. Il a passé 12h d’affilée à cavaler sur sa roue, à fond. Le samedi matin avec ma copine, on est parti faire les courses au Rond-Point*. A notre retour, l’animal était raide, tout dur. Il gisait dans sa pisse, aucune dignité la bestiole. La couleur orangée mêlée au sang et quelques bulles qui sortaient des orifices m’ont mis la puce à l’oreille. Et si le Raid Boule l’avait tué ? Mon hamster, victime du dopage ?

Malgré les avertissements de mon amie : « Tu arrêtes tes conneries maintenant ! Je t’interdis de toucher aux furets ! ». J’ai profité de son absence pour passer une canette dans la gorge du plus gros, au nom de la science.

Le bordel s’est mis à vomir et laisser des traînées de chiasse partout, j’étais à deux doigts de le passer par la fenêtre. Ma gonzesse m’a soupçonné, accusé, insulté, mais sans aucun témoin à charge, j’étais innocent. « Et la palette de Raid boule dans le couloir ! C’est pas un entrepôt ici putain ! ». Une hystérique, elle mélangeait tout.

Le plus dur a été de vivre avec cette suspicion ambiante. Oui j’étais coupable mais faute de preuve, j’étais innocent, et je voulais être considéré comme tel jusqu’à preuve du contraire.

Pour la forme, j’ai aussi vidé quelques canettes sur les plantes…

Bilan : un hamster mort, un furet geyser, un ficus cramé, et une rupture amoureuse imminente. Ca s’est confirmé, je n’ai pas fini la saison avec cette folle.

« J’étais cuit après 45 minutes »

Malgré ces alertes, j’ai pris le risque. Je me sentais moins bien physiquement et un observateur de Synthé* était annoncé au prochain match.

3 canettes avant l’échauffement, 6 autres dans le vestiaire, avec 6 aspirines 500mg douleurs et fièvres. Chargé comme une mule, le cœur à 200, j’ai fait la mi-temps de ma vie, un but, une passe décisive, toujours au pressing, devant, derrière, sur les côtés, j’ai bourré comme un âne. Mais seulement une mi-temps. J’étais cuit après 45 minutes, j’avais trop donné. Et les douleurs intestinales sont apparues.

C’était grisant, avec des félicitations de toutes parts. Mon coach: « Mais qu’est-ce que t’as bouffé John-John-Kev’ ? Continue comme ça, tu nous refais la même en 2e, on compte sur toi Champion ! » . Dans l’euphorie, j’ai dit « Oui oui », mais je n’avais plus rien à donner, malgré la petite tape d’encouragements sur les fesses. J’étais cramé putain, les jambes en coton, et mal au bide.

J’ai demandé à un ébéniste de faire tourner « son remontant », très fort, et au gardien de but de m’étaler sa pommade pour mieux respirer. Je pétais un plomb. Comme un toxico en quête de fix, j’avalais tout ce qui se présentait. Le lait des sans-prép’, confisqué ! J’ai englouti une brique sans ménagement.

6 Raid boules plus tard, je repartais comme un taré sur le terrain, dans un état second, mais les jambes toujours coupées.

J’avais un plan pour ne pas perdre la face : simuler un malaise vaginal*et sortir en héros.  Gomisse* n’a rien inventé.

Sur le coup d’envoi, chandelle côté opposé, c’est suicidaire mais je m’en fous, je m’engage à fond, sprint en diagonal… je traverse le terrain, je revois mes coéquipiers sciés par mon allant, et mon coach hagard, bouche ouverte…mon esprit se brouille, tout devient plus lent… je ne sens plus mes jambes, le hamster court à mes côtés…dans la roue…

Et écran noir.

J’ai violemment percuté l’épaule d’un défenseur. KO, et 2 molaires en moins.

Je suis sorti avec une minerve sous les applaudissements des 30 spectateurs. Aucun malaise à simuler, j’en avais un vrai ! Sur la civière des pompiers, mon visage s’est couvert de lait, de rhum, de raid boule, tout est remonté, et entaché légèrement ma glorieuse sortie.

Sur la route, j’étais plus ballonné que sonné. Je ne vous fais pas un dessin, j’ai réagi comme un furet de 80 kilos. Les pompiers ont probablement eu envie de me balancer du camion. L’humiliation totale, pris de diarrhées, j’étais plus bas que terre.

Le verdict est tombé : promotion cérébrale*, inflammation du côlon, le palpitant d’un lapin, l’estomac en souffrance, des frais dentaires à venir, ça sortait de partout. J’ai gagné un lavement et de l’acide lactique pour un régiment. J’ai beaucoup souffert.

Cette mésaventure sur le terrain m’a fait prendre conscience des dangers d’être un junkie.

J’ai arrêté le Raid Boule avec effet immédiat. Je n’ai pas rebu une goutte depuis ! Je suis clean !

Au final, je suis revenu plus fort de cette épreuve, pour faire une honnête carrière en CFA2. On peut y arriver sans dopage. La saison suivant mon accident, j’ai même réalisé mon rêve et joué avec la réserve des Rouges*.

« J’en vois défiler des pots de prot’ »

En CFA2, je ne suis plus un acteur du dopage, mais un fin observateur, un lanceur d’alerte auprès des jeunes. Le dopage apparaît moins au grand jour, c’est plus discret mais tout aussi répandu. J’ai demandé à un sans-prépuce s’il buvait du lait qui pue, il m’a confessé en boire de temps en temps, mais sans plus de détails. Idem pour les ébénistes, certains avouent faire des cures au pays pendant les vacances, mais c’est toujours évasif. Le sujet dérange.

Le Raid boule en revanche fait des ravages.

Les plus touchés sont les jeunes. Je vois des juniors, 16-17 ans, en boire sans honte. Ils sont déjà dans un objectif performance par la triche. Les effets secondaires sont là pour certains, la peau grasse et couverte de boutons.

Dans le vestiaire, ça en parle peu, comme si c’était naturel de prendre des vitamines, des compléments alimentaires, ou des protéines en poudre. Ah ça depuis 4, 5 ans, j’en vois défiler des pots de prot’, ça marche bien.

Mes coéquipiers déplorent mon intransigeance, de manière pas toujours polie, mais je persiste à faire de la prévention.

Je suis très vigilant. Il y a le petit triangle jaune avec une voiture sur la boite de médicament, je vais au stade à pied. Quand j’explique ça à mes collègues, j’essuie des moqueries, mais ça me passe au-dessus du fion. Je participe à la bonne ambiance du groupe, et insidieusement, je me dis que je les fais réfléchir…et si dans le lot, il y en a un qui renonce au dopage…alors là je me dis que, ouais, mon John-John-Kev… (il marque une pause, ému)…tu auras fait du bon boulot…

John-John-Kevin

*Le nom du joueur a été changé pour des raisons de sécurité et secret défense.

*Le moyen de paiement de l’émission a été changé pour des raisons de sécurité et secret bancaire.

*Horsjeu.net a été changé pour des raisons de sécurité et de secret défense.

*Les noms des clubs ont été changés pour des raisons de sécurité et de secret défense.

*Le nom du récipient a été changé pour des raisons de sécurité et de secret défense.

*Le nom des médicaments a été changé pour des raisons de sécurité et de secret défense.

*Le nom des joueurs d’Arsenal a été changé pour des raisons de sécurité et de secret défense.

*Le nom des produits dopant a été changé pour des raisons de sécurité et de secret défense.

*L’origine des joueurs a été changé pour des raisons de sécurité et de secret défense.

*L’enseigne d’hypermarché a été changée pour des raisons de sécurité et secret défense

*Le nom de Bafetimbi a été changé pour des raisons de sécurité et secret défense

7 thoughts on “LES CONFIDENCES DU JOUEUR MASQUE OHE OHE – LE DOPAGE

  1. Je connais ça un peu de l’intérieur parce qu’on s’était hissé en quart de finale de la coupe Sud-Yvelines des moins de 15 et on s’était fait taper 7-0 par une équipe surpuissante à un point que c’en était pas net. Les mecs avaient 2 ans de moins que nous d’âge en moyenne mais ça courait de partout. Le petit 10 en face était tout simplement inarrêtable.

  2. Je ne suis pas ébéniste, mais je me suis déjà dopé pareil. Ça me fout une claque ce témoignage.

  3. Je me suis pissée dessus.
    Je rêve d’un montage de cette mi temps sur la musique de l’entraînement de Rocky Balboa

  4. Vous pourriez être un peu moins vague avec vos raisons de sécurité et de secret défense ? Là je comprends rien !

    Sinon, JJK m’a fait verser deux larmes, une pour l’affreuse réalité vis-à-vis du dopage dans le milieu, une réalité qui est venue me heurter de plein fouet un peu comme autre chose dans mon autre chose. Et une pour la bonne action de la fin…

  5. Merci JJK. Je fais de la prévention sur l’usage de drôgues auprès des p’tits cons. Ton témoignage servira de support, et remplacera dignement Alice au pays des merveilles et les photos avant/après de Sylvester Stallone. Sois fier, ton slip de match n’aura pas été souillé en vain.

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