26 décembre 2012. Alors que le championnat belge entame sa dernière journée avant la trêve, Roland Duchâtelet, patron du Standard de Liège, jette un pavé dans la mare professionnelle par cette interview accordée aux journalistes du groupe Sudpresse (ici) en tirant la sonnette d’alarme sur l’état de santé du foot belge.

Où est donc le problème docteur ? Selon le patron des Rouches, le foot belge souffre d’un manque de compétitivité intérieure , d’un trop gros écart entre les « gros » (Anderlecht, Club Brugge et Standard. On a essayé d’en trouver d’autres mais y’a pas) et les autres. Cela implique un manque d’intérêt de la part des chaînes TV, privilégiant la diffusion des championnats anglais, allemands, italiens et français (ben y’a vraiment pas de quoi) mais également une trop grand faiblesse des représentants du pays sur la scène européenne. Pour régler tout ça, Duchâtelet s’est imaginé en organisateur de soirées d’orgies belgo-bataves : un championnat de 20 clubs (8 belges et 12 hollandais. Une histoire de population plus nombreuse aux Pays-Bas) regroupant « l’Elite » des deux pays. Pour les autres, chacun aura un championnat respectif, sorte de D2 en 2 groupes.

En cas de traîne du projet, Roland Duchâtelet a une autre solution, plus égoïste et tout aussi farfelue : demander l’intégration du Standard de Liège dans la Ligue 1 française !

 

LES ROUCHES SERONT-ILS AUX PORTES DE PARIS ?

Je vois de suite vos sourires en coin à l’idée d’une victime facile et aux 6 points gagnés aisément pour vos clubs respectifs, mais laissez-moi mettre le holà (et non la ola, ce qui n’aurait aucun sens). Le Standard reste un club très honorable en Belgique et honorable tout court en Europe (vous avez eu des clubs français qui ont atteint les 8èmes de finale d’Europa League l’année dernière vous ?) avec de bons talents qui n’ont peut-être pas le bon milieu pour s’exprimer.

Essayons de comparer ce qui n’est pas comparable. Si on devait classer le budget du Standard parmi ceux des clubs de la Ligue 1, les Rouches, avec 25 M€, serait entre Bastia et Brest. Oui, c’est pas beaucoup. Mais continuons dans notre farfelue hypothèse et prenons en compte un élément important, sujet de toute cette « affaire » : les droits télés. En effet, si Liège devait atterrir dans le championnat français, il toucherait par pure logique une part du gros gâteau savoureusement cuisiné par Canal+ et Al-Jazeera. Ajoutons cela à une notoriété décuplée au Sclessin qui deviendrait une sorte de vitrine pour tous les joueurs de Belgique désireux d’évoluer dans un championnat plus élevé.

Tout ça pour dire quoi ? Que sportivement, l’arrivée du Standard en Ligue 1 ne relèverait pas de la tournée du cirque du coin. Après, le gros « hic », si on peut dire, est du point de vue administratif. Après contacts avec la LFP et la FIFA, il m’a été indiqué que d’une part, tant que rien n’est annoncé officiellement, jamais nous ne verrons de déclarations de ces deux organismes, et que d’autre part, dans le cas où une demande est déposée, la décision reviendra à la FIFA qui refusera, arguant le fait qu’un championnat national ne concerne que les clubs appartenant au territoire de ce championnat (Monaco et les clubs gallois Swansea et Cardiff étant des exceptions aux vues de la forte relation diplomatique franco-monégasque et du peu de popularité du foot et du peu de concurrence pour les deux gallois), et prenant les exemples du Barça en cas d’indépendance catalane ou encore d’ETG ne jouant pas à Genève.

 

BELGIQUE ET PAYS-BAS, MAIN DANS LA MAIN ?

Mais alors, si tout n’est qu’une question de territoire (Europe mon cul !) on ne pourrait pas mélanger les clubs néerlandais et belges ? C’est beaucoup plus subtil et surtout plus tordu que ça. En effet, la Beneliga existe déjà pour le foot féminin dans le but de le promouvoir dans ces deux pays. Du fait de la jeunesse du projet, donner une conclusion sur son efficacité serait trop hâtif, mais il est clair que cette Beneliga pour les « vrouwen » apporte plus de bien(s) que si on avait tenté de faire un championnat chacun dans son coin. De plus, l’Ajax, le PSV, Anderlecht et le FC Brugge se disent séduits par l’idée (mais le disent pas trop fort non plus) et l’insistance de clubs faite sur les organisations internationales, suivie par les sponsors, la pression populaire et Capitain Flam pourrait faire que la FIFA accepte la vox argento.

Mais, dans un pays où le nationalisme flamand commence vraiment à se faire sentir (bon en même temps, ça fait 5 ans qu’on dit ça), y’aurait-il une logique de « tuer » l’indépendance footballistique belge pour se faire phagocyter par le foot batave ? Dans le sens inverse, si on devait prendre les 8 meilleurs clubs belges, combien aurait-on de clubs wallons dans un championnat quasi-totalement néerlandophone ? Au grand maximum, 2 : Liège et Mons. Mais cela ne provoquerait-il pas un phénomène d’exclusion, entre d’un côté des « Walen buiten » et de l’autre des néerlandais qui ne verront aucun lien (culturel, linguistique,…) avec ses autochtones venus du Sud. Le football est universel, mais faudrait quand même garder des frontières. Car admettons que l’UEFA accorde 2 représentants de la Beneliga pour la Champions’ League (« Admettons ! », comme dit Bigard), prendrons-nous juste les 2 premiers ? Que se passerait-il si ces 2 premiers était l’Ajax et le PSV, cela signifie qu’on aurait AUCUN club de Belgique ? Pourtant le bon sens nous empêcherait de donner une place pour le néerlandais le mieux placé et une autre pour le belge le mieux placé.

Parlons en justement de nos 20 clubs potentiels. Ils seraient mieux traités financièrement par des droits télés plus importants, une ferveur (peut-être) retrouvée, de belles affiches (enfin, on peut aussi s’imaginer des Lokeren-Groningen), mais pour les autres, on fait quoi ? Apparemment, le projet serait de faire 2 D2, une belge et une néerlandaise, mais là encore comment pourrait-on gérer le système promotion/relégation ? Mais surtout, quel impact économique cela donnerait aux laissés pour compte ? Des clopinettes.

Enfin, bref, le sombre avenir économique et sportif que nous prédit Roland Duchâtelet est une réalité, certes exagérée, mais le championnat belge, voyant petit à petit ses talents fuir jeunes pour l’étranger (il n’y a qu’à voir le nombre de joueurs de la « génération dorée » qui jouent dans le championnat national) et le désintérêt grandissant de la TV et de l’éternelle vache à lait qu’est le supporter, risque de vivre une grande déchéance, surtout sur le plan européen. Il n’y a qu’à voir le parcours d’Anderlecht en Champions’ League. Face au Milan AC, au Zénith et à Malaga, on a bien vu qu’il y avait moyen de faire quelque chose, mais qu’il manquait un petit truc. Et ce petit truc ne serait-il pas la fin de ce complexe d’infériorité ressenti dans le pays ?

Car après tout, on a beau parler sport, on arrive toujours au même point, la magnificence du championnat, le challenge sportif mais surtout économique,bref, l’argent. Si on prend la cause du manque de lumière de la Jup’ League et sa conséquence, il paraît évident qu’on a affaire à un cercle vicieux. Le championnat n’est pas intéressant ? Je ne vais pas mettre mon argent pour le diffuser. Les droits télés sont dérisoires ? Je ne peux pas me permettre d’acheter de très bons joueurs et ainsi être compétitif. Alors, quelles sont les solutions ? Pour l’instant, on ne les cherche pas, enfin pas vraiment. On attend. Un miracle, peut-être, un miracle qui pourrait survenir un soir de juillet 2014. Les acteurs continuent leur pièce comme si de rien n’était, en attendant que le public arrête de leur balancer des tomates, faute de stock.

 

Bart Van den Van Krrr

6 thoughts on “La Beneliga. Et pourquoi (pas) ?

  1. Cette idée de la beneliga m’a toujours plu perso mais c’est très difficilement réalisable. Tout à fait d’accord que le standard en france serait dans les 10 premiers alors qu’ils vendent leurs meilleurs joueurs chaque année. Enfin j’ai vu que Rednic voulait un 9 pour le mercato parce que Ezequiel n’en est pas un pour lui du coup Perbet ce serait possible selon toi?

  2. On parlait déjà de Perbet au dernier mercato estival, donc pourquoi pas ? D’autant que, contrairement à la saison dernière, Mons peut le laisser partir vu qu’ils ont Nong qui peut tenir la baraque

  3. D’abord Barty, bravo pour le travail.

    Ensuite, le point de vue de Jacques… Je ne suis pas du tout chaud. Pour une raison simple. On nous explique que le championnat manque d’argent, faute de gros droits TV. Très bien. J’ai juste une question : pourquoi gagner plus d’argent ?

    J’ai jamais compris cette logique de vouloir toujours en gagner plus pour des clubs sportifs qui en ont déjà beaucoup trop à l’échelle européenne et mondiale. Aucun intérêt pour les vrais supporters. Alors vous allez me dire, « oui mais si les clubs avaient plus de pognon, le spectacle serait meilleur ». C’est intéressant si on se place dans la peau d’un amateur de foot non-supporter, et dans la peau du compte en banque de Roland Duchâtelet, mais pas pour moi. Moi j’aimerais mon club même en D3 et, partant, je préfère que le championnat belge reste national. Surtout (comme tu le rappelais) en ce moment, vu la situation politique de ce pays.

  4. Je ne suis pas sûr que l’argument soit un meilleur spectacle, mais bien plus de compétitivité pour les clubs de la Beneliga. Ce qui ne passe pas forcément par du spectacle (Grèce 2004 pour ceux qui voudraient un exemple…). Pour moi, la logique financière se veut d’avoir plus d’argent pour gagner plus de pognon sur les compétitions européennes en étant plus performant. Donc attirer un peu plus les sponsors pour rendre les clubs encore plus compétitifs au niveau interne et au niveau européen. Ca, c’est la théorie, et le genre de théorie que Thiriez nous avait pondue en France. On peut rester sceptique sur le résultat final.

    Après, Bart a, pour moi, parfaitement résumé les limites et les problèmes de cette option.

  5. je en vois pas trop l’interêt hormis plomber les clubs hors « top3 » belge (Anderlecht, Standard, Bruges) et « top 6 néerlandais (Ajax , PSV, Feyenoord, AZ, Twente, Heerenveen).
    et encore ces clubs se tireraient une balle dans le pied, puisqu’ils ne seraient pas dans la possibilité de jouer l’Europe chaque saison. avec un manque à gagner qui peut être évident, en plus de l’exposition médiatique qu’ils peuvent bénéficier à ce moment là…

  6. POURQUOI NE PAS FAIRE DES PLAYS OFF DANS UN PREMIER TEMPS ENREPRENANT LES 4 PREMIERS DU CHAMPIONNAT BELGE ET LES 4 PREMIERS DU CHAMPIONNAT NEERLANDAIS CE QUI DONNERAIT DE BELLES CONFRONTATIONS (AJAX STANDARD OU PSV FC BRUGES….) AVANT D’ENVISAGER UN CHAMPIONNAT NEERLANDO BELGE AVEC UN SYSTEME COMPLEXE DE MONTEES ET DE RELEGATIONS

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