Faire de l’OM le Bayern du sud

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Notre footballologue revient sur le bilan des années RLD, avec tout le recul et l’intransigeance qu’on lui connaît.

rld_imagePour croire que Bruges est « la Venise du nord », sans doute faut-il n’être jamais allé à Venise…et pour croire que l’OM peut être le « Bayern du sud », fallait-il être Robert Louis-Dreyfus.  Nulle place ici pour la moquerie ou le mépris affichés par le quidam marseillais ou le journaliste gagne petit, trop contents d’infantiliser le « naïf » RLD et ses 200 millions perdus par des incompétents au profit, le plus souvent, d’escrocs.  Joueur de poker, détenteur d’un MBA délivré par la Harvard Business School, repreneur-redresseur-revendeur d’entreprises (Saatchi & Saatchi, Adidas-Salomon), administrateur du groupe familial auquel il ajoute des réussites comme Neuf Telecom ou plus récemment Direct Energie, l’homme n’offre pas vraiment le profil de ravi de la crèche…ou faudrait-il alors s’interroger sur l’aura attribuée unanimement à Bernard Tapie.


Ce « Bayern du sud », RLD (pour les intimes que nous sommes tous devenus) l’a mis en projet dès son arrivée. Lunettes de soleil profilées, espadrilles, bedaine emmaillotée de la tunique phocéenne, le nouveau président de l’OM s’en va poser la première pierre du centre de formation de « son OM », accompagné en cela par des notables locaux suant leur dithyrambe à grosses gouttes. La scène révèlait déjà les difficultés à venir : un touriste allemand venu faire dans la construction immobilière au pays de Borsalino… Ne cherchez plus l’erreur, le fils Courbis l’a déjà transférée à l’OM-loft  via trois clubs argentins, un intermédiaire albanais, 5 rétro-commissions et une BMW plaquée or sièges vison pour Marcel Dib…
Depuis, 12 années se sont écoulées, suffisamment pour établir un bilan que les événements précipitent.

Lors de son surprenant transfert en 97 de Bilbao au Bayern (le Bayern n’étant pas très fringant, devancé en Allemagne par Dortmund, battu sur la scène Européenne par le PSG de Weah…), Bixente Lizarazu arguait qu’il y avait peu de « Grands Clubs » en Europe, fondant sa définition sur le palmarès ainsi que sur les résultats immédiats et à venir. Bref, un « Grand Club » serait un club qui a été, qui est et qui sera…rien de bien nouveau sous le soleil, ajouteraient, non sans malice, le lecteur à la kippa frisotante ou Odon Vallet ou tout lecteur assidu de L’Ecclesiaste. Quoiqu’il en soit, et quand bien même Lizarazu ne serait lecteur de L’Ecclesiaste que dans ma tête, il n’en reste pas moins qu’il a remporté tous les titres possibles sous les couleurs munichoises et que sa pseudo-définition réinterprétée peut s’appliquer à l’OM de Louis-Dreyfus afin d’évaluer la viabilité de son « Bayern du sud. »

L’image, le sportif, le financier : ISF. L’image, le prestige pour le passé ; les résultats sportifs pour le présent ; le bilan financier pour garantir l’avenir…et la tripartition fonctionnelle comme horizon analytique .

>  En terme d’image

l’OM clignote sur la scène nationale et défile en filante dans le ciel européen. Cette inconstance marque une différence majeure avec le « modèle  munichois » en ce que le Bayern est un club là où Marseille « a eu des équipes. » Le premier doublé du Bayern fut fondateur d’une identité de jeu (rigueur, solidité défensive) incarnée par des personnalités d’envergure devenues depuis dirigeantes. Ce modèle assure la transmission des valeurs auprès des nouveaux joueurs, instaurant une tradition faisant foi de culture de club. Il n’est qu’à voir le récent épisode Ribéry pour comprendre qu’entre « le Real ou rien », le Bayern n’est pas rien, mais Ribéry et les millions du Real sont peu de chose pour prétendre menacer le prestige de l’institution teutonne.  L’ambition de RLD devait donc être de construire une identité OM reconnaissable permettant, à terme, de développer la « marque OM. » Administrateur du Bayern, l’homme d’affaires franco-suisse connaissait l’importance du merchandising dans les bilans financiers et ce fut un de ses premiers chantiers. Gadgets, OM-TV, il n’est guère que la location du stade qui soit encore un problème, comme elle l’est pour tous les clubs français. Toutefois, RLD dut composer avec les « particularités locales », telles la gestion de la billetterie des virages par les groupes de supporters, les réticences de la ville à l’idée de ne plus avoir de prise sur « son OM », mais surtout fut contraint d’ « inventer des dirigeants » capables d’incarner ce « grand club » qu’il appelait de ses vœux…mais qui n’existait pas. Dès lors, se sont succédés un homme de confiance (Marchand) fusillé par les locaux, une figure « locale » (Tapie) dont la venue finit d’enterrer le souvenir. Débarrassé de l’ombre du « boss » local, RLD nomme son antithèse en la personne de Christophe Bouchet, austère journaliste auteur de plusieurs pamphlets sur le « système Tapie. » Discours raisonnable tant sportivement que financièrement, le style tranche mais les résultats suivent tant et si bien que, se rappelant le titre d’un de ses ouvrages (Comment devenir riche et célèbre sans vraiment le mériter, Albin Michel, 182 pages, 1995), Bouchet se laisse gagner par la « folie marseillaise » et flambe l’argent suisse dans un brasier qui fermera définitivement le chéquier de son mentor. Diouf prend alors les commandes, dans une direction bi/tri-céphale dont personne ne sait vraiment comment elle fonctionne mais qui trouve, contre toute attente, un point d’équilibre. Anigo, caution locale muselée, se découvre des talents de recruteur tandis que Diouf mène une savante entreprise de construction du club, assainissant les finances, assurant une image et des valeurs (l’épisode du match des minots à Paris), bénéficiant d’une certaine réussite sportive en dépit de l’absence de titre. Après la phase de découverte, l’autodafé des idoles et la tentative malheureuse de construction, il semble que RLD ait trouvé le dirigeant capable d’unifier cette succession d’épopées en une histoire constitutive d’un « grand club » quand tout s’écroule. Querelle d’égos entre Diouf et Gerets, puis entre le Labrune, les frères Veyrat et Diouf, voire entre Deschamps-Bernès et Diouf…bref, trois années crédibles détruites en deux semaines. Aujourd’hui, Jean-Claude Dassier, grand professionnel auquel on doit l’invention des « Dassiettes » (concept « révolutionnaire » consistant à mettre à la présentation des JT de LCI des bombasses très à cheval sur le fond), « ne se prononce pas sur le mercato » dont il croit « qu’il se termine fin août », est un « ami de longue date de RLD » dont la mort doit permettre d’oublier toutes les querelles , d’effacer les rancoeurs car « on lui a fait plaisir avec Lucho » (même s’il l’éternue plus qu’il ne le prononce et oublie le Gonzalez, on le sent plein de bonne volonté…) Si le départ de Diouf reste un mystère (l’auto-censure interdit « obscur »…), son absence risque d’être bien visible (« de se faire sentir »…idem)

>  Sur le plan sportif

L’échec semble évident puisqu’en 12 ans de présidence l’OM n’a rien emporté tandis qu’il faut remonter à 1993 et Munich (décidément…) pour se souvenir d’une victoire. Les joueurs parisiens offrant à leur supporter la plus belle défaite de leur histoire, le ballon de « glucose » parmesan, Raphaël Benitez et Le Président ne l’entendaient pas ainsi. La faute également à une série d’erreurs de casting tant dans le choix des joueurs que dans celui de l’encadrement (les ligaments de Lilian Martin et Christophe Dugarry se souviennent certainement de Jean-Pierre Egger et de ses séances de squats en guise de rééducation.) Dans le même temps, le Bayern raflait tout et en plusieurs exemplaires avant de connaître un passage à vide récent lié aux mutations du football européen (cf Pérez et les loups…) Si le « grand club » est celui dans lequel signer garantit la construction d’un palmarès, l’OM de Louis-Dreyfus ne peut postuler. Pourtant, force est de constater que le club a su conserver une attractivité au-delà de ses résultats. Certes, au plus mal, Anigo félicitait Pouget et autre Leroy d’avoir rejoint le club au mercato quand « personne ne voulait venir » (après réflexion, personne n’a envie de savoir qui se cache derrière ce « personne »…) Mais durant les « coups de sang » de 98-99 et 03-04, l’OM a recruté parmi les meilleurs joueurs nationaux et quelques pointures internationales, autant de stars contrastant avec le cortège des lofteurs dont les noms servent aujourd’hui  à constituer la « pire équipe de l’OM de tous les temps » sur les forums de supporters. Si le modèle du Bayern consiste à établir un monopole national, dans un rapport vertueux qui voit les joueurs réaliser leur rêve tout en le perpétuant, l’OM n’y parvient qu’ épisodiquement, démontrant, une nouvelle fois, la faiblesse d’un club que la seule performance d’une équipe suffit à rassasier. De plus, le centre de formation ne produit que peu de joueurs majeurs, les seuls Nasri ou Flamini ne masquant pas l’échec dans ce secteur, quand il ne s’agit pas de gâcher des éléments prometteurs comme Yahiahoui ou Benatia. Il n’est que durant la période Diouf qu’une cohérence sportive a semblé évidente, le qualitatif ne cessant de s’améliorer quand le quantitatif s’estompait. Le réflexe sportivement absurde de signer une bonne dizaine de joueurs aux intersaisons 98-99 et 03-04 et le désastre sportif qui en avait découlé semblaient avoir servi de leçon. Les sommes étaient raisonnables, le recrutement cohérent tant dans leur profil des joueurs que dans la qualité d’ensemble de l’équipe, et l’OM se qualifiait trois années consécutives en Ligue des Champions, sésame indispensable à la crédibilité sportive et financière du « grand club » imaginé par RLD. Il était même parfois question d’une « identité de jeu marseillaise tournée vers l’offensive à respecter » (dans la grande tradition du 5-3-2 défensif, violent et tout en contre-attaque de Goethals…) Aujourd’hui, l’équipe en place présente un visage solide et crédible, même si l’arrivée de Deschamps risque de bousculer le « cocon » que Diouf et Gerets avaient cru indispensable de mettre en place. La qualité des joueurs et surtout les sommes engagées récemment font craindre un nouveau « coup de sang », soit une volonté de brûler les étapes aboutissant à la destruction de l’ensemble de l’édifice… (sibyllin) même s’il semble que le duo Deschamps-Bernès sache veiller sur ses intérêts.

>  Financièrement enfin

l’OM du « mécène » fut une poule aux œufs d’or pour n’importe qui passait dans les parages. Quand le Bayern écume les fins de contrats, demande un plafond salarial et-ou une législation accrue en matière de transfert, menacé qu’il est par l’inflation dans ces domaines, l’OM ne peut se prévaloir d’une telle rigueur. Seul Diouf et Bouchet période 1 (celle d’avant les lunettes noires et la grosse voiture) ont géré l’OM en « père de famille » tandis que Courbis et autre « amis » ont usé de méthodes « courantes dans le milieu » pour « lutter à armes égales, car vous comprenez, avec la législation française, la DNCG, etc… on ne peut plus rivaliser avec les étrangers. » L’épisode Courbis semble sur ce point avoir vacciné RLD. Les 10 mois de sursis pour « abus de biens sociaux » (sachant que la société abusée …c’est lui…) couplés aux 200 000  euros d’amendes (pour s’être auto arnaqué donc…), quand Marcel Dib, responsable des transferts, pavoisait en vison, quincallerie au vent, que Stéphane Courbis devenait agent de joueur (à l’époque et de mémoire, il fallait sortir un chèque d’un million de francs et répondre à un questionnaire FIFA de niveau « qu’est-ce qu’un penalty ? »), que Tuzzio voyait sa valeur décupler du seul fait que l’OM avait « pris le dossier en mains » (dixit Dréossi, alors responsable du recrutement à Rennes) et transitait par trois clubs avant d’atterir à Marseille se faire reluquer les fesses par Luccin et Dalmat (Ah ! Pardon, je me trompe de défenseur argentin, c’est Berizzo qui avait déclaré « sentir des regards sur –ses- fesses dans les douches de l’OM comme jamais cela ne –lui- était arrivé auparavant »)…bref, nous sommes bien loin du Kaizer Franz, de Uli Hoeness, Rumenigge et autres « cadres dirigeants » que RLD avait pu cotoyer au sein du conseil d’administration du Bayern. Et que dire de l’hallucinant documentaire sur le mercato 2003-2004 de l’OM de Bouchet dans lequel on peut  mesurer l’énormité des sommes évoquées au regard du peu de compétence et de discernement des « dirigeants » olympiens (négociation « sponsoring des chaussures de Vachousek » par son agent gominé tchec de 25 ans…ça explique la carrière d’Anelka.) Là encore, Diouf a su, patiemment, dégraisser l’OM-loft, à force de résiliations de contrats, de prêts payants voire de transferts improbables sans, et c’est presque l’exploit, l’alimenter de ses propres recrues (sauf peut-être Arrache…) Aujourd’hui, cette œuvre doit être parachevée mais l’énormité des sommes évoquées n’est pas sans rappeler les plus belles années d’abus, et entendre Deschamps réclamer un défenseur supplémentaire, un nouvel avant-centre, sans jamais mentionner le coût, ou encore Dassier être prêt à envisager le retour de Drogba (bon, on va dire que c’était un bizutage d’Anigo…), trouver M’Bia « un peu cher » à 12 millions d’euros, laisse songeur quand Diouf a passé son temps à « éduquer » les marseillais à une rigueur et une sobriété toute bavaroise.

« Ce club m’a pris mon argent, ma santé, mon honneur »…telles sont les présumées paroles de RLD rapportées par un énième « ami. » L’argent, c’est certain, même si la totalité n’est pas revenue au club, et c’est sans doute ce qui est source des deux autres maux. Mais la plus grande supercherie dont RLD a pu être victime est de croire qu’il y a un club à Marseille…et, pire, de vouloir en faire un « Grand Club. » Sa tentative d’acculturation se fondait sur un modèle de référence spécifique par son histoire et par ses acteurs, modèle complètement antithétique de celui de l’OM. Il a fallu apprendre dans la douleur (Courbis), chasser les fantômes du passé (Tapie), mettre les plus probes à l’épreuve du feu, les voir se consumer (Bouchet, continuant sur sa lancée, s’occupe du marketing du Toulouse FC via sa société EasyMarketing, ainsi que de Sportfive, filiale du groupe Lagardère donnant dans le marketing sportif ; Diouf ?), pour finir par consentir à cette mascarade qui voit un profane frayer avec des loups pour le plaisir d’un conseil d’administration aux intentions encore floues. De « Bayern du sud », ces 12 années ont surtout placé l’OM très au sud du Bayern. Doter ce club d’une grande équipe n’en fera jamais un « grand club »…mais qui s’en soucie désormais.


11 thoughts on “Faire de l’OM le Bayern du sud

  1. « Je ne sais pas pour l’instant ce qui va se passer. Mais je me tiens à la disposition de ceux qui pensent que je pourrais être de nouveau utile pour l’OM » déclare Bernard Tapie, l’ancien président et ex-directeur sportif de l’OM, toujours extrêmement populaire sur la Canebière.

    Défilé des intrigants attirés par l’odeur de l’argent frais et la notoriété facile…peut-être que durant les prochains jours certains abattront leurs cartes, éclairant un peu plus le départ de Diouf et la logique qui l’a provoqué.

  2. Article tres moyen. Faut arreter de se prendre pour un ecrivain et essayer de faire des phrases compréhensibles. Et je parle meme pas de l’humour (ou plutot la tentative d’humour) sur Diouf…limite quand meme. Et la conclusion est pathetique.

  3. Visiblement quelqu’un n’a pas tout compris et manque un peu d’humour. laisse moi deviner Nicolas, tu serais pas supporter marseillais et lecteur du 10sport ?
    Continue footballologue, moi perso j’aime ton style.

  4. Malheureusement, je vis en Italie, je peux pas lire le 10sport. Oui je suis supporter marseillais mais c’est pas le problème. Je préfère etre footballologue et marseillais que journaliste raté et raciste de surcroit.

  5. A part ca et pour calmer le jeu, les passages sur la comparaison avec le Bayern sont plutot pertinents

  6. Tout d’abord Nicolas si tu connais un minimum le site tu sais très bien qu’on ne tolèrerait aucune forme de racisme ici.

    Les remarques du footballologue sur Diouf, dont il fait par ailleurs les louanges, visent à tourner en dérision une auto censure hypocrite pratiquée par beaucoup de journalistes qui n’utilisent pas les mêmes idiomes et clichés selon la couleur des dirigeants dont ils parlent.

    On est un peu attristé que tu n’aies pas interprété ainsi ce troisième degré, même si on comprend que tu aies pu le trouver déroutant.

    Pour le reste, libre à toi de penser ce que tu veux de l’analyse de notre footballologue, tu peux lire ses autres analyses pour confirmer si oui ou non elles sont bonnes, et si tu veux continuer à les lire. Content tout de même de noter que tu te définis comme footballologue et que certains points ont attiré ton attention.

  7. Je suis d’accord avec l’analyse et pourtant je suis supporter marseillais depuis toujours. Faut être un peu réaliste quand même…on est dans la m!%*e si on repart dans les travers habituels
    Pour la blague, Je comprends l’esprit mais faut faire attention, tout le monde la comprendra pas…

  8. J’ai bien compris la blague. Seulement, je fais partie de ceux qui pensent que ce genre de blague peut passer au sein d’une bande d’amis mais n’a rien à faire sur Internet sur un article lu par des milliers de personne. Il faut faire attention à ce que l’on écrit. Le racisme latent est dangereux.

    Par ailleurs, j’aime beaucoup votre site.

  9. Mais d’où viennent tous ces footballologues bordel? Yen a dans votre entourage vous?

  10. Mon grand père avait créé le département de footballologie à l’université de Bordeaux, à la fin du 19ème siècle mais il fût eclipsé par un certain Durkheim qui créait en même temps le premier département de sociologie…

  11. Je pense que l’article n’est pas fait pour le supporter « normale », donc les blagues (d’ailleurs marrantes) sont fait pour « choquer » le lecteur « normale » et pour faire marrer les vrais.

    Bon article, j’en suis fan!

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