À S. C.


I.

Vous vis-je un jour plus fort, vous vis-je un jour plus beau,
Que lorsque votre audace a pu rêver du trône
En dérobant la grâce au jeu de Barcelone ?
Fut-ce eau mirant le ciel, ou ciel reflétant l’eau,

Quand leur art s’illustra par votre jouvenceau
Qui rappelle en croissant sa vieillissante icône ?
Ses gestes déroutants, ondant tel un cyclone,
Formaient un tableau vif du plus docte pinceau !

De vos rivaux mortels le plus fervent copiste,
Blanc ne leur opposait qu’une ombre terne et triste.
Vainquant son parangon, vous creusiez son cercueil.

Les censeurs serpentins avalaient la couleuvre
Tendue aux ingénus avant votre chef-d’œuvre,
Et de l’ancien chef précipitaient le deuil !


II.

Désirant au fond d’eux reprendre leur prestige,
Des vaincus remontés recevaient les vainqueurs.
Tous attendaient de vous de dépouiller sans heurts
Cette gloire d’antan de son dernier vestige.

Et quel départ frileux ! Aviez-vous le vertige,
Étiez-vous engourdi par le froid des hauteurs ?
Vous trahissiez un front imprégné de ces peurs
Qui soustraient le génie au plus jeune prodige.

Barcelone assiégeait de frêles conquéreurs
Venus non pour des buts, mais protéger les leurs,
Or vouloir l’endiguer rend l’attaque plus sûre…

Leur avant-garde est fruit du long travail des hiers,
Qui fit des Espagnols les rois de l’Univers,
Et sa force renaît quand elle est sans censure !


III.

À la faveur de Trapp et de pairs maladroits,
L’affaire de routine évolue en supplice :
Après deux buts marqués, il en suffit de trois
Pour que la remontée insane s’accomplisse !

Leurs buteurs malmenaient la défense aux abois
Qui les laissait sans mal pénétrer chaque lice,
Plus prompte à s’effiler que la femme d’Ulysse
Ne fait et ne défait un tissu sous ses doigts.

Lorsque le ballon rond manquait à leur puissance,
Ils prirent pour appui votre ferme inconstance,
Qui rendait opportuns leurs plans avilissants :

Tel l’ouvrage sans fin, tissé par Pénélope,
Qui ne put refréner les poursuivants pressants,
Vous ne pûtes surseoir les tours d’une salope !


IV.

L’impensable naissant dans le moindre penser,
Il fallut une soule à Cavani servie
Pour le voir foudroyer le but tel un mortier,
Et qu’en un dernier râle il vous rendît la vie !

Ainsi le feu du ciel frappant en justicier,
Il était attendu que gloire fût ravie
Par un tir salutaire au fourbe devancier !
Pour son trépas suffit votre indigne survie.

Comme la demi-heure après les sceaux brisés,
D’un silence éveillant tous les corps enlisés
Pour les mener paraître auprès du dive arbitre,

Un mutisme sans fin fut le recueillement
Du peuple catalan, frappé d’étonnement
Qu’un Onze à l’agonie occît l’espoir d’un titre !


V.

… À moins que ce ne fût l’interlude trop beau
D’une Parque sadique aiguisant son couteau ?


VI.

Vous chavirez enfin tel l’esquif sur la houle
Face aux déhanchements ultimes de Neymar ;
Terrassés six à un, sous vos pleurs le fard coule
Et dessous se révèle un trop vrai cauchemar.

Vous n’étiez guère plus qu’un nuau qui s’écoule,
Doré puis dissipé par un puissant cagnard,
Qui devient boue aux pieds que l’adversaire foule ;
De vos souffre-douleur souffrez donc le regard.

La pauvreté nous offre un repos humble et sage,
Et le luxe en secret de rire à votre outrage :
Ce qu’offre la fortune est une illusion !

…Non ! bien plus !
Dans nos cœurs affligés elle grave
Cette gloire d’un dieu qui meurt comme un esclave
En qui la France émue entre en communion.

7 thoughts on “Sizain parisien

  1. C’est beau mais :
    « Dans nos cœurs affligés elle grave
    Cette gloire d’un dieu qui meurt comme un esclave
    En qui la France émue entre en communion. »
    Toute la France? Non! Un club d’irréductible se dresse face à l’impérialiste parisiano-qatari et se délecte de cette défaite aussi improbable qu’historique

  2. Tout cette belle tragédie et ces beaux cheffes d’oeuvre c’est bien joli mais la vérité c’est qu’ils se sont fait piner comme des merdes avec l’aide d’un arbitre vraisemblablement piraté cybernétiquement par Poutine au niveau du fondement. Le reste, n’est que littérature.

    1. Grâce à vous je penserai à faire rimer « pine » et « poutine » lorsque je réviserai ces sonnets! Ou bien ce serait du vol et du plagiat, M. Pdlas?

      1. Le vol c’est pour les voleurs et le plagiat pour les plagiaires. Mais la poésie elle, elle est à tout le monde, y a pas la rime d’untel ou untel : si on se serre pas un peu les coudes et qu’on partage pas les vers alors c’est la mort de la beauté et de l’esprit. Ah putain, ouais !

  3. Redonne un sens à ta vie
    En y mettant de la
    Po – é – sie

    Et joue avec destin pour changer de vie.

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