N’hésitez pas à nous apprendre des choses.

La télévision, c’est combler les trous entre chaque écran publicitaire. Inutile de rappeler la période magique de la naissance de la télé poubelle, lorsque TF1 et son formidable président Le Lay inventèrent tout ce qui fait de pire, avant d’être surpassés par M6, tout le câble et aujourd’hui le groupe Canal+.

Combler les trous entre chaque écran publicitaire, c’est la télé la plus rentable jusqu’à ce qu’on développe à grande échelle le recyclage de programmes déjà diffusés, sous d’autres formes qui ne sont au final que des déclinaisons subtiles de vomis, de vomis avec des morceaux pour les moments de bonne qualité, sinon de vomis liquides avec ajout de bile s’il venait à manquer un peu de matière biodégradable. Voilà ce que propose Canal +, régulièrement et sous toutes ces formes. Canal +, qui conserve difficilement la British Premier League dans son portefeuille, a du mal à remplir sa grille lorsque justement il n’y a pas de match de championnat. Alors dimanche soir, Canal + nous a proposé un comblement de programme étrange dont l’actualité ne justifiait en rien une diffusion, pas de date historique, pas d’exploit, rien. L’émission « King of ze day » a décidé d’établir un classement des plus beaux buts et des meilleurs joueurs de la Premier League, donc depuis 1992.

Rien de méchant bien sûr, je ne suis pas une personne malveillante, mais une émission creuse faite de défonçage de portes ouvertes, de matraquage d’images vues et revues depuis des années, de séquences disséquées jusqu’à se demander quel âge devait avoir le public ciblé, des analyses CM1 option roller. Je n’ai rien contre Sinama-Pongolle, on sent qu’il veut faire des efforts gestuels, qu’il tente parfois des phrases avec des propositions subordonnées, qu’il a des choses à partager, mais tout sort de travers et il faut quelques secondes pour remettre les mots dans l’ordre. S’il ne tenait pas des fiches du début à la fin, il serait facile de penser qu’il improvise et qu’il s’en sort mieux, mais non. Mais je serai juste et j’incriminerai beaucoup plus ses comparses journalistes qui oscillent toujours entre le convenu et le réchauffé. Tourriol et Delhostal nous régalent d’un spectacle d’air-claquettes, je me demande même si, parfois, pour ajouter un peu de piment à une émission sans idée, s’ils ne viennent pas sans effacer de leur mémoire tout ce qu’ils savent de la Premier League.

Je suis aigri sans doute. Triste certainement. Et je l’étais ce dimanche soir, d’une tristesse sincère après l’annonce de l’accident de Kobe Bryant, de sa fille et des 7 autres. J’ai mis Canal + dans l’espoir d’un réconfort sportif, je me suis trompé. J’ai mis quelques minutes L’Equipe 21, mais après un monologue de Dave Appadoo récitant les statistiques de Kareem Abdul-Jabbar pour montrer que son témoignage avait de la valeur, je me suis résigné à me changer les idées. Et donc j’ai vu défiler, Ô Miracle, les grandes actions de Vieira, Gerrard, Giggs, Lampard, Ronaldo, Rooney, Shearer et Scholes. Voici pour le tout venant, dans un ordre aléatoire. Et il y a Eric Cantona, qui n’est pas dans les premiers, mais pour lequel les journalistes ont été à deux reprises incapables de dire le palmarès correctement. Je pensais à l’erreur d’inattention quand Bill a repris la même connerie que Boule. La faute de fiche donc, est-elle plus excusable que la faute simple ? Non bien sûr que non, il y a le palmarès de 10 putains de grandes stars à retenir, à écrire sur les fiches, mais non même cela, ils en sont incapables. Vous me direz que ma colère est disproportionnée, mais quelle confiance accordée à ces gens qui sont des impostures, par rapport à tant de gens de talent désoeuvrés et obligés de se ronger les ongles, les doigts, les mains et le bras en regardant ces putains de grands connards (jurisprudence tmtc) de guignols (jurisprudence Jardin du Luxembourg).

Les plus attentifs auront évidemment noté qu’il en manque toujours un dans le classement. C’est le premier et c’est Thierry Henry. Ni meilleur buteur, ni meilleur joueur de Premier League ou d’autres choses, peu de titres, un individualiste porté par des virtuoses et des hommes de devoir (Vieira, Pirès, Bergkamp, Fabregas, Ljunberg, Wiltord, Parlour, Reyes,…) et un entraîneur au sommet, on se demande encore comment Thierry Henry peut truster cette place, certes sans intérêt et sans valeur, mais tout de même. Lorsqu’on connaît les accointances de certaines têtes de gondole de la chaîne avec Henry, quand on voit la liste de gars derrière lui avec 5 ballons d’or, une trentaine de titres, des ligues des champions (oui oui mais Barcelone n’est pas en Premier League) ou seulement plus de deux championnats, on se demande bien comment le vote a eu lieu. La réponse est simple et a été répétée à plusieurs reprises sans que je sache très bien si c’était pour donner de la légitimité au résultat ou s’excuser de cette connerie. Henry est donc premier. Avec son fameux « enroulé du droit » et je dois avouer que la décomposition du geste par Sinama-Pongolle m’a intéressé parce qu’en tant qu’attaquant, il voit et sait autre chose que le quidam comme la trajectoire de course, le mouvement des épaules, l’intentionnalité des gestes. Mais tout de même, reprenons notre esprit critique et atterrissons. Le seul pied droit de Beckham aurait mérité autant, le jeu de Robert Pirès aurait mérité autant, le talent brut et délicat de Bergkamp aurait mérité autant, je ne parle même pas des gardiens comme un Van Der Sar, un Cech, un Schmeichel, ou des héros de l’ombre comme le football anglais a terriblement besoin.

Et en tant qu’émission française qui donner la becquée à un public silencieux, plutôt que des joueurs que tout le monde connaît déjà, apprenez-nous des choses. Parlez-nous de Sylvain Distin et ses plus de 550 matchs avec un maillot anglais (469 en Premier League), voilà les joueurs qu’une émission comme celle-ci doit nous faire redécouvrir, je veux voir Sylvain Distin à la Une le soir où Kobe Bryant est mort. Parce que Distin m’apaise, parce que nous avons tous à apprendre de l’humilité, de la constance et de la fidélité d’un joueur comme Sylvain Distin un soir où nous avons besoin d’être rassurés.

7 thoughts on “Les joyeux de la couronne

  1. La bile tend à se diluer Frantz-Cricri d’amour. On vous sent plus fataliste qu’énervé. Ce n’est pas une mauvaise chose, mais à titre personnel je vous préfère la bave aux lèvres.

    1. Wise …
      – « Il serait capable de déclencher une bagarre dans une maison vide », A. Ferguson. Vestiaire au lieu de maison aurait plus collé.
      – Le crazy gang de WFC… Vinnie « Bullet Tooth Tony »
      – Chelsea

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