Manchester City – Lyon (1-3). L’académie citoyenne a vu les matchs. Elle ne les verra plus.

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Un barrage contre Hansi Flick.

Elle avait dit qu’elle reviendrait. Elle a tenu parole. On lui disait qu’elle ne connaissait rien de ce football, mais au fond d’elle, elle le savait bien, que cette passion incandescente était faite pour elle. Alors elle avait commencé par voir un match, puis un autre. Peut-être ne savait-elle toujours rien du football mais ce n’était pas grave, puisqu’elle avait vu tous les matchs.

Elle avait posé son verre sur la table basse, elle avait versé le whisky dans le verre, elle avait mis les glaçons dans le whisky. On était vendredi soir, l’un de ces vendredis soir d’août qui lui rappelait sa jeunesse coloniale, la torpeur, l’humidité, les insectes attirés par les cheveux sales des hommes dans les plantations.

Elle avait vu les Catalans subir les vagues, par huit fois ils avaient subi les vagues, impitoyables. Elle assistait au spectacle, médusée. Pep connaissait bien les Catalans, elle le savait. Elle savait qu’il connaissait tout aussi bien les Munichois. Et nous étions déjà le lendemain, et Pep dirigeait désormais les hommes en bleu.


Le roc bavarois se dressait devant Pep, c’était inéluctable. Un défi fou, un défi perdu d’avance. Ce soir, il allait écarter de son chemin les hommes en noir, mais pour quoi faire ? Elle ne savait pas si Pep connaissait la peur. Des solutions, il allait en trouver, il en trouvait toujours. Elle se demandait quelle serait cette solution, une solution imaginative, sans doute, comme d’habitude, mais si dérisoire. Tout semblait dérisoire.

Elle regarda son verre de whisky. Il était vide. Elle se servit un deuxième verre. Elle n’oublia pas d’ajouter deux glaçons dans le verre. Elle connaissait ce sentiment, quand elle était assise à sa table, devant sa machine à écrire, des feuilles blanches dans sa machine à écrire. La feuille de match de Pep était blanche, et il l’avait remplie. Il avait pris son stylo, il avait jeté des noms sur la feuille, il avait signé la feuille. Et ses hommes avaient joué, bien mal.

Elle a vu un homme nommé Maxwell Cornet déposer dans le but un ballon dont le gardien ne voulait pas. Personne ne semblait vouloir. Chacun savait qu’au bout du chemin, il y avait Munich. Elle vit un homme roux marquer un but pour les bleus, malgré tout, comme pour se tromper lui-même et croire qu’il voulait se battre. Elle a vu Moussa Dembelé faire un croc-en-jambe à un défenseur, bien sûr qu’elle l’a vu, comment aurait-elle pu éviter de le voir ? Tout le monde l’avait vu, mais l’arbitre en a jugé différemment. Volontaire, involontaire, quelle importance après tout, pour des hommes qui désiraient tellement la mort ?

Elle a vidé son verre de whisky d’un trait quand Sterling a manqué l’immanquable. Elle n’a pas eu le temps d’aller chercher des glaçons. Lyon avait déjà marqué un troisième but. Pep était déjà parti, avec la fierté du cheval qui refuse l’obstacle. Le reverrait-elle ? Elle ne le sait pas. C’était une époque étrange pour aimer le football.


La note du match

Deux sur cinq, dit-elle. Et ces points étaient pour les Lyonnais, tous les deux. Pep ne mérite-t-il donc rien, lui dit-on ? Pep ne mérite rien, répond-elle.

« La mère proclamait : ‘Il n’y a que la richesse pour faire le bonheur. Il n’y a que des imbéciles qu’elle ne fasse pas le bonheur.’ Et elle ajoutait : « Il faut, évidemment, essayer de rester intelligent quand on est riche.’ »

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