Derrière les mains courantes du FC Renardin, épisode 10
Foot, culture et politique
Commencer l’année 2013 par une défaite contre Piémontaise ça me fait péter un câble. N’allez pas croire que ça m’inquiète dans l’optique de notre montée évidente en DHR. Non pour ça vraiment je crains rien, j’ai senti les ptits gars soudés. C’est plutôt que c’est pas l’idéal pour les caisses de la buvette. Pendant le match y a pas eu de buts, alors dans ces cas là je vends moins. Rien qu’avec Dédé, Max, Youssef et Yves, c’est 12 demies vendues sur un but de Renardin en général. Dans ces cas là j’avais trouvé une combine pour pallier l’absence de buts : j’essayais d’augmenter la pression sur le mauvais arbitrage. J’ai constaté que les tensions avec le corps arbitral entraînaient une hausse des consommations. Mais hier, vraiment pas grand chose à dire faut être honnête. On sait être fair-play à Renardin. Le but de Piémontaise ayant été inscrit en toute fin de match, j’ai perdu quelques ventes supplémentaires, beaucoup de spectateurs savaient qu’ils allaient rentrer chez eux. Je veux pas en dire plus pour l’instant, je tente de mettre une équation au point mais je préfère en reparler lorsque mes recherches avanceront.
Bizarrement lundi matin, j’ai tout de même ressenti le blues de la défaite de la veille. Le temps de quelques secondes je suis parti à m’imaginer un scénario dans lequel nous n’accéderions pas à la DHR. Angoissant ! Je dois absolument pas commencer 2013 à partir dans mes délires négatifs, je veux diminuer mes crises de nerfs cette année. En plus mes jours sont plutôt bizarres depuis que monsieur Remoulade a annoncé la tenue d’élections municipales anticipées. Je meure d’envie d’en parler avec tout le monde, tant je perçois sa candidature comme un nouvel âge d’or pour Renardin, peut-être comparable à celui que le village a connu de 1938 à 1960, période durant laquelle nous violions la loi autorisant les femmes à ouvrir un compte bancaire. Paradoxalement à mon engouement, j’ai l’impression que j’ai peur d’aller évoquer ce sujet là avec les habitants. J’y connais pas grand chose en politique et je crains de me retrouver à gaffer. Quand je regarde les mecs faire des campagnes politiques à la télé, j’ai pas besoin d’être allé au lycée pour voir que ça blague pas, c’est sérieux. Le fait que j’en ai croisé si peu dans mes séjours en prison, prouve bien qu’il faut être rigoureux dans le mensonge. Je suis pas trop sûr de m’y connaître assez pour jouer ce jeu là au bar des sports. En plus je me connais je peux vite coller une tartine à l’autre Gérald s’il cherche à me mettre face à mon ignorance. J’ai rien contre lui, et ses opinions différentes des miennes ne me gênent pas, mais sur un coup de sang vous avouerez que ça peut aller vite. Le coach Remoulade m’en voudrait, et je pourrais mettre à mal son idéologie nouvelle et les projets, notamment sportifs, qui vont avec.
Il était donc une sage initiative de boycotter le bureau pour mieux creuser le programme du coach. Comme ça je pourrai me défendre quand les fonctionnaires me traiteront de facho parce que je pense pas comme eux.
Quel était le meilleur endroit pour travailler tout ça tranquillement au calme ? J’ai immédiatement pensé à la bibliothèque Yasser Arafat. J’y allais souvent avant d’être autant pris par mon rôle au sein du club, et Nadia, la bibliothécaire est très gentille avec moi, elle est toujours contente quand je vais lui poser des questions sur des trucs que je comprends pas. Avant je pensais que les bibliothécaires étaient fonctionnaires, mais apparemment non. Le gros avantage qu’elle présente, en plus, c’est que si on se déconcentre du travail, on peut reluquer son beau petit cul. J’adorais quand elle me donnait des cours de français et de littérature à la salle des associations de Renardin.
Dans un premier temps, je me suis reconcentré sur le programme électoral du coach. Comme je comprenais rien, j’ai fait marcher mon vice. Il m’est apparu évident que les dissidents au coach étaient en fait comme moi : des gens qui n’y connaissent pas grand chose mais répètent ce qu’ils lisent ou entendre, en fonction de leur identité politique, tout en faisant semblant de penser. Alors j’ai recentré ma défense du programme sur des points précis, qui étaient compréhensibles et m’apparaissaient, à moi, essentiels :
Social : avec la baisse des taxis, je pourrai éventuellement rentrer sans danger du crazydisco. Important pour la sécurité des citoyens.
Economie : j’ai juste à faire semblant de mal vivre mon chômage, et dire que je retrouve de l’espoir à travers la création de l’agence intérim spécialisée dans les farines animales.
Culture : le musée du FC Renardin aurait du être fait depuis longtemps pour permettre aux élèves peu intéressés à l’école d’accéder à l’histoire et à la culture. Quant à la rénovation du bar des sports, facile. Le premier qui veut me coller là dessus, je lui répondrai « t’es bien content d’y être là non ? ». Ficelle. J’ai trouvé l’idée dans l’Encyclopédie Universelle à « Mélanchon – Sa communication ». Lumineux le mec.
Sport : là c’était pas compliqué j’y avais déjà beaucoup pensé. Indéniablement, le programme est inattaquable. En renforçant les infrastructures, on fait profiter le FC Renardin, mais on laisse aussi la chance au village de se faire un nom en France. Des exemples ? Gueugnon, Carquefou, Auxerre, Quevilly, Strasbourg, etc. D’autre part, il paraît clair que ça laisse envisager la création d’emplois au club, notamment pour moi.
Avec tout ça j’avais mes premières munitions pour pouvoir refréquenter mon bureau. Mais pas assez suffisant pour la rigueur du monde politique dont je vous parlais. A mon analyse politique du programme de monsieur Remoulade, il m’a fallu me glisser quelques citations dans la poche pour faire mouche. Quand j’ai expliqué l’objet de mes recherches documentaires à Nadia, elle m’a dit « trouve quelques citations, tu auras des éléments qui étaieront tes arguments ».
Alors j’ai continué à fouiller, et j’ai retenu de quoi me défendre de Gérald ou ses électeurs qui accusent mes opinions politiques :
Socrates : « Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien ». Ça c’est au cas où les gens me posent des questions que je comprends pas trop, ça me permettra de remettre en cause leur prétention de vérité.
Rocé (j’en avais marre des livres au bout d’une journée, alors Nadia m’a encouragé à insister ailleurs. Je pense qu’elle aime beaucoup monsieur Reloulade.): « t’as beau allé au musée et jeter ton dévolu sur un artiste reconnu, il deviendra révolu, ringardisé du seul fait que t’y as jeté la vue […] car le bourgeois gentilhomme est quelqu’un qui cache ses codes ». Elle m’a dit que je pouvais le citer face à ceux qui émettraient des jugements sur mes savoirs, mais en échange elle m’a fait promettre de lire Le Bourgeois Gentilhomme…. Pfff ça fait grave iech de commencer 2013 avec de telles promesses.
En continuant ma semaine à la bibliothèque, je me suis occupé avec des dvd plutôt. J’ai ainsi pu faire remarquer qu’il n’y avait aucun dvd de foot. Ça m’a fait penser qu’à l’avenir je pourrais peut-être essayé de me former au cinéma pour réaliser un documentaire sur le club. Le club aura bientôt plus de moyen avec l’élection du coach, il est envisageable qu’on me finance des formations si le club doit changer de standing. Dans tous ces dvd, j’ai quand même entendu des trucs intéressants. A la fin de la semaine, j’avais trouvé un dernier rempart aux arguments des « bobos gauchistes », comme dit monsieur Remoulade. J’ai découvert un homme politique dont le charisme était dans la lignée du coach : Thomas Sankara. Quand j’ai dit à Nadia que j’envisageais de dire à Gérald qu’il était normal qu’il rejette monsieur Remoulade, parce qu’en cela il était fidèle à François Miterrand (de gauche) s’opposant à monsieur Sankara le symbole des hommes intègres, elle était drôlement fier de moi. J’ai même été à deux doigts de réussir à annuler ma promesse ! A deux doigts seulement. D’ailleurs je dois vous laisser, je vais essayer de m’y mettre. C’est fou quand même… Qui eut cru que le FC Renardin me conduirait à lire du Molière…
il est malin le grosdard, il paye pas de mine mais il sait comment arriver à ses fins. Par contre dans la réalisation, avec un nom pareil vous n’avez aucune chance de faire quoi que ce soit de bon… ou peut-être un film à la va-vite avec Nadia entre 2 étagères de la bibliiothèque, je suis sur que vous avez déjà le film en tête.
Je commence lis tranquillement du football fiction vrai et paf je me retrouve la bio de Thomas Shankara.
habile
Non je ne suis pas bourré