Cinquième pays au monde au niveau de la superficie et de la population, le Brésil est un géant, le symbole de l’Amérique du Sud. Mondialement célèbre pour ses plages, notamment à Rio où les cariocas enchaînent parties de football et de volley avec séances de bronzage, le Brésil possède un côté plus sombre. Criminalité et ségrégation raciale autour de la question économique font rage, comme dans beaucoup de pays aux fortes inégalités sociales. Aux villas succèdent des favelas d’une extrême pauvreté qui ne semblent pas vouloir se vider malgré les efforts de l’ultra-populaire président Lula. Le pays est pourtant sur la bonne voie, et son économie en pleine expansion devrait faire de lui, à terme, l’un des acteur économique et politique majeur du monde.

L’histoire :

Résumer l’histoire du football brésilien est un peu comme vouloir résumer l’histoire de la boxe cubaine : on peut aller dans le détail et écrire un roman ou se contenter d’égrener des noms et des dates marquantes. La sélection nationale, la Seleçao, est la seule à avoir participé à toutes les phases finales de Coupe du Monde. Elle détient le record de victoires avec 5 succès, les trois premières pour la génération Pelé, la quatrième pour la génération Romario et enfin la dernière en date en 2002 qui consacrera la génération Ronaldo. Le Brésil a toujours gagné le titre suprême emmené par un buteur dominant de sa génération, et les trois stars sont parmi les plus grands attaquants de l’histoire du jeu. Des noms marquants, on pourrait en citer des dizaines, tous importants à leur époque. Plutôt que de rendre hommage à tel ou tel génie, citons simplement les noms des onze joueurs présents sur le terrain du Stade Azteca au coup d’envoi ce jour de juin 1970, pour ce qui conclura en apothéose la plus belle Coupe du Monde de l’histoire. Félix, Carlos Alberto, Brito, Piazza, Everaldo, Clodoaldo, Gérson, Jairzinho, Toastão, Pelé, Rivellino. Depuis son banc, Mario Zagallo a pu assister à l’une des plus belles symphonies achevées de l’histoire. Ce 21 juin 1970, 65 ans après la naissance de Sartre, le Brésil développait sa propre application de l’existentialisme sur un terrain et avec un ballon. Depuis ce jour, le football est définitivement Brésilien.

Les qualifications :

Le format de poule unique avec doubles confrontations a ceci de particulier qu’il ne réserve jamais vraiment de surprises. Tout juste le résultat final peut paraître surprenant à l’aune des pronostics d’avant compétition, mais sur un total de 18 matches une certaine forme de logique se dégage toujours. Une fois de plus, cela a été le cas sur la route de l’Afrique du Sud, et le Brésil s’en est sorti assez facilement, sans avoir jamais été inquiété. Pas ultra impressionnant, c’est souvent le cas de la Seleçao en qualifications, mais très solide et difficile à manœuvrer. Suffisant pour terminer à la première place, un point devant le Chili et le Paraguay, en n’ayant concédé que 11 buts, dont cinq lors de ses confrontations face à ses deux dauphins. Dunga a bien compris qu’il valait mieux savoir ne pas perdre, plutôt que de vouloir à tout prix gagner. Conséquence directe, quatre matches nuls et vierges à domicile, et un à l’extérieur. Tant pis pour le spectacle. Le pragmatisme de l’ancien milieu défensif n’a pas empêché quelques cartons de temps à autre, mais il ne faut pas juger uniquement à travers le prisme du résultat. Oui, il y a eu des victoires larges avec beaucoup de buts marqués, mais ce n’est pas pour autant que les autres rencontres ont été mauvaises et celles-ci fabuleuses. Simplement, quand il arrive à ouvrir le score, le Brésil peut profiter d’espaces en contre pour alourdir la marque, mais un 5-0 diffère parfois d’un 0-0 uniquement à cause d’un poteau rentrant plutôt que sortant. Même si le pays termine meilleure attaque de la poule, plus de la moitié des buts ont été inscrits en seulement quatre rencontres, et personne n’a eu réellement l’occasion de vibrer, même une fois la qualification assurée.

Le calendrier :

Brésil-Corée du Nord, le 15 juin à 20h30 au Johannesburg

Brésil-Côte d’Ivoire, le 20 juin à 20h30 à Johannesburg

Portugal-Brésil, le 25 juin à 16h Durban

Les joueurs :

Gardiens :

Julio César. Inter Milan

Inutile de rentrer dans des classements idiots sur qui est le meilleur gardien du monde, contentons-nous des faits. Depuis plus de deux ans, Julio César enchaîne les matches avec une régularité impressionnante rarement vue pour un gardien carioca. Moins susceptibles d’exploits que bon nombre de ses compatriotes, il n’arrive quasiment jamais que sa responsabilité soit directement engagée sur un but encaissé. Relativement neuf en équipe nationale, il apparaît aujourd’hui indéboulonnable.

Gomes. Tottenham

Auteur d’une belle deuxième partie de saison, qui compense une première complètement ratée, Gomes est un gardien en forme. Toujours capable de sortir des exploits pour faire une faute de main juste après, il commence à acquérir une certaine régularité au plus haut niveau. Testé au début de la prise de fonction de Dunga, l’homme qui avait peut-être fauché Nilmar en ¼ de Ligue des Champions n’a pas su convaincre et est rentré dans le rang. Les déboires de Doni en club lui donnent l’occasion de jouer un rôle de doublure dont il se satisfait pleinement.

Doni. AS Roma

Gardien fantasque, Brésilien quoi, il est là plus par habitude que pour un réel mérite sur le terrain. Auteur d’une très belle saison 2007 où il dispute la Copa America en tant que titulaire, il a dû céder sa place au profit d’un Julio César plus rassurant et régulier. Délogé de son poste à la Roma par Julio Sergio, il a rétrogradé d’un rang dans la hiérarchie au profit de Gomes, plus apte à pouvoir suppléer le portier intériste. Malgré tout il fera le voyage, profitant du côté conservateur d’un Dunga qui a trouvé son groupe et ne veut pas le bouger. Pas forcément une mauvaise idée.

Défenseurs :

Maicon. Inter Milan

Elément indispensable de la Seleçao, son apport offensif combiné à sa faculté à rester concentré derrière ont logiquement débouché sur une place de titulaire pour l’ancien monégasque. Sur la lancée de sa magnifique saison, il devrait encore harceler ses adversaires directs tout en se mettant au service du collectif. Un joueur dont rêveraient les 31 autres pays.

Lucio. Inter Milan

Si on lit un peu partout que Mourinho a transformé Lucio, il ne faut surtout pas oublier l’influence de Dunga. Capitaine depuis l’arrivée de l’ancien milieu défensif, il a parfaitement compris que remonter le terrain tout seul n’était pas toujours la meilleure solution pour tenter d’aller marquer. Technique, physique, et avec une lecture du jeu impeccable, il est une référence au niveau mondial, et fait déjà parti des légendes du football brésilien.

Juan. AS Roma

L’autre partie de la très expérimentée et très solide charnière centrale. Moins brillant que son compère Lucio, il fait ce qu’il a à faire, et il le fait sobrement. Partout où il est passé, il a rendu sa formation meilleure. Plutôt que de vanter ses qualités, il suffit de regarder les chiffres quand il est sur le terrain. A Rome on en est désormais convaincu, c’était lui et non Mexès qui tenait la défense l’an dernier. Incontestable et incontesté.

Michel Bastos. Lyon

De retour au poste de ses débuts sur le côté gauche de la défense, il s’en est plutôt bien sorti dans les matches de préparation, face à des équipes plutôt inoffensives. Il doit se méfier de la concurrence de Gilberto Melo, ainsi que de celle de Dani Alves, que Dunga a un peu de mal à laisser sur le banc. Et on peut le comprendre. Sa faculté à envoyer des coups-francs surpuissants devrait plaider pour son maintien dans l’équipe de départ.

Dani Alves. FC Barcelone

Malheureusement pour lui, il est de la même nationalité que l’autre latéral droit offensif de classe mondiale, et plus perméable défensivement. Sur le papier, il est censé devoir rester cantonné au banc de touche en blâmant ses ancêtres. Sa polyvalence pourrait toutefois le sauver car, capable d’évoluer sur le côté gauche et même en tant qu’ailier, il fait office de joker de luxe pour trouer des défenses fatiguées. Ce serait trop bête de s’en passer.

Luisão. Benfica

Assez efficace pour palier l’absence d’un des deux monstres de la charnière sans que cela ne se remarque, surtout si c’est Juan, il a le malheur d’arriver au top alors qu’une charnière déjà historique est en place. Aussi bon qu’il puisse être, il n’a aucun espoir de bouleverser l’ordre établi tant que Lucio et Juan maintiendront leur niveau actuel. Il a clairement plusieurs longueurs d’avance sur Thiago Silva, et se tient prêt en cas de blessure ou suspension qui, si elles n’interviennent pas, risquent de facto de le laisser sur le banc toute la compétition.

Thiago Silva. Milan AC

A moins d’un troisième match qui compterait pour du beurre, et qui donnerait l’occasion à Dunga de maintenir tout le monde sous pression, on peut d’ores et déjà exclure l’idée qu’il joue un quelconque rôle. En plein apprentissage, il vient découvrir ce qu’est la Coupe du Monde. Même s’il ne prépare clairement pas 2014, Dunga sait que ce joueur, au profil semblable à celui de Lucio, incarne l’avenir du football brésilien. Breno décevant et blessé, il est le probable futur grand défenseur brésilien.

Gilberto Melo. Cruzeiro

L’un de deux seuls joueurs évoluant au pays est aussi l’un des choix les plus surprenants de Dunga. Concurrent de Bastos sur le flanc gauche, il vit une saison contrastée à Cruzeiro, marquée par plus d’expulsions stupides que de grandes performances. Arrière gauche très offensif, pour lui comme pour beaucoup d’autres sélectionnés, c’est plus une certaine forme d’habitude qui a prévalue pour acter sa venue en Afrique du Sud. Même s’il devrait être remplaçant, il est plus proche d’une place de titulaire que ne l’annonce la chronique, à un poste qui aura causé beaucoup de maux de tête à Dunga.

Milieux :

Felipe Melo. Juventus

Le cas de Melo est un peu compliqué. Enfin, il l’est depuis son transfert à la Juventus. Auteur d’une saison qu’on qualifiera gentiment de mauvaise, il est en plein doute. Lui, excellent sous le maillot auriverde, semble complètement perdu depuis le début de la préparation. Pourtant, dans son rôle de milieu récupérateur-relayeur en lien permanent avec Elano et Kaka, il a impressionné tous les observateurs depuis son arrivée dans l’équipe. Sur son potentiel, enfin, sur le niveau affiché l’an dernier de manière constante, il mérite indiscutablement d’être là, et d’entrée de jeu. Reste qu’il est difficile d’évaluer le vrai niveau d’un joueur qui rate tout depuis des mois. Un pari : soit continuer à le faire jouer en espérant qu’il se reprenne, soit l’écarter en se privant d’un excellent élément qui peut revenir en forme et en confiance à tout moment.

Elano. Galatasaray

Ce sera probablement la surprise du onze de départ. Même s’il a été aligné lors de la plupart des matches de qualification, il semblait devenir petit à petit victime de l’explosion de Ramires, plus jeune et plus talentueux. Joueur doué reconverti en travailleur inlassable, son abattage a souvent tendance à nuire à ses inspirations offensives faites de passes tranchantes et de tirs lointains, notamment sur coups de pied arrêtés. Dans un rôle extrêmement précieux, à un poste qu’il est quasiment impossible de tenir 90 minutes durant, il entrera dans tous les cas forcément sur le terrain. Moins explosif et apte à profiter de la fatigue des défenses adverses que Ramires, il devrait user l’équipe en face, laissant à son jeune coéquipier le soin de l’achever.

Gilberto Silva. Panathinaïkos

Il n’a plus le même âge qu’en 2002, mais il est toujours aussi impeccable en sélection. Alors que sous le maillot d’Arsenal il semblait fatiguer de plus en plus, perdant en vitesse et en vivacité, sous le maillot auriverde c’est tout le contraire. Infranchissable, il profite d’un milieu à trois très resserré pour pouvoir se concentrer sur ce qu’il aime faire, ratisser les ballons, sans avoir à couvrir une trop grande zone ce qui pourrait le faire perdre en lucidité. Les caractéristiques physiques baissent avec l’âge, mais pas les caractéristiques techniques, en tout cas ce n’est pas encore le cas de Gilberto. En connaisseur du poste, Dunga sait que l’expérience du champion du monde est essentielle à sa formation, et il devrait encore largement s’appuyer sur celui qui s’est affirmé comme son successeur.

Kaka. Real Madrid

Meneur de jeu en soutien de Luis Fabiano, il est le moteur de l’équipe devant, le chef d’orchestre qui impulse le rythme. Il faut pourtant différencier son rôle de celui d’un numéro 10 traditionnel, à la Riquelme pourrait-on dire, qui tiendrait sa position dans l’axe et distribuerait les caviars. Kaka penche légèrement sur le côté gauche, entre Robinho et Fabiano, et n’hésite pas à s’excentrer, Elano ayant la possibilité de mener le jeu sur l’autre côté. Il n’est pas le joueur essentiel que pouvait être un Ronaldinho, et de sa forme ne dépend pas forcément le sort du match. Il est théoriquement l’élément le plus talentueux du groupe, mais il se fond surtout dans le collectif, se servant de ses incroyables qualités pour briller finalement assez peu souvent. Voudra surtout oublier une saison ratée du côté de Madrid.

Josué. Wolfsburg

Pour le qualifier, il faut utiliser des expressions toutes faites. Joueur de devoir, solide, qui fait le métier, il est le joueur de l’ombre par excellence. Absolument pas médiatisé au Brésil, c’est tout juste si on connaît son existence, seulement prouvée par son nombre d’apparitions dans une bonne équipe de Wolfsburg dont il est le capitaine. A priori il part pour être un remplaçant prêt à suppléer l’un des trois milieux récupérateurs. Avec des chances qu’on ne le remarque pas même s’il joue.

Ramires. Benfica

Poète dans l’âme, Ramires nous gratifie ça et là de tacles très appuyés en forme d’alexandrins et d’une présence physique qu’on qualifiera de marquée. Mais c’est bien plus que ça. Rapide, technique, endurant et possédant une frappe de balle terrible, le milieu de terrain peut à la fois attaquer et défendre. Même si Dunga mise sur l’expérience, et qu’il a été récemment dépassé par Elano dans la hiérarchie, il pourrait tout aussi bien coiffer au poteau Felipe Melo pour une place de titulaire qu’il a toujours assumé avec brio.

Julio Baptista. AS Roma

On ne change pas un groupe qui gagne, que ses membres y soient pour quelque chose ou non. C’est un adage qui peut s’appliquer à plusieurs joueurs, et Baptista est de ceux-là. Sans minimiser son importance, on peut difficilement le mettre au même niveau que les titulaires. Pas régulier en club, il n’a jamais montré qu’il avait l’étoffe d’un titulaire. Surtout, aucun poste ne semble vraiment lui correspondre. Pas assez bon récupérateur, malgré une formation à ce poste au milieu de terrain, il ne peut réellement jouer qu’à la place de Kaka. Avec évidemment un rendement bien moindre.

Kleberson. Flamengo

Convoqué régulièrement par Dunga depuis un an, il sortait avant ça d’une longue période de trou en équipe nationale après une excellente Coupe du Monde 2002 où il en avait surpris plus d’un. Plus que décevant en Europe, il brille au Brésil où il est un relayeur reconnu et respecté. La donne a pourtant changé depuis le début de l’année civile car il a été poussé sur le banc à Flamengo, la faute à une série de performances désastreuses. Pas grave pour Dunga, qui l’emmène cependant plus pour son expérience de champion du monde que pour son niveau de jeu réel. Loin d’avoir des chances de jouer, il est le joueur le plus contesté de la liste.

Attaquants :

Luis Fabiano. FC Séville

Ce n’est pas Ronaldo, ce n’est pas Romario non plus, mais Fabiano est un attaquant de très haut niveau. Dans une sphère footballistique qui a tendance à juger soit sur le nom et la réputation, soit sur un potentiel naît de on-dit entendus ça et là, les attaquants réguliers mais arrivés plus tard à maturation sont parfois déconsidérés. C’est le cas de Luis Fabiano, attaquant rapide et hyper efficace. Deuxième buteur de la zone Amsud en qualifications, il marque deux buts en finale de la dernière Coupe des Confédérations dont il termine meilleur buteur. Dans la meilleure période de sa carrière, il dispose d’une chance unique de marquer l’histoire, et a tout en main pour le faire.

Robinho. Santos

Il a beau avoir un parcours chaotique, il n’en reste pas moins un joueur de génie. Surtout, peu importe qu’il brille en club ou qu’il cire le banc, il a la confiance de Dunga. Avec ses 75 capes au compteur, il est déjà l’un de ceux qui connait le mieux les exigences des joutes internationales. Constant sous le maillot auriverde, il est l’élément imprévisible de la sélection, celui qui peut se permettre de dézoner ou se faire oublier sur son côté gauche pour mieux surprendre. Qu’on se le dise, épanoui et dans un contexte favorable, Robinho est toujours capable d’exploits.

Nilmar. Villarreal

Majestueux avec le grand Internacional qui a dominé le championnat brésilien durant deux saisons, il a décidé de retenter sa chance en Europe, chez le sous-marin jaune, malgré des offres de clubs plus prestigieux. Loin d’être le Messie attendu, il a fait une saison correcte, mais assez éloignée de ses standards des années précédentes, même s’il a fini assez fort. Sauf que Nilmar est un joueur qui marque énormément avec la Seleçao. C’est bien simple, lui qui rentre souvent pour les vingt dernières minutes réussit presque à chaque fois à trouver le chemin des filets. Doublure de Fabiano en pointe, il a le profil d’un Güiza 2008, un temps de jeu réduit mais rentabilisé au maximum. Et comme le bonhomme a du talent à revendre, les défenses risquent de souffrir lors des rentrées du super-sub auriverde.

Grafite. Wolfsburg

Les trois premiers noms étant acquis depuis plusieurs mois, l’incertitude portait sur l’identité du dernier attaquant qui ferait le voyage. Pour comprendre la présence de l’ancien manceau dans la liste, il faut se replacer dans un contexte de vie de groupe autour du rôle du quatrième attaquant. Et penser à ceux avec qui il était en concurrence. Ronaldinho, qui d’ailleurs n’est pas un attaquant de pointe, et Pato n’ont jamais été cités par la presse brésilienne ou Dunga comme potentiels mondialistes. Le favori était Adriano, de nouveau efficace avec Flamengo. Sauf qu’à choisir, Dunga a préféré prendre un joueur qui noie ses peines dans l’entraînement plutôt que dans l’alcool, qui a une mentalité irréprochable et qui pèse un poids normal. Comme Edilson en 2002, il sera peut-être lui aussi champion du monde.

La tactique :

Le graphique est explicite, il est assez délicat de classer le dispositif tactique dans une catégorie précise. Au choix, on peut soit l’envisager en 4-2-3-1 avec deux récupérateurs et trois animateurs, ou en 4-4-2 avec quatre milieux de terrain en diamant, et deux attaquants. Clairement, l’essentiel n’est pas là. Du reste, le schéma reflète une situation théorique qui part d’un postulat improbable, celui selon lequel personne n’attaquerait ou ne défendrait. Car, toute la force du système réside dans la capacité à s’adapter selon que l’on soit dans sa partie de terrain à défendre, ou dans la partie de terrain adverse à attaquer.

Il faut analyser le rôle de chaque joueur selon les phases de jeu. Il faut bien envisager le mot joueur et non le mot poste, car, à l’exception notable de la lutte entre Elano et Ramires, les autres joueurs sont fixés à une place depuis plus d’un an. Autant dire que le dispositif est adapté aux qualités de chacun, raison pour laquelle des joueurs plus talentueux mais sans expérience dans un tel dispositif n’ont pas été appelés. En phase de repli défensif, le bloc se resserre. Concrètement ce n’est pas très compliqué à imaginer ni superbement inventif, les lignes sont ultra rapprochées avec seuls les deux attaquants prêts à partir en contre, Kaka se tenant juste en retrait pour mener une offensive rapide. Lors des offensives, on glisse dans une sorte de 3-5-2, avec forcément des échanges de postes. Les deux latéraux, et leurs remplaçants, sont très offensifs et doivent posséder des qualités d’ailiers. Pas question de débordements ça et là, on parle de véritables places fixes le long de chaque ligne de touche à une quarantaine de mètres des buts adverses, avec la possibilité à tout moment de prendre un couloir dont ils sont les seuls maîtres. Pour compenser ces montées, Gilberto glisse sur le côté droit d’une défense qui se resserre autour de Lucio dans l’axe. Melo joue un rôle de milieu central le plus en retrait de l’offensive, qui organise, donne le tempo, et tue dans l’œuf les débuts de contre-attaque. La moindre perte de balle de sa part amène inévitablement une occasion de l’équipe en face. Elano est le joueur qui a la plus grande amplitude entre phase défensive et phase offensive dans son jeu avec le ballon, et celui qui fait le plus de fois l’aller-retour. Comme on le voit sur les différents graphiques, il est toujours sur le chemin entre Maicon et Kaka ainsi qu’entre le récupérateur et Luis Fabiano l’attaquant de pointe. Pour que le jeu soit fluide, il doit toujours évoluer en même temps que le fameux bloc équipe, sans quoi le Brésil serait coupé en deux, Melo devant monter trop haut ou Kaka descendre trop bas. Sur son côté, Robinho joue dans une position très libre qui le rend totalement imprévisible. C’est une des clés de la réussite brésilienne, laisser un joueur offensif créatif et imprévisible, un artiste, se balader sur son côté. Pouvant jouer ailier ou attaquant, le joueur de City est l’élément qui donne la vie à un dispositif bien huilé qui serait sans ça morne et un peu prévisible.

Vainqueur du tournoi en jouant bien, le Brésil l’a aussi été en étant discipliné. Et comme il est plus facile d’apprendre la discipline à des joueurs talentueux que d’apprendre le talent à des joueurs disciplinés, ça marche. Aimant avoir la balle et transpercer les défenses avec des centres et décalages, le Brésil est redoutable en contre et possède de très bons frappeurs. Dunga a réussi le tour de force de se façonner une équipe à son image, trouvant une formule et sélectionnant les joueurs qui peuvent y évoluer. Difficile de trouver la moindre faille tactique pour la Seleçao version 2010. Les esprits chagrins regretteront une discipline militaire qui limite la folie et l’initiative individuelle à une fonction utilitariste au service du résultats. A la solution du beau jeu qui peut gagner, Dunga a choisi la solution du jeu qui gagne. Non sans offrir quelques coups d’éclats.

Les attentes :

Placé dans le mal-nommé groupe de la mort, le Brésil a le calendrier pour lui, avec un premier match a priori aisé contre la Corée du Nord, qui lui permettra d’aborder les confrontations contre ses deux plus grands adversaires avec un classement décanté. Quand on dit Brésil, on pense victoire. Dès lors, tout autre résultat qu’une victoire finale serait vécu comme un échec au pays de la samba. Les véritables attentes des supporters et journalistes brésiliens sont ailleurs. Oui, il faut gagner. Même pas besoin de le préciser, c’est sous-entendu dans le nom de la sélection. Mais il faut gagner bien. Gagner beau. Pas nécessairement avec panache, mais en maintenant en vie une certaine tradition, une certaine vision du football. Reproduire 1970 est utopique, mais le peuple se sent quelque peu trahi, sent qu’on joue avec l’histoire footballistique du pays. L’imaginaire collectif lié au Brésil reste intact pour une partie du grand public international, mais commence à perdre de son romantisme. Et Dunga n’y est pas étranger. La plus grande critique concerne son choix de ne pas sélectionner de joueurs du championnat local, hormis Kleberson et Gilberto Melo, justement les deux joueurs les plus critiqués de la liste. Il y a bien Robinho, mais il est plus considéré de passage qu’autre chose. Pour ça, plus grand-chose à faire, la liste est entérinée. En ce qui concerne le style de jeu, là aussi, ça paraît compris. On ne fait pas de soldats des danseurs de claquettes en un jour, surtout quand on a une guerre à gagner et qu’on reste sur des campagnes victorieuses. Composée d’un sélectionneur qui sait gagner et qui a transmis cette culture de la gagne à ses troupes, ce Brésil a des allures de favori et de vainqueur potentiel. En Afrique du Sud, Dunga n’écrirait à cette occasion peut-être pas la belle histoire, la grande, celle qui fait la légende, mais il aurait alors tout gagné.

Radek.

2 thoughts on “Les Présentations : Le Brésil

  1. Mon rôle est de souligner l’admiration que Dunga voue à la Bundesliga. En tant que joueur il a évolué sous les couleurs du VfB Stuttgart. Son gout imodéré pour ce merveilleux championnat explique en grande partie les sélections de Josué et Grafite. Avec à sa tête un homme qui connait aussi bien le foot, le Brésil est indéniablement le favori de l’épreuve.

    PS : une nouvelle fois une superbe présentation

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