Si vous avez manqué le premier chapitre, c’est par ici
Sinon, ben vous pouvez lire librement la suite. Remarquez vous pouvez aussi lire la suite sans avoir lu le début, mais vous n’allez pas tout comprendre…

Il court à en perdre haleine, regardant par dessus son épaule. Il s’arrête et repart dans l’autre sens pour tenter de semer son poursuivant. Celui-ci, surpris, veut à son tour changer de direction mais glisse sur la pelouse et chute. Un coup de sifflet retentit. Il aide son partenaire à se relever en lui tendant la main.

–       Pourquoi on fait une pause maintenant, en plein milieu d’une action ?
–       Regarde, les flics sont là.

Il lui montre du doigt les deux hommes venant d’arriver sur le bord du terrain, forçant l’entraîneur à siffler l’interruption de l’entraînement, et à se diriger vers la touche.

–       Bonjour monsieur Bassine, comment vous portez-vous aujourd’hui ?
–       Commissaire, ça faisait longtemps. Enfin, vous étiez là avant-hier quoi.
–       Oui, enfin, ce n’est pas pour aller cueillir les pissenlits, vous le savez. Je fais mon métier voilà tout.
–       Je vous écoute.
–       Il faudrait que l’on parle à votre Croate.
–       Chokapic ?
–       Oui. Appelez-le je vous prie.

Douglas Bassine s’exécute et s’avance de quelques mètres sur le terrain. Mettant ses mains en porte-voix, il appelle Nemanja Chokapic, défenseur croate connu dans le monde du football pour ses tacles rugueux et ses invectives effrayantes à l’encontre des ses adversaires. Fuyant la dictature terrible du général Koursipik, il était arrivé ici à l’âge de quinze ans sur un radeau de fortune, fait de troncs d’arbres vermoulus et de ficelles rongées par les rats habitants la cave de la ferme parentale. Il avait été recueilli sur la plage par Dexter Sandalette, qui était devenu par la suite son agent. Il avait très vite développé des aptitudes impressionnantes qui lui avaient permis d’entrer dans un centre de formation. Il était devenu professionnel la saison d’après, puis, repéré par des recruteurs, avait rejoint le club entraîné par Douglas Bassine, qui visait désormais la première place du championnat.

À l’appel de son nom, Chokapik s’avance au devant du commissaire Chlorophylle et du capitaine Robinet, le regard noir et la mine basse, les chaussettes rabattues sur les chevilles, laissant apparaître des protège-tibias rouges et blancs. Il leur tend sa grande main sans esquisser le moindre sourire. Le capitaine, qui lui rend au moins deux têtes, se sent comme écrasé, poussin enveloppé par les ailes immense de l’albatros.

–       Quoi vouloir vous encore ?
–       Bonjour, monsieur Chokapic. Nous avons encore quelques questions au sujet de votre alibi.
–       J’ai déjà dire tout. Pourquoi encore ?
–       Il vaudrait mieux que nous allions discuter un peu plus loin, je vous prie.
–       Pourquoi faire ? Être suspect ?
–       Écoutez. Je répondrai à toutes vos questions, enfin, si je les comprends. Mais je le ferai une fois que nous serons un peu plus isolés. Entre nous, quoi. Vous comprenez ?

Alors qu’il pose sa main sur la large épaule du Croate, celui-ci a un brusque mouvement de recul. Il fait maintenant face aux deux policiers, les poings serrés. Bassine, qui s’est rapproché pendant la discussion, appelle doucement le nom de Chokapic, comme pour l’exhorter à ne pas faire une chose qu’il pourrait immédiatement regretter. En effet, pendant que le géant se mettait en position de combat, les deux policiers ont porté leur main droite à l’étui contenant leur arme de service.

–       Nemanja, ne fais pas le con. Suis-les.
–       Désolé coach, pas pouvoir.

À ces mots, Chokapic s’élance droit sur Chlorophylle et Robinet, les renverse sans leur laisser le temps de sortir leur arme et part à toute vitesse vers la sortie du centre d’entraînement. Retrouvant leurs esprits, le commissaire et son équipier partent à sa poursuite, le revolver au poing, hurlant à chaque pas pour que Chokapic stoppe sa course. Mais lutter contre un athlète de haut niveau quant on est un quadragénaire rouillé à l’hygiène de vie plus que douteuse est un combat perdu d’avance. Robinet s’en tire mieux, mais malgré ses vingt-six ans flamboyants, il perd du terrain. Chlorophylle a lui abandonné depuis plus de cinquante mètres et, le souffle coupé, s’appuie péniblement sur ses genoux, à la limite de l’évanouissement. Crachant ses poumons depuis plus de deux minutes, il entend soudain un coup de feu.

–       Logan ! Qu’est-ce qui se passe bon sang ? Logan ! Logan !

N’entendant aucune réponse, il décide de se relever et de recommencer à courir. Mais, à peine le premier pied posé qu’une douleur fulgurante se fait sentir en bas de sa poitrine, l’obligeant à se courber en deux pour continuer à avancer. Il parvient tant bien que mal au niveau de l’entrée du centre d’entraînement, bordée par les arbres et les bâtiments, formant ainsi une petite place semblable à celle d’un petit village dont Chlorophylle avait oublié le nom mais qui l’avait marqué dans sa jeunesse lorsqu’il partait en vacances avec ses amis et sa fiancée de l’époque, Miley. C’est d’ailleurs à elle qu’il pense lorqu’il arrive sur cette petite place. De manière étrange, il ne voit pas le capitaine Robinet, agenouillé près du corps encore fumant de Chokapic. Non, il pense à Miley en regardant le ciel, il imagine à nouveau cette place dans ce village au nom oublié, où ils avaient choisi la terrasse d’un café pour ses vieilles chaises en fer forgé blanc à la peinture écaillée, étendant leurs jambes sous la table, profitant du soleil. Il tenait la main de Miley, souriait aux blagues de ses amis, et se délectait de ce bonheur dans lequel sa vie entière se mouvait avec une parfaite facilité. Il regardait Miley lorsqu’elle lui mit une gifle. Il ne comprenait pas, elle l’appelait commissaire et lui remettait des claques encore et encore.

Mais la réalité est tout autre,  car ce n’est pas Miley qui lui met des claques, mais Logan Robinet, son adjoint. Il se relève péniblement et tente de se remettre de ses émotions. Tout lui revient alors : Chokapic, la course-poursuite, le coup de feu. Il regarde alors Robinet.

–       Mais bon sang, qu’est ce qui s’est passé ? Qu’est ce que vous avez foutu ?
–       Je ne comprends pas commissaire … je … il … c’est du délire.
–       Mais il n’était même pas armé. Qu’est ce que vous avez bien pu foutre pour lui mettre une balle dans la tête ?
–       Mais commissaire …
–       Quoi ?
–       Ce n’est pas moi qui ai tiré.

 A suivre…

Fred Viagras

6 thoughts on “Le meurtrier est dans le 11 de départ : épisode 2

  1. Putain. Continue ! C’est trop bon ! On le fait lire par les ex vierges le soir au coin du feu et on se régale.

  2. J’ai 3 chapitres à rattraper et dieu que c’est bon … si t’en fais un livre, je l’offrirai à mes potes.

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