OM-Feyenoord (0-0), La Canebière académie trahit.

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Ça valait bien la peine.

Aïoli les sapiens,

C’était une de ces soirées au parfum d’histoire. Elle faisait d’abord resurgir, celle, tragique, du 5 mai. Demi-finale de coupe d’Europe, elle convoquait les souvenirs des buts de Didier Drogba, de la folie d’un Marseille-Leipzig, pour ne citer que les plus récents. C’était l’une de ces soirées où, quoi qu’il arrive, on se sentait ensemble, revivant les moments d’émotion passés en regardant les jeunes générations prendre leur tour. Pour certains enfants c’était la première fois au stade, pour d’autres, la première permission de se coucher tard une veille d‘école. C’est dans ces moments que s’entretient une identité, dans ces émotions inoubliables que constituent la joie d’une victoire ou le traumatisme d’une élimination aux portes de la finale. Mais pas cette fois. Pas avec cette reddition sans combattre, ces 95 minutes filant sous un faux-rythme, quand l’illusion de maîtrise masque la peur de tenter, bref, pas devant une telle trahison.


Les enfants devant la télé se sont couchés, heureux d’avoir gratté deux heures de canapé supplémentaires. Ceux du stade auront plus de mal à dormir, marqués à jamais par un public qui, lui, était à la hauteur et qui sait ce qu’être Olympien signifie. Jorge Fuera passera une mauvaise nuit et maudira la sortie sur blessure de Payet, oubliant que la navrante capitulation de ce soir n’est que l’épilogue, prévisible, de cette peur insupportable qui le dressait debout sur les freins alors que toute la ville encensait l’équipe flamboyante et bordélique du début de saison. Perdre une demi-finale européenne est admissible, la perdre en jouant comme si l’objectif était d’obtenir un 0-0 contre Clermont représente un crime contre le club. Entre deux cartons de déménagement à ficeler, il restera trois semaines à assurer un podium d’utilité uniquement budgétaire (puisque nous n’avons de toute façon rien à faire au haut niveau européen). Une fin navrante pour une saison qui avait pourtant vu resurgir les espoirs de beau jeu, à défaut de victoire.

Tout ça pour ça.


Les Longorious Basterds

Mandanda
Saliba – Kamara – Luan Peres
Rongier – Guendouzi– Gueye (Lirola, 46 e) – Gerson
Harit (Ünder, 80e) – Payet (Milik, 33e) – Dieng (Bakambu, 61 e)


Tirant les conséquences des errements du match aller, Jorge Fuera propose une défense à trois, dans laquelle Kamara est préféré à Caleta-Car. Rongier et Gerson font office de milieutéraux, tandis que Gueye prend place en sentinelle. Devant, Harit et Dieng sont préférés à Milik et Ünder.


Le match

L’OM domine le début de match, mais d’une manière qui fait rapidement craindre le pire : la possession pour la possession, la crainte de prendre un but fatal qui l’emporte sur l’envie d’insuffler à ce match la même folie qu’à l’aller, bref 90 inéluctables minutes d’inspecteurderrickball aux occasions trop rares pour ne pas exiger d’être pleinement exploitées. On s’attendait à un match de furieux où la lucidité aux moments-clés ferait la différence, mais notre traître et pleutre d’entraîneur a cru voir le Ronquiquant derrière le 3-2 du match aller et croit pertinent de fermer la rencontre, pour se barricader derrière ses statistiques de possession.

Il faut ainsi attendre la vingtième minute pour voir Rongier sortir la balle d’un fort joli dribble, voir celle-ci circuler d’Harit à Guendouzi pour échoir finalement à Payet qui, dans la surface, crochète et place un enroulé au-dessus du but. Dimitri n’a pas le loisir de se rattraper de ce raté, puisqu’il doit sortir blessé dès la demi-heure de jeu, les muscles explosés après avoir levé la jambe comme au Crazy Horse. Comme contre l’Atletico, notre meneur de jeu sort dès la 32e minute.


Ce coup du sort change les plans de Sampaoli, qui fait alors entrer Milik en pointe, Gerson et surtout Harit se voyant confier les clés du jeu. Arkadiusz nous montre toute sa faim de buts à la réception de deux centres de Gerson, mobilisant tout son gainage abdominal pour dominer son défenseur et adresser deux passes de la tête dans les bras du gardien. Entre temps, le Feyenoord connaît son seul temps fort en fin de première période, provoquant plusieurs tirs contrés moyennement slipométriques.

A la pause, Jorge Fuera sort Gueye pour Lirola, permettant à Rongier de monter d’un cran. Notre jeu est toujours aussi immonde, l’absence d’intensité et de prise de risque se doublant d’erreurs techniques qui donneraient des nausées à Clinton Njie. Feyenoord assure pourtant le service minimum et se montre particulièrement généreux en fautes de débiles aux abords de la surface. Pourtant, les Olympiens ne parviennent pas à changer de rythme, à moins qu’ils n’en aient tout simplement pas l’intention tant il leur suffit d’avoir la MAÎTRISE du ballon. Une très jolie combinaison Lirola-Rongier-Harit envoie l’un de nos joueurs finir l’action du gauche, l’ennui étant que ledit préposé à la finition s’avère justement être Valentin (pas besoin de vous faire un dessin). Milik, lui, est quasiment introuvable à force de ne pas faire d’appel et, lorsqu’il finit par hériter du ballon à la suite d’un cafouillage, c’est pour friser la faute lourde avec un contrôle si abominable qu’on en vient à se demander s’il ne l’a pas fait exprès.

Le chronomètre défile et l’OM ne fait rien si ce n’est s’agacer, un énervement qui lui vaut des pertes de balles encore plus affligeantes. Un nouveau rebond foireux sur corner place Lirola en position de tir, dévié de justesse. Les situations les plus dangereuses sont finalement provoquées par les contre-attaques néerlandaises, avortées par deux magnifiques interventions de Luan Peres puis Kamara. C’est tout juste si nous ne reprochons pas à nos défenseurs d’avoir évité ce but qui aurait abrégé nos souffrances, tant avec une telle équipe de chancres mous, l’élimination paraissait de toute façon inéluctable dès la mi-temps. C’est donc une nouvelle désillusion qui nous est offerte au travers de cette performance de purs salopards sans âme : après une Coupe de France perdue lamentablement à la première marche un peu plus haute que l’Entente sportive Cannet-Rocheville ou l’Union sportive Chauvigny, notre campagne de repêchage européen se résumera donc à des victoires contre Qarabag, Bâle et le PAOK Salonique. De même qu’en championnat de France, nous faisons face à une incapacité notoire à battre de prétendus gros, d’ailleurs de moins en moins gros au fil des saisons. Que les dispositions de couille molle de notre entraîneur ne fassent rien pour, c’est une chose, que nos joueurs n’aient pas la fierté de s’en affranchir, ça les regarde. Mais à la place de Pablo Longoria, on ne peut que constater avec effarement ces tendances lourdes qui perdurent malgré les changements d’entraîneurs et de joueurs, ce manque de dépassement de soi et d’ambition, ces excuses invoquées en permanence pour justifier d’approcher parfois sans parvenir jamais, cette glissade qui ravale bien plus vite qu’on ne le pense de grands clubs au rang de vieille gloires racornies.


Les joueurs

Mandanda (3/5) : Efficace en contre-attaque, déprimé quand il franchit la ligne médiane à la 95e et constater qu’il y a encore quatre coéquipiers sur la même ligne que lui.

Rongier (4-/5) : Court, perd la balle, court deux fois plus pour la récupérer, va vers l’avant, de la première à la 95e minute. Tout n’était pas parfait mais bordel, ça c’est un engagement au niveau d’une demi-finale européenne.

Saliba (3/5) : Pas trop d’erreurs, ou en tout cas bien rattrapées. Mais en demi-finale européenne, je n’échangerais pas contre tout un baril de William Saliba une seule reprise de Rolando sur corner.

Kamara (3+/5) : Comme William, il contribue efficacement à notre solidité défensive du soir, moins à notre jeu. Son tacle magnifique du temps additionnel est à saluer, surtout de la part des rares parieurs à avoir misé sur un 0-0 au vu du match aller.

Luan Peres (4/5) : Eh bien ma foi, c’est la bonne surprise du soir : rien qui dépasse, des relances propres, et de bons gros tacles de patron. Et tout ça, bien sûr, pour un résultat collectif absolument nul, vu que nous sommes infoutus de jouer à haut niveau tous en même temps.

Gueye (2/5) : Depuis le temps qu’on vous dit qu’il faut que Marseille soit une nation indépendante. Pape, tu lui mets un drapeau, un hymne, un appel du maire avant et après le match et là, paf, patriotisme, il te claque un titre de champion d’Afrique. Là c’était tout de même une demi-finale européenne, mais sans l’apparat nécessaire ça ne marche pas : Pape l’a jouée comme on fait ses devoirs de CM1 avant d’aller trier ses Pokemon.

Lirola (46e, 1/5) : Il devrait essayer de réussir un contrôle de temps en temps, sinon les stadiers vont finir par plaquer en le confondant avec un type qui envahit le terrain.

Guendouzi (2/5) : Il y avait tout : l’engagement physique, le vice pour obtenir des fautes en foutant bien la merde au passage, bref tout le nécessaire pour une rencontre de coupe d’Europe. A part peut-être des passes réussies, mais bon, il paraît qu’on est trop exigeants avec notre club.

Gerson (2/5) : Excentré tout le match par Jorge Fuera, des fois qu’il ait eu l’idée saugrenue de se projeter dans la surface.

Harit (1/5) : Tellement peu d’idées, qu’il ne lui manquait plus que de s’envoyer sa belle-mère pour ressembler tout à fait à Raphaël Enthoven.

Ünder (80e) : « Doucement les gars, on maîtrise, on a la possession, comme on a dit toute la semaine, il faut de la patience, pas trop vite, surtout on prend pas de but, on s’enflamme pas, on attend, on fait tourner, douuuuucement, surtout pas prendre de contre-attaque, pas de risque, on a le tempsALLEZ IL RESTE QUE DIX MINUTES, A TOI D’ENTRER CENGIZ, FAUT QUE TU METTES DE LA FOLIE OH EH QU’EST-CE QUE T’ATTENDS ON EST MENES LA, DEPECHE TOIIIIII OOOOOHmierda, perdido, écoutez, nous n’avons pas fait un mauvais match, je crois que la sortie de Payet a été un tournant, nous n’avons pas été récompensés de nos efforts. »

Payet (2/5) : Ya des jours où ça fait enroulé en lucarne et adulation des spectateurs, des jours mais pas ce soir, ce soir c’était occasion au-dessus et blessure musculaire.

Milik (33e, 1-/5) : Jacques-Henri Eyraud serait capable de monter un dossier de faute lourde rien qu’avec les images de son match. Au moins, Mitroglou, on était certains qu’il ne faisait pas exprès de saboter nos chances.

Dieng (1/5) : A trouvé un moyen définitif de ne plus rater d’occasion.

Bakambu (61e, 1/5) : S’il était resté à Pékin, il serait en ce moment confiné dans une bulle de 20 mètres carrés sans chiottes. C’est-à-dire à peu près l’espace qu’il a couvert ce soir, sauf que nous, pendant ce temps on le paie.


L’invité zoologique : Lutsharel Geertruite

La truite est avant tout un animal célèbre pour avoir donné son nom au lied op.32 D.550 de Franz Schubert, qui en reprend le motif dans son Quintette en la majeur D.667. La Truite représente une pièce majeure du répertoire, dont le classicisme n’empêche pas une certaine innovation, si bien que sa postérité dépasse aujourd’hui largement le cercle des amateurs de musiques classique. Il s’agit également du thème musical utilisé par le lave-linge Samsung pour signaler la fin du cycle de lavage : la truite est donc bien l’invitée appropriée pour évoquer cet OM qui rend vulgaire tout ce qu’il approche.
Les autres : compacts, sérieux, solides, et totalement dépourvus eux aussi d’ambition offensive.
Coming next : le podium de la ligue 1 reste le seul enjeu de la saison, qui ne saurait compenser l’absence de trophées mais apporterait néanmoins un jolisourire à notre commissaire aux comptes. Nous disposons pour cela de trois points d’avance à préserver contre Lorient, Rennes, et Strasbourg, et après on pourra plier les sacs dans la frustration, comme une saison sur deux environ (l’autre saison sur deux, on la conclut dans la déprime).
Les réseaux : ton dromadaire préféré blatère sur Facebook, sur Instagram et sur Twitter. Anthony Ch. remporte le concours zoologique.


Bises massilianales,

Blaah.

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