France – Pérou (1-0) : L’Académie française est Incassable

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Et déjà qualifiée

On critique, on critique, mais avec tout ça, les Bleus sont déjà en huitièmes de finale de la Coupe du Monde. Une bonne chose de faite, mais il ne faut pas s’en contenter.

Deuxième match de poule de la France dans ce Mondial. Après une entame de compétition pour le moins laborieuse, les Bleus avaient besoin de se rassurer et de nous rassurer. Ce n’était évidemment pas flamboyant mais, ma foi, ne faisons pas la fine bouche.


La compo :


Deschamps revient (enfin) au 4-2-3-1, un système qui a fait ses preuves par le passé. Face à des équipes réputées plus faibles, ce schéma a le mérite d’assumer un certain déséquilibre vers l’avant, ce qui n’est pas sans déplaire au vu de l’effectif. Au vu de la compo par contre, il y a bien une interrogation qui se pose. Laquelle ? Pour les Mendeleïev-iens, pensez silicium ; pour les chimistes, pensez pH maximum ; pour les géographes, pensez Calvados. Evidemment, pour les footeux, les beaufs, pour ceux qui regardent des millionnaires courir derrière un ballon, pensez Cruyff.

Le derrière :

La Dèche reconduit Hernandez et Pavard sur les côtés. La charnière Umtatane est, elle aussi, à nouveau sur le pré. Gageons qu’elle saura rappeler aux spectateurs qu’elle est composée de deux titulaires dans deux des plus grands clubs du monde.

Le milieu :

Ce schéma implique le sacrifice d’un milieu, en l’occurrence Tolisso. Deschamps – personne – ne peut se passer de Kanté, le milieu récupérateur préféré de ton milieu récupérateur préféré (d’aucuns diront que c’est plus que ça, certes). Pioche Pogba détient de nouveau les clés du jeu. On espère un cambriolage bien sale, l’effraction de l’adversaire étant chaudement recommandée.

Le devant :

Giroud devant, Griezmann qui gravite derrière lui et tourne autour de lui. Un air de déjà-vu bienvenu. L’histoire d’amour a déjà fonctionné, pourquoi s’en priver ? Mbappé prend le côté droit.

L’ailier gauche :

Quand on vous dit « ailier gauche », vous pensez peut-être à Leroy Sané, ou à Sadio Mané ? Dorénavant, pensez Blaise Matuidé. Un joueur réputé pour sa vitesse, sa capacité de percussion, sa justesse technique, son élégance balle au pied et son esthétisme lors de l’exécution d’un plat du pied. (Je sais que l’idée était de bloquer le côté « fort » du Pérou mais putain, non quoi, juste non ! A la place de Lemar, je me mords les joyeuses jusqu’à en faire de la gomme à mâcher.)

Ailier gauche moderne (illustration)

Le match :

Une passe moisie dans l’axe au niveau de nos 30 mètres me met tout de suite dans le match. « Qui est le tocard qui a fait ça ? », dis-je dans des mots bien moins courtois. Il paraît que c’est un génie du ballon rond et de la pensée, comme Florent Balmont. Je m’incline.

Les Péruviens tiennent le ballon en ce début de match. Alors qu’un sud-américain tente de lober Lloris de loin, je m’aperçois que l’entraîneur adverse est un savant mélange entre Steven Tyler, Jean-Pierre François et l’adjoint de Rudi Garcia. Un cocktail qui, dans tous les cas, ne saurait être gagnant : si l’un est le père d’Arwen, l’autre est un chanteur raté et le dernier passe sa vie à critiquer alternativement l’arbitre, les lois du football et le réalisateur qui ne lui montre pas les images qu’il veut voir. On remarque assez rapidement que Mbappé fait des efforts au niveau défensif. Il essaye en tout cas. Dédé a dû lui recadrer sa mère après le premier match. « Recadre d’abord tes dents coach » aurait souhaité lui répondre Kylian, mais notre Descartes de Bondy a cogité et s’est abstenu.

Après un début de match moyen, les Bleus se font plus entreprenants. A la suite d’un ballon contré de Giroud, Griezmann se retrouve en bonne position mais dévisse complètement sa frappe.  Pogba, excentré et assez loin, envoie ensuite une frappe vicieuse qui passe de peu à côté. Sur un corner, Varane s’élève plus haut qu’Icare mais sa tête file, elle aussi, à côté. Giroud, en appui, remet de la tête vers Griezmann dont la demi-volée du pied droit arrive en plein sur le gardien péruvien. L’occasion pour Grégoire Margotton d’évoquer une frappe « trop parfaite » ; l’occasion pour nous de rappeler que cela n’a aucun sens (seules trois choses sont trop parfaites : Les Frères Karamazov, le sourire de Julia Roberts, et les pâtes au citron).

Mais au fait, comment va Big Sam depuis sa main d’handicapé – avec le respect, toujours – la semaine passée ? Apparemment, il a recouvré toutes ses capacités primaires : à peine effleuré, Samuel s’écroule. Génie. Le roulé-simulé, certifié lyonnais, agréé barcelonais. Grâce à lui, l’adversaire a pris un jaune. Un génie je vous dis. Si je ne donne pas de nouvelles de Matuidi, c’est que c’est apocalyptique : sa propension à courir partout pour être nulle part est toujours formidable.

Une belle combinaison sur notre droite suffit à provoquer la panique. Pris de vitesse, notre défense semble aussi sereine que Nathalie Kosciusko Morizet dans la ligne 13. Le ballon arrive en plein centre de notre surface et, grâce à la réactivité d’huître d’un Umtiti à la ramasse, un Péruvien oblige Lloris à un bel arrêt. La demi-heure de jeu passée, les Français en mettent un peu plus. Pogba lance Mbappé par-dessus la défense. Kylian exécute une air talonnade retournée. L’intention esthétique et technique valait le 10 de Nadia Comaneci, la réalisation ressemblait aux tentatives incessantes de ciseaux acrobatiques de Lucas Ocampos. Heureusement, Pogba est dans un bon jour. Il remet la petite soeur, mais pour Giroud cette fois-ci. La frappe du bel homme est contrée, passe le gardien et est reprise vers le but vide par Mbappé qui a suivi (1-0, 35e).

 Sereine quand il n’y a personne autour d’elle pour l’embêter, si ce n’est des gens de son équipe : NKM est vraiment à l’image de la défense de l’équipe de France. #NKM2022.

Cette ouverture du score va-t-elle automatiquement faire passer les Bleus « en mode contre » ? En tout cas, sur un ballon récupéré, Pavard lance Pogba sur la droite, qui transmet à Mbappé. Kylian remet vers le centre à Griezmann qui, en une touche, décale Giroud arrivé lancé. Il manque quelques centimètres à Oliv’ pour prendre le ballon avant le gardien. Alors que Mbappé est toujours très actif, Frédéric Parlpouriendyr observe que « le jeu penche plus à droite » pour les Bleus. No shit Sherlock. Avec Matuidi à gauche et Mbappé à droite, l’inverse eût été inquiétant. Une très belle action construite (comme quoi, tout arrive) partie de la droite et passée par les pieds de Mbappé, Kanté, Griezmann et Hernandez ponctue une fin de première période animée et de belle facture côté français.

Le jeu reprend sans que l’on soit trop inquiets, ni vraiment rassurés. Tombé il y a déjà plus de 30 minutes, Big Sam se dit qu’il est temps de remettre ça. Bon, ce coup-ci, il s’est pris une vilaine béquille. Mais quand même, quelle chochotte. En réalité, il cherche simplement à se fondre dans la mentalité de l’équipe de France en ce début de seconde période. Quasiment tous les Bleus sont dans leur camp, le pressing sur le porteur est inexistant. On est en mode navigation, on suit le ballon. Vous savez ce que dit le proverbe : « refuser le jeu face aux Péruviens, c’est pas bien ».

Et la sanction est proche : sur un ballon mis en retrait de notre surface, une lourde frappe est déclenchée et s’écrase sur l’équerre, à l’instar d’une météorite en Egypte. Pris par le pressing péruvien et une intensité bien plus importante, les Bleus souffrent. « Quelle chance d’avoir cette magnifique machine à laver que Kante ! » s’exclame l’inénarrable Grégoire Saladoton (si si, il l’a dit).

Pour une lessiveuse qui s’attaque à toutes les tâches, y’a encore beaucoup trop de couleurs sur cette photo.

On subit, on subit, mais ce n’est pas non plus Fort Alamo. Lloris n’a quasiment rien à faire en vérité. La défense s’en sort pas trop mal d’une manière générale. C’est pas que c’est rassurant, mais y’a déjà eu un poteau, et avec l’entité génitale féminine à disposition de Deschamps, je les vois pas marquer ces Péruviens. La partie s’endort un peu. On ne cherche pas tellement à mettre le deuxième. Sur son côté gauche, Matuidi, galérien du soir, a systématiquement 25 mètres de retard sur son adversaire direct. Il a beau tout donner pour rattraper ce retard à coups de courses désarticulées, rien n’y fait. Il part de tellement loin faut dire. La fin de match voit les Péruviens tout donner et les Bleus résister assez sereinement. Pas de second but en contre non plus, malgré quelques situations. Rideau.

Le débrief :

Un match moins laborieux que face à l’Australie, avec quelques belles séquences, des schémas offensifs clairement identifiables à plusieurs reprises, une implication défensive globalement retrouvée malgré quelques relâchements… Evidemment que c’est perfectible, mais ce n’est pas après 6 ans à chevaucher un âne qu’on en fait un cheval de course (demandez à Julie Gayet). Disons qu’à défaut d’un jeu collectif incroyable, on a au moins eu des mecs qui en voulaient, solidaires, parfois mordants.

On est qualifiés, et un match nul face au Danemark lors du prochain match suffira à assurer la première place. Vu la situation du groupe D avec qui on va croiser – allez tout de suite lire les académies des excellents Fernando Raiedansledos, Jens Salymonkhalsson et Haribo Ouest Coast –, la première place serait vraiment bienvenue. Les Croates font peur, l’Argentine est à la rue, l’Islande n’est pas une nation à prendre à la légère mais soyons sérieux tout de même, et le Nijartera.


Les notes :


Lloris (4/5) :

Comme face à l’Australie, il fait un arrêt décisif. Toutefois, ses relances au pied ont souvent été aussi propres que le Groupama Stadium après la finale de l’Europa League. Il semble revenir au niveau exactement quand il le faut.

Hernandez (4/5) :

Lucas joue au football, sport de contact, et il l’a bien compris : IL MET DES TAQUETS. Il n’a pas été impérial face à son adversaire direct, certes. Mais j’aime son agressivité voire son côté garce, et j’ai du mal à lui taper dessus, contrairement à lui avec sa compagne.

Umtiti (3/5) :

Se fait prendre sur l’occasion péruvienne en première mi-temps. Je ne mets pas de point bonus pour la simulation qui a accouché d’une sanction pour l’adversaire, c’est une action d’école pour lui. Il a eu le mérite de rentrer dans le lard des Péruviens, au physique.

Varane (3/5) :

De bonnes interventions, mais une pauvreté toujours aussi affligeante dans la relance : soit il est dans nos 30 mètres, lève la tête et donne à Umtiti/Pavard (SU-PER), soit il monte pour lancer le jeu mais là, il lève plus la tête et on dirait un con.

Pavard (2/5) :

Pas loin d’avoir encore moins le petit Benji. Deux matchs de suite qu’il me déçoit. Petit coup de barre, gros coup de pression ? Il a été à la rue une bonne partie du match. Il n’a pas posé ses roustons sur la table comme Hernandez, ni été incisif dans ses relances offensives.

Kanté (5/5) :

La machine à laver préférée des Français a lessivé des Péruviens toute la soirée. Kanté s’est aussi mué en chef d’orchestre par moment, plus proche d’un box-to-box que d’un simple rôle de gratteur de ballons. Ngolo, élu produit de l’année.

Pogba (4/5) :

Je m’incline devant la première période de Pogba, qui fut parfaite : des orientations simples et bien exécutées, des déviations bien senties, des offrandes pour Griezmann et Giroud… Une justesse moins présente en seconde période, avec plusieurs passes faciles ratées et quelques mauvais choix. Mais à ce niveau-là, c’est un grand oui. Remplacé par Nzonzi (non noté).

Matuidi (1/5) :

La débauche d’énergie est un prérequis en équipe de France, mais pour Blaisou ça vaut un point. A la ramasse complet, souvent en retard, malhabile techniquement… Pas aidé par son positionnement inhabituel, évidemment. Je critique souvent DD pour sa frilosité et son conservatisme tactique, mais si c’est pour tenter des trucs comme ça, abstiens-toi.

Mbappé (4/5) :

Marquer en Coupe du Monde, ce n’est pas rien, c’est sûr, même si ce n’était clairement pas le plus dur à mettre. Kylian a beaucoup provoqué et emmerdé la défense péruvienne. En revanche, il est toujours un peu perso et il s’est fait bouger physiquement. Muscle ton jeu Kylian. Bon point pour la volonté d’aider en défense. Remplacé par Dembélé (non noté), à qui DD a donné comme consigne : « cours tout droit pour attaquer et pour défendre, sur un malentendu, ça peut marcher ».

Griezmann (2/5) :

On l’a connu bien, bien, bien meilleur, malgré quelques occasions. J’ose espérer qu’Antoine se réserve pour les matchs à élimination directe (comme à l’Euro 2016 cela dit) parce que jusqu’ici, c’est pas la panacée. Remplacé par Fekir (non noté), dont l’entrée fut aussi quelconque qu’un village aveyronnais.

Giroud (4/5) :

Implacable, au propre comme au figuré. Un jeu en remise absolument parfait en première période, une réelle discipline tactique et une aide toujours précieuse sur les coups de pied arrêtés. A l’origine du but, soit dit en passant.

Le Mont Térubio est mort, vive Didier Décampe.

8 thoughts on “France – Pérou (1-0) : L’Académie française est Incassable

  1. Je te trouve dur sur Pavard. Je trouve que ces deux arrières étonnent positivement pour une entrée en matière ne pleine compétition. Un couple de latéraux est entré en EDF de cette manière, il s’agit de Liza et Thuram à l’Euro 96 en remplacement de Di Meco et Angloma. ON CONNAIT LA SUITE.

    Après sur la compo la meilleure, il ne manque as grand chose : paire de relayeurs (Matuidi-Kanté), Pogba devant entre 6 et 10 (comme à la juve), Griezmann en 10, Groud et Mbappé devant. Cela ne tient pas à grand chose, mais qu’elle a de la gueule cette équipe. Sur place ou à emporter plus tard.

    1. Pour des débuts oui, c’est clairement encourageant. Mais on est en Coupe du Monde, on devrait pas avoir deux novices titulaires.
      Et pour la meilleure compo, dans mon cas, elle n’inclut jamais Matuidi : Nzonzi en vrai 6, Kanté-Pogba devant lui, ou Kanté en 6 (moins sa place naturelle), Tolisso-Pogba devant lui.

    2. 4/5 a M’bappé qui pousse un ballon qui rentrait tout seul -_-, le reste du match à paumer des ballons en grigritant comme Pogba dans ses mauvais jours… acad de merde, le prochain coup je vais direct sur le site de l’équipe

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