Tunisie – Ghana (1-1, 5-4 aux tab) : L’Hariss Académie reprend un verre à La Fontaine

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Quatre matchs, quatre scores de parité…une place dans le grand huit africain… venez découvrir les secrets des Aigles de Carthage

Jean de La Fontaine est né un 8 juillet. Fabuliste de génie, il travaille aussi comme maître des eaux et des forêts. Une sorte de garde forestier ultime mais sans la baraque paumée au milieu des bois. Lors de ses tournées, il observe le comportement des animaux. Cela l’inspire pour écrire des fables. Il utilise l’anthropomorphisme (pas de panique on n’est plus sur un radeau à becter le cuissot du voisin…) : il met en scène des animaux avec des traits d’humains pour critiquer les Hommes. Membre de l’Académie française, il prend part à l’une des plus grandes polémiques littéraires de la fin du XVIIème siècle : la querelle des Anciens et des Modernes. Si ces derniers, menés par Charles Perrault, soutiennent l’innovation et la littérature moderne, La Fontaine se range du côté des Anciens. Il défend l’idée que la création littéraire doit se baser sur l’imitation des auteurs classiques de l’Antiquité, qui représentent l’excellence.

Pourquoi je vous abreuve d’informations sur La Fontaine ? Parce que notre bon Alain, en plus d’être une moitié d’homme, est décidément un sacré filou. Après un hommage au Radeau de La Méduse au tour précédent, il a décidé, en cette date symbolique, de récidiver sur ce match en célébrant l’un des poètes français les plus renommés de tout temps. Alain de La Fontaine est donc aussi né un 8 juillet, quelques 400 ans après son père spirituel.

Alain de La Fontaine Giresse et son bavoir

« Ne pas vendre la peau de l’écureuil avant de l’avoir tué »

Nous y voilà donc, le tournoi commence véritablement ici et maintenant. Gagner sa place parmi le grand huit africain. Et le respect qui découle de la Fontaine avec. Mais attention, à ce stade de la compétition, comme le démontre chaque tournoi international, il n’y a plus de petites équipes. Juste un gagnant et un couillon. Savoir rester sur ses gardes, pour ne pas se faire grignoter par un écureuil béninois comme nos voisins marocains. Aussi rusé qu’un Renard, Hervé n’a pas su insuffler à ses chats cette rage de vaincre quoi qu’il en coûte. « Tel est pris qu’y croyait prendre » comme nous l’enseignait l’illustre La Fontaine dans « Le Rat et l’Huître ».

Heureusement pour nous Alain « de La Fontaine » Giresse n’est pas né de la dernière pluie… Il sait où il veut aller et surtout comment y aller. Pas besoin de fanfaronner avec des joueurs qui s’affrontent dans des joutes européennes d’un tout autre niveau. Les Salah et autre Ziyech ne ramèneront pas la coupe à la maison (alleeez les bleus, allez…). Ici, en terre pyramidale, le talent ne suffit pas à faire la différence. De la sueur, de la sueur et encore plus de sueur. Regardez Madagascar, qui aurait parié un dinar sur leur présence dans le top huit africain, Jérémy Morel mis à part bien-sûr ? Evidemment savoir mêler le talent à la sueur reste l’idéal… nos voisins « one, two, three, viva l’Algérie » l’ont bien compris. Pas étonnant du coup de voir les plus connus Slimani et Delort relégués sur le banc par un bledard répondant au prénom douteux de Baghdad… Le type a 27 ans, joue à Doha, pèse 44 buts en 27 matchs et putain qu’est-ce qu’il cavale le fennec !! Tout ça Alain a eu le temps de l’observer depuis plusieurs CAN. Il ne sait pas gagner mais il sait comment ne pas perdre. La phase de groupe nous l’avait confirmé. Beaucoup jugeaient pourtant l’équipe tunisienne « handicapée » par le départ forcé de l’adjoint de Giresse, suite à des divergences de choix .Maintenant on attendait de voir quels « légumes » il allait nous servir en compo pour défier les favoris ghanéens. On était déjà dans l’erreur. Je vous l’ai dit pourtant. Y a pas de favori. Juste un gagnant et un couillon. Et on les a bien couillonnés.

Pendant ce temps là, Ziyech et Salah patientent à l’aéroport du Caire…

« Anciens contre Modernes »

La Fontaine dans sa fable « L’Aigle et l’Etoile de la Mer Noire» nous apprend à ne pas changer une recette qui marche, ça tombe bien la défense fonctionne plutôt pas mal : donc bis repetita avec Hassen en dernier rempart et le quatuor Kechrida/Bronn/Meriah/Haddadi pour déblayer le chantier.

Pour le reste, Alain de La Fontaine a sa propre interprétation de la même fable : « – On ne change pas une recette qui marche -, ok… mais moi je voulais des mecs qui cavalent donc j’ai changé, CQFD » déclarera-t-il en conférence de presse d’après-match. Libre interprétation des mots. Du coup à la surprise générale ni Sliti ni Khazri ne figure dans le onze de départ. En voyant ça, j’avoue lui avoir souhaité une fin chez Fort Boyard. Oui je sais, c’est cruel… mais d’une, Passe Partout n’est pas éternel, et de deux je pensais que le soleil égyptien lui avait fait péter un plomb. Alors autant l’envoyer dans un fort au milieu de la flotte, où des types habillés en collants se mettent des araignées dans le slip pour choper des clés, qui leurs servent à aller dans une cage où il y a des tigres. Mettre notre meilleur atout offensif sur le banc… mais va moisir dans le fort avec ton pote le Père Fouras, il te fera sentir d’où vient son nom. Bref comme quoi il faut toujours fermer sa gueule avant, toujours (pensée à Feu Thierry Roland qui a eu cette parole sage un certain 12 juillet 1998 en évoquant les détracteurs d’Aimé Jacquet).

 » Je vais commencer par te mettre trois doigts mon petit « 

Revenons-en à notre néo-fabuliste donc, Alain décide d’aligner Chaalali, Sassi et Skhiri au milieu et Msakni, Badri et Khenissi devant. Sur le papier ça ressemble à un 4-3-3, sur le terrain on est sur autre chose de beaucoup plus classique. La filiation La Fontaine est là à n’en pas douter. A une époque et dans une compétition où le modèle offensif répond au football moderne, où l’on prône l’innovation tactique, Giresse emmerde son monde. Lui, Jean ou Alain je m’y perds, se range du côté des Anciens. Il défend l’idée que la base du jeu doit être fondée sur l’imitation des entraineurs classiques français, qui représentent à son sens l’excellence… Jacquet, encore lui, avec son 4-5-1 en 1998, mais plus récemment Deschamps et Matuidi ailier gauche. Alain, comme Jean en son temps, souhaite défendre un modèle que l’on dit dépassé. Anciens contre Modernes on vous a dit. Dans la fable, « Le Vieil Hobbit et la Panthère Noire », la morale nous explique que « c’est dans les vieux pots qu’on fait la meilleure chorba », et là force est de constater que la recette de Giresse a bien fonctionné. Seul Khenissi occupait le front de l’attaque, cinq milieux placés derrière lui avec Badri et Msakni pour bloquer les couloirs. Une vraie équipe de chameaux. Chacun avait un rôle bien précis à remplir et chacun a répondu présent avec plus ou moins de réussite, mais ça les notes attribuées vous le révéleront mieux que n’importe quelle fable.


Les notes de nos chameaux :

HASSEN 2/5 : Pas de rafales de vent à signaler cette fois, et pourtant Hassen malgré quelques belles interventions a réussi l’impossible : se faire lober sur sa ligne. Encore un but gag encaissé. On en est à trois sur trois depuis le début de la compèt… pas besoin de chercher plus loin la chose à améliorer pour nos Aigles. On est loin du légendaire Boumnijel… on oublie pas tes survêts peau de pêche.

KECHRIDA 5/5 : « Plus les minutes passent sur le terrain et plus il déçoit »…commentaire d’après-match contre la Mauritanie, à priori Kechrida avait bien touché le fond, parce que là hamdoulillahh !! Que de remontées de balle de sa surface à celle de l’adversaire ! Et surtout impassable sur ce match !! Sa meilleure prestation depuis un moment, ponctuée par un centre décisif sur le but tunisien. Lâche rien l’ami, t’es en train de rendre fiers tes parents.

BRONN 4/5 : Papa Bronn enfin. A fait de ses compères de défense ses fistons, les hissant enfin à son niveau. Quant à son duel face aux attaquants guanéens, c’était « L’Ours et les Canards » : la seule fable gore et censurée de La Fontaine. Petit indice : on n’a pas retrouvé trace des canards.

MERIAH 4/5 : Après les portes ouvertes à Mikonos face à la Mauritanie, Meriah est resté en mode Grèce antique. Mais pour notre plus grand bonheur, il avait enfilé le costume de Leonidas dans 300 cette fois : AHOOOOUUUU AHOOOUUUUU AHOOOOUUUUU !!!

HADDADI 3/5 : Haddada a récupéré ses sabots et fourni une prestation de qualité. Moins en vue que son homologue de droite, il s’est quand même montré sérieux et appliqué. Après le dressage subi au dernier match, Haddada a repris les rênes et c’est déjà pas mal.

CHAALALI 5/5 : On a retrouvé notre maître du temps. Ce n’est pas une défaillance de votre téléviseur, n’essayez donc pas de régler l’image. Nous maîtrisons à présent toutes les transmissions. Nous contrôlons les horizontales…Et les verticales. Nous pouvons vous noyer sous un millier de chaînes. Ou dilater une simple image. Jusqu’à lui donner la clarté du cristal. Et même au-delà…Nous pouvons modeler votre vision. Et lui fournir tout ce que votre imagination peut concevoir. Pendant les deux heures qui viennent, nous contrôlons tout ce que vous allez voir et entendre. Nous partagerons les angoisses et les mystères qui gisent dans les plus profonds abysses. Au-delà du réel…en bref Chaalali a pris le contrôle des opérations, homme du match sans aucune hésitation.

SKHIRI 3/5 : Brave type, en cette journée hommage il a souhaité faire un nouveau signe à Loulou Nicolin. Après un premier tour passé au mieux à trottiner, il s’est remis à courir dans tous les sens et a fini par s’effondrer sur le terrain après 120 minutes de bonheur.

SASSI 4/5 : Pour son premier match titulaire, il a fait les choses bien. Sassimbolise bien l’état d’esprit collectif qui règne dans nos rangs. Auteur du penalty victorieux, Sassituation de joker de luxe  pourrait évoluer après sa très belle performance.

BADRI 2/5 : Aligné sur le côté droit il n’y arrive décidemment pas. Sa bonne volonté et son sens du sacrifice plaident malgré tout en sa faveur donc on ne lui en veut pas puisque la qualif’ est là. Allez un but en quart et ça rechargera ses Badri.

MSAKNI 3/5 : Encore un vrai match de capitaine pour notre artiste. Exemplaire à tous les niveaux, on l’a rarement vu si impliqué dans les tâches défensives. Ne manque plus qu’à rajouter l’efficacité offensive à sa panoplie et on retrouvera le Msakni que l’on aurait aimé ne jamais perdre. En espérant que sa sortie sur blessure ne l’empêche pas d’être aligné en quart.

KHENISSI 4/5 : Enfin récompensé de tous ses efforts avec l’ouverture du score. Fidèle à lui-même, il n’a eu de cesse de proposer des solutions en attaque en multipliant les appels. Bon ok il est limité, mais sa force est d’en être conscient et de ne jamais surjouer.

Les chameaux du banc ont tous joué un rôle prépondérant sur ce match. « La star c’est l’équipe »…on y revient encore.

KHAZRI 4/5 : Sorti épuisé de la phase de poule, il n’est apparu sur le terrain qu’en milieu de 2nde période. Et quelle entrée !! A chaque touche de balle il a fait la différence. L’ouverture du score doit beaucoup à sa talonnade de génie pour lancer Kechrida en profondeur. Maintenant va dormir et reviens nous pour 90 minutes de spectacle jeudi soir.

SLITI 3/5 : Rentré pour suppléer notre capitaine blessé, il s’est démené pour qu’on ne voit pas la différence et a très bien réussi son coup. Tout comme son penalty.

BEDOUI 0/5 : Rentré à la 91ème minute pour soulager les Aigles dans le domaine aérien. Buteur sur son premier ballon d’une superbe tête lobée, coaching gagnant et entrée fracassante qui a changé le cours du match. Dommage qu’il se soit trompé de but.

BEN MUSTAPHA 1/5  : Comme le nombre de penalty arrêté par notre cachalot national, on lui en demandait pas plus. Merci mon gros. Ce soir couscous à volonté pour toi.

Parade fantastique de Ben Mustapha…quelle détente…quelle masse!!!

Pour conclure, comment ne pas évoquer le coaching de Giresse, véritable grand bonhomme de ce match. Conscient que la qualif passerait par une débauche d’énergie sans faille de ses troupes, il a décidé d’aligner du sang neuf sur ce match. C’est bien simple, la moitié des joueurs de champ d’oliviers n’avait au mieux joué que deux matchs de poule. C’était un pari risqué mais qui s’est avéré payant. Et que dire de son changement de gardien à la 120ème minute… si la Tunisie n’avait pas remporté cette séance de penaltys, c’est tout un peuple qui l’aurait condamné. Même Hassen, mécontent et frustré d’être remplacé, a ravalé ses sentiments pour se joindre à la prière collective pendant la séance fatidique. Pendant ce temps-là, Giresse ne priait pas. Il cherchait une conclusion à sa réussite tactique du jour. Avoir déjoué les pronostics qui donnaient le Ghana vainqueur face à de trop frêles tunisiens. Une morale pour cette nouvelle fable. Et puis son visage s’est éclairci comme un lever de soleil : « Si tu vois un mouton dans le repaire d’un lion, aie peur de lui». Alors imagine si en guise de mouton ce sont deux dizaines d’Aigles et un Cachalot…

Prochain adversaire, la surprise de ce festival de CAN, les Zébus de Madagascar. Une chose est sûre, on ne les sous estimera pas comme d’autres l’ont fait avec nous.

1 thought on “Tunisie – Ghana (1-1, 5-4 aux tab) : L’Hariss Académie reprend un verre à La Fontaine

  1. La version du pauvre de la sélection de nos amis guesh (récemment championne d’un trophée en carton) continue son bonhomme de chemin dans la compétition. L’obstacle de Madagascar semble franchissable mais pourrait être aussi ce fameux match piège où la Tunisie partirait pour une fois favorite.
    Les aigles une fois de plus prendront leur envol. Espérons juste que ce soit pour ravir le trophée et non pas retourner dans leur nid…

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