Rendez-vous en terrain connus: Je crois qu’après avoir vu les faux Bohemians jouer, on peut mourir tranquille

11

Ultime épisode pragois

 Ahoj ! Je suis de retour pour vous conter le football tchèque. Après Prague, dont vous pouvez retrouver la présentation des différents clubs de la ville ici, et  des matchs du Sparta,  des Bohemians 1905, et du Viktoria Zikov, j’avais décidé d’explorer la tchéquie plus en profondeur avec Mlada Boleslav, avant de rentrer à la capitale avec le Slavia, puis le derby, et enfin le Dukla. Aujourd’hui, place à l’expérience ultime de l’inconnu, les Bohemians Praha.

File:Bohemians St?ížkov.gifFK Pardubice logo.png

 

 

 

 

 

 

 

 

Contexte

Les Bohemians Praha, les faux, affrontent le FK Pardubice un samedi matin pour un match sans enjeu. Les deux clubs sont sauvés (sauf catastrophe) mais trop loin de la montée (sauf série exceptionnelle et catastrophe chez les autres). Pardubice c’est quoi ? Un club fondé il y a 100 ans mais qui n’a aucune histoire. Ils ont accédé à la 2e division cette année parce qu’une autre équipe n’avait pas un stade conforme aux normes. Eh ben, je ne pensais pas que c’était possible ici en Tchéquie…Sinon, c’est une ville connue pour ses courses hippiques, avec une jolie place, un petit château, et une pizzeria relayée comme  « resto traditionnel tchèque » dans un guide touristique. Oui, j’y suis allé, non, je n’y passerai pas ma vie. Je dédicace cette introduction à mes deux amies avec qui j’étais allé découvrir la ville ce jour-là. Voilà c’est bon, j’ai parlé de vous dans un article, pour y avoir un plus grand rôle, il faudra venir au stade, où arrêter de rentrer chez soi à 1h du matin. Oui, je me sers de mes papiers d’internet pour me plaindre et faire mes réclamations, c’est n’importe quoi je sais, mais ce qui est encore plus n’importe quoi, c’est ce putain de club des Bohemians Praha. Pour rappel, il y a deux Bohemians à Prague. L’historique, qui joue dans Prague 10 dans son stade Dolicek, avec un fort soutien populaire et des fans qui se décarcassent, et les faux, qui avaient profité de la faillite du premier pour en racheter nom et couleurs (et kangourou). En plus ils jouent à perpète. Et ils ont un stade pourri. Et il y a personne dans le stade. Et ils sont la risée de Prague.  Sérieux, ils n’assument plus du tout je crois, impossible de trouver clairement où ils jouent sur le site officiel. Mais alors, je suis vraiment aller voir ce merdier ? Cela mérite des éclaircissements…

Résumé

Je l’avoue, j’avais abandonné l’idée d’aller voir les Bohemians Praha. Je m’étais dit, je pense à raison, que personne ne m’en voudrait, et de toute façon, sans cet article que vous lisez actuellement, tout le monde aurait déjà oublié l’existence de ce club. Alors quand je me suis réveillé contre mon gré à 9h ce samedi du matin, je n’ai pas voulu y voir un signe. J’ai juste essayé de me rendormir. Et les minutes se sont égrenées. Lentement. Je voyais le temps avancer et je restais bloqué dans cet insupportable état de fatigue non-comblée. A 9h30, je suis entré dans la phase de dilemme. Fallait-il insister dans la reconquête du sommeil ou devais-je profiter de ce coup du sort pour finir ma boucle Praguoise ? J’étais tout bonnement incapable de décider. Allongé sous la couette, assis sur le lit, assis devant l’ordinateur, debout, aux toilettes, rien, aucune conviction, aucun choix. Je regarde le trajet pour m’y rendre. 20 minutes, je raterai le début du match. Il est 9h50, il faut que je sois prêt dans 10 minutes. Je dois me lever. 9. Je dois m’habiller. 8. Je dois manger quelque chose. 7. Je dois me brosser les dents. 6. Je dois retrouver mon porte-monnaie. 5. Je dois retrouver mon téléphone. 4. Je dois retrouver mes clés. 3. Je dois mettre mes chaussures. 2. Je dois me regarder dans un miroir pour voir ma tronche qu’elle-est-jolie-dites-donc. 1. Je dois quitter l’appart et descendre attraper mon tram’. 0. Il est 10h, le 24 passe en bas de chez moi, je suis toujours en calbute dans mon lit avec un air ahuri, sans avoir eu le moindre désir de réellement bouger.

Spot touristique: aujourd’hui le Flea Market de Kolbenova

Je tente une dernière fois de me rendormir. Echec. Je prends donc la décision de me rendre au seul autre endroit qui peut te faire lever un samedi ou un dimanche à Prague : le Flea Market de Kolbenova. Petit-déj’ à l’arrache, mon coloc’ se lève et s’étonne de me voir déjà sur le pont. Habitué du Flea Market, il m’encourage à y aller. 15 minutes plus tard, lorsque je ressors de ma chambre, il est plus perplexe. Il pleut salement dehors. Nique sa mère, j’y vais quand même. En sortant du métro, la pluie s’est intensifiée. J’insiste, je traverse la rue, longeant le défilé de personnes ayant chacune leur sac rempli de leurs achats. Pour moi ce ne sera que gadoue et désespoir, je ressors moins de 20 minutes après sans avoir trouvé rien d’enthousiasmant. C’est alors que je décide d’aller voir la fin du match. Je sais que le stade n’est pas trop loin, qu’il y a moyen de chopper la dernière demi-heure. Je marche jusqu’à la station de métro précédente, un bus arrive, le terminus m’inspire, je monte dedans, banco. 5 minutes après, j’arrive près de la station Strizkov, élément d’une modernité incongrue au milieu du paysage uniforme des tours. J’utilise mon sens de l’orientation pour trouver la rue censée aller au stade. Sur le chemin, ne voyant toujours rien à l’horizon, je me demande si ce club existe vraiment, s’il n’est pas une légende. Non. Un pote allemand m’avait dit qu’il les avait vus jouer à Zizkov au premier semestre. Mais quand même, comment un club professionnel peut-il être aussi caché ?

Enfin, je crois entendre quelques bruits ressemblants à ceux d’un public. Oui. Arsène Wenger. A travers des grillages, j’aperçois deux équipes qui s’affrontent et un petit bout d’une petite tribune avec quelques personnes dedans. Bienvenue au pays des Bohemians Praha. J’arrive devant l’entrée du stade. J’hésite. Les stewards me regardent de façon chelou. Faut dire que je dois avoir l’air chelou. J’ai peur qu’ils me fassent payer. Je fais un pas, deux pas, trois pas, aucune remarque de leur part, je suis hors de leur portée, 30 secondes plus tard je suis sous un arbre, derrière les buts, entouré d’une vingtaine d’autres personnes. J’ai du mal à y croire. Je l’ai fait putain, je l’ai fait. Les gens regardent le match d’un œil discret, ils semblent n’être là que pour se tenir informé du score. Le score d’ailleurs… Superbe action de Pardubice, centre, frappe repoussée par le gardien, dont le maillot blanc est déjà plein de boue, reprise par un rouge, but. Les gens grognent de consternation, les joueurs en vert sont abattus, leurs adversaires content. Je fais un pas de plus et le tableau d’affichage se dévoile à moi. Domaci : 0 / Hoste : 4. C’est la déroute, c’est la branlée. Le supplice continue avec l’expulsion d’un joueur. Je crois bien qu’il a reçu deux cartons en deux minutes, mais je ne suis pas à 100% sûr.

Au-dessus du drapeau, des trompettistes

Les locaux obtiennent tout de même un coup-franc bien placé pour essayer de sauver l’honneur. Les trompettistes posés en haut de la tribune accompagnent la préparation avec un rythme de plus en plus rapide. C’est au-dessus. Une équipe de jeunes (les U20 quoi) commencent à s’entraîner sur le terrain d’à côté sans un regard pour leurs aînés qui se font massacrer. Pardubice domine effectivement la fin du match, développe un football pas dégueu, passe pas loin du cinquième. Les spectateurs commencent à partir, rigolent à la blague de l’un d’entre eux (ou à son chant peut-être). Les trompettistes font encore un peu entendre le son de leur guitare. On se croirait plus à un match de CFA qu’à un affrontement professionnel. C’est la fin du match. Les joueurs se serrent la main, la mascotte kangourou vient aussi sur le terrain histoire de se faire voir et se prendre des vents. Le pauvre mec qu’est là-dedans quoi… Ou le pauvre con d’ailleurs, il s’y est ptête mis tout seul. Si ça se trouve c’est le président du club… Bref, je sors du stade et me dirige vers l’arrêt de bus. Un vieux du genre bizarre me demande quelque chose à propose de football. Je lui réponds que je ne suis pas tchèque. Bus. Maison.

Les notes

Le stade (1/5) : Une petite tribune avec des sièges de pleins de couleurs. Des tables pour boire des bières tout de même, mais ça va, on ne va pas s’enflammer sur n’importe quel stade de village en plus. Il se situe à environ 30 minutes du centre en tram puis métro puis marche. La galère.

Les guichets (NN) : Pas de guichet.

Le prix (5/5) : Je suis rentré gratos. Est-ce que cela aurait été différent si j’étais arrivé plus tôt ? Pas certain… J’ai quand même cru apercevoir un panneau avec des tarifs allant de 50 à 100 couronnes.

L’ambiance (2/5) : Ambiance de CFA quoi, avec des mecs qui crient n’importe quoi, des grognements, et 5 gars qui chantent. Mention spéciale aux trompettistes qui accompagnaient les actions et qui font +1.

Possibilité de faire le streaker (3/5) : Ben étonnement il y avait pas mal de stadiers. Bon après, ils n’avaient pas l’air très concerné, donc c’était tout à fait possible.

Le match (?) : Sur les 15-20 minutes que j’ai vu, Pardubice a développé un beau football et les Bohemians faisaient n’importe quoi. Vu le score, cela a dû être comme ça pendant toute la rencontre. Pour information, les locaux en sont à 15(!) matchs nuls en 26 journées, dont une bonne flopée de 0-0 et 1-1. Quand je vous dis que c’est une équipe qui sort de l’ordinaire…

CapturebohemiansLa saison des Bohemians Praha illustrée: plus fort que Marseille et Bordeaux réunis

Joueurs à recruter chez nous (?) : Je ne peux pas vous le dire. Après, en terme de probabilité, ça reste assez faible je pense… Il fallait peut-être regarder sur le terrain voisin pour cette catégorie.

La bière dans le stade (?) : Je manque à tous mes devoirs, je n’ai même pas regardé le prix. Vu comme c’est un quartier paumé, il y avait moyen que ce soit en-dessous de 30Kc.

La bouffe dans le stade ( ?) : Elle n’avait pas l’air mauvaise, et c’était un truculent (j’ai bon ?) moustachu derrière le grill. Pas vu le prix non plus.

La pause-pipi (?) : J’ose espérer qu’ils aient des toilettes dans le stade.

La gent féminine dans le stade (?) : J’ai juste vu une steward pas top. Mais j’ai cru apercevoir de la mère de famille dans la tribune. En avant, charognards !

Possibilité de faire la fête après le match (1/5) : Après le match il est midi, et au mieux on peut commencer à boire des bières au soleil, en trouvant un parc sympa dans le coin. Sinon, il est temps de rentrer ce coucher et de dormir bordel !

Plaisir après ce foot inconnu (1/5) : Stade en carton, équipe de merde, ambiance pourrie, mais putain pourquoi gâcher son samedi matin ?!

La vraie note du plaisir (5/5) : J’ai vécu la putain d’expérience ultime du football professionnel praguois, les Bohemians Praha ! Voyages dans un univers insoupçonné, comment aurais-je pu conclure mon tour des clubs de la capitale tchèque de plus belle manière ? Je m’auto décerne la médaille de grand malade du football, merci, bravo, content, champagne, pardon, où est l’hôpital psychiatrique ?

Voilà le classement de deuxième division Tchèque. C’est tout pour ce Rendez-vous en foot inconnu! N’hésitez pas à repartir pour le Mexique avec Rigoberto Pirès, ou en Macédoine avec Tristan Trasca. Si vous voulez me suggérer des améliorations pour cette rubrique ou si vous voulez que je note d’autres choses dans le stade, dites-le-moi en commentaire. Si vous avez envie de football à Prague, contactez-moi par mail tristanbourrepif@gmail.com. Merci, et à bientôt sur Horsjeu.net !

Anàl Kiss,

Tristanec Bourrepifèc

11 thoughts on “Rendez-vous en terrain connus: Je crois qu’après avoir vu les faux Bohemians jouer, on peut mourir tranquille

  1. Merci Tristan!

    Je tiens à dire que je devrais participer à l’émiffion ce soir si tout va bien. En espérant que vous viendrez nous écouter!

  2. @ Tristan: je ferai de mon mieux!

    @ J-N Surdu-Mutu: c’est 1/5 pour envoyer du clash, c’est pour ça que je compense avec le 5/5 parce qu’au fond je suis vraiment content d’y être allés (mes amis me prennent pour un fou). Après, à part les plus férus d’entre nous, je ne vois pas qui peut prendre grand plaisir à se lever à 9h pour aller en banlieue de Prague voir une équipe qui fait 0-0 une fois sur deux.

  3. Il m’arrive de prendre plaisir à mater des matches de L2 roumaine tout moisis, donc je comprends parfaitement ton point de vue!

  4. tu vas tellement t’emmerder en rentrant d’erasmus… en espérant quand même que ta ville ait une équipe digne de ce nom!

    mais dans tous les cas, un grand moment de plaisir, comme d’habitude. Merci!

  5. Ouais, y’a bien moyen de subir un bon coup de déprim’… Merci à toi pour les encouragements!

  6. c’était génial, ça m’a fait rêver, j’ai l’impression que si je devais aller voir un match « normal » ici au Canada (j’ai pas eut l’occasion) ça donnerait à peu près ça, mais en riche.

  7. @ Mèch: tiens ouais, un match au Canada je me demande bien ce que ça donne. En tous cas je vais en profiter encore un peu des matchs-bières-saucisse à moins de 10 euros tout compris parce que l’année prochaine c’est fini!

    @ Bart: Merci!

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.