La presse et (donc) le public sont versatiles, adage bien connu. Aujourd’hui tout le monde loue le travail de Joachim Löw (né le 3 février 1960 à Schönau), à raison il faut le reconnaître. Mais qui connaissait cet homme il y a à peine six ans? A l’époque où les paris sportifs n’étaient pas encore autorisés, une seule personne misait sur lui, Jürgen Klinsmann. C’était en 2004.

Petit récapitulatif

Après la victoire à l’euro 96, les joueurs allemands sont vieillissants, la relève se fait attendre. Effet de cause à conséquence, le niveau de jeu et les résultats sont en chute : la Mannschaft est quart de finaliste, sans panache, à la coupe du monde 1998 et éliminée au premier tour de l’euro 2000, sans inscrire le moindre but. Le football allemand est en crise. Erich Ribbeck quitte ses fonctions de sélectionneur après seulement 2 ans. Du jamais vu en Allemagne, le mandat des sélectionneurs est assimilable à celui des sénateurs, 6 ans au minimum (Löw n’est que le 10ième sélectionneur de l’histoire du foot allemand).

La coupe du monde 2006 à domicile approche, il faut vite redresser la barre. Rudi Völler semble être l’homme de la situation. Lors de sa première compétition internationale, les résultats sont plus que probant, la Mannschaft atteint la finale de la coupe du monde 2002 avec un effectif rajeuni (Klose, Ballack, Metzelder). Arrive alors l’euro au Portugal, idéal pour servir de grande répétition à la génération qui représentera l’Allemagne en 2006. Malheureusement la sélection ne gagne aucun match et ne sort pas des poules. Rudi ne peut se satisfaire d’un tel résultat et tire sa révérence. Le destin n’a pas joué en sa faveur, les résultats des deux compétitions semblent en effet disproportionnés.

Par contre pour Joachim Löw le destin allait enfin être favorable. L’équipe d’Allemagne en plein doute a besoin d’un nouveau sélectionneur pour jouer la coupe du monde à domicile. La proximité de l’échéance, la pression populaire et le poids de l’histoire refroidissent les plus téméraires. De plus la fédération est exigeante, il faut gagner et convaincre. Jürgen Klinsmann est le seul candidat en lisse qui bénéficie d’une certaine crédibilité, malgré le fait qu’il n’aie jamais entrainé. La fédération n’a d’autre choix que de céder à toutes ses exigences. Oliver Bierhoff devient manager général, mais surtout Joachim Löw obtient le poste d’adjoint.

Le parcours de Joachim Löw

Joueur il évoluait au poste d’attaquant. Il effectue l’essentiel de sa carrière en 2. Bundesliga au SC Freiburg. Pour l’anecdote il est toujours le meilleur buteur de l’histoire du club avec 81 buts. Il termine sa carrière à l’écossaise, en exerçant comme entraineur/joueur du FC Frauenfeld (club suisse). Dans la foulée, en 1995, il rejoint le VfB Stuttgart comme adjoint. Dès la saison suivante on lui confie l’équipe et il remporte la coupe d’Allemagne. L’année suivante il atteint la finale de la défunte coupe des vainqueurs de coupes (victoire de Chelsea). On pense la belle histoire en route. Malheureusement pour Joachim Löw il est « étonnamment » limogé au terme de sa seconde saison. Il se retrouve disponible avec une relative belle cote. Il répond alors favorablement aux avances du Fenerbahçe Istanbul. Et comme pour de nombreux entraineurs, son aventure turque se termine par une éviction à la fin de son premier exercice (en 1999). Au cours de la saison suivante il est appelé au chevet su Karlsruher SC. Son bilan se passe de commentaire : 18 matchs, 1 victoire et une descente de 2. Bundesliga. S’en suit une traversée du désert qui l’amèneront dans un obscur club turc et en Autriche. Sa carrière prend le genre de trajectoire qui vous amène aux oubliettes.

Sans le savoir Löw avait déjà connu son jour de chance. Il a en effet suivi sa formation d’entraineur avec un certain Jürgen Klinsmann qu’il avait alors convaincu de ses qualités. La suite de l’histoire on la connait. La campagne de l’équipe d’Allemagne en 2006 est un succès. Klinsmann laisse sa place à Löw qui se fera accepter même par les plus sceptiques.

La « philosophie » Löw

Sa vision de jeu : un football offensif, voeu pieux, pour lequel il travaille continuellement.

Comme Cristiano Ronaldo l’a expliqué, qui-lui même le tien de Higuain qui le tenait de Ruud Van Nistelrooy, les buts c’est comme pour le ketchup, lorsque tu commences à en marquer un, les autres s’enchainent. Dans la foulée de sa prise de fonction, Joachim Löw accumule les victoires. Le tube de ketchup arrive inéluctablement à sa fin, ses détracteurs attendent de voir comment le sélectionneur gérera des situations plus difficiles. La première défaite significative a lieu en phase de poule de l’euro 2008 contre la Croatie. Aux premières critiques Löw répondait « Je ne suis pas le genre d’entraineur qui va retourner sa veste et dire à ses joueurs : nous devons bouffer du gazon maintenant (belle image). Je souhaite trouver la solution par le jeu ». Belle gestion de crise, l’Allemagne atteint la finale du tournoi. Pourquoi s’était il alors autant enfoncé avec le Karlsruhe SC ? Il n’avait surement pas l’effectif à la hauteur de son projet de jeu et aurait plutôt du leur faire bouffer du gazon. A cela il faut ajouter le postulat de Löw : la vie est un éternel apprentissage.

Non seulement il se l’applique, mais se sent également investit d’une mission d’enseignement. Il adopte une position chère a horsjeu.net qui consiste à « académiser » le football. Il transmet ses connaissances aux joueurs bien évidement et de la même manière aux supporters. Dans ses interviews il peut parler avec passion de repli défensif ou des problèmes de transmission du ballon. Il n’hésite pas à évoquer ses critères de jugements pour sélectionner un joueur (extrait d’une interview accordée à 11freunde.de) :

« La performance individuelle et la force mentale sont prises en compte. Que peut nous apporter un joueur à son poste? Qu’est qu’il peut apporter à notre philosophie? Quel changement tactique peut laisser envisager un joueur? Comment va-t-il se comporter lorsque l’équipe est menée? Est il capable d’exploiter une situation en supériorité numérique? Peut il être un meneur pour l’équipe et la tirer vers le haut? Il arrive même que l’on laisse observer certains joueurs à l’entrainement pour connaître leur engagement. Pour faire court : nous voulons savoir si un joueur va tout faire pour gagner sa place avec nous. »

La dernière partie est intéressante, il parle bien des entrainements en club. Il faut savoir que Löw essaie d’entretenir de bonnes relations avec les techniciens et les clubs qui emploient ses joueurs. Il se tient en permanence informé de la forme des joueurs ou de questions plus techniques. Rappelons que l’ensemble des joueurs de la sélection évoluent en Bundesliga ce qui facilite sa tâche.

La méthode Löw s’accompagne d’une stratégie de communication bien rodée, Joachim ne le nie pas et se dit continuellement en progrès en la matière. Notamment pour la gestion de son groupe. Tout le monde a remarqué que Frings ne faisait pas partie du voyage en Afrique du Sud. Cette éviction tout comme celle de Kuranyi s’est déroulée sans accrocs. Löw a choisi comme stratégie de les ignorer. Il les a de temps à autres convoqués pour les éliminatoires, sans pour autant les faire jouer. Il leur a progressivement  fait comprendre qu’il n’avait pas besoin d’eux. Dans cette lutte psychologique Kuranyi s’est d’ailleurs mis à la faute tout seul en quittant le groupe lors d’une rare convocation. Certains se souviennent  que la presse souhaitait son retour mais Löw est resté fidèle à lui-même.

Conclusion

En dehors des considérations techniques, la plus grande réussite de Löw, dans la continuité du travail effectué avec Klinsmann, c’est d’avoir su redonner confiance à un groupe et à un pays. Reste à savoir si cette émulation sera suffisante pour remporter la coupe du monde. Certains doutes avaient été émis suite à la défaite contre la Serbie. Force est de constater que le Löwe (lion) n’a  toujours pas vendu sa crinière.

Bonus

Joachim Löw a eu beaucoup de difficulté à convaincre les adeptes d’un jeu rugueux. Il n’a pas pour autant reculé devant la provocation, en tournant des publicités pour Nivea. L’image du métrosexuel a révulsé plus d’un teuton.

2 thoughts on “Wer bist du Joachim Löw ?

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