Tottenham-OM (2-0), La Canebière académie est incorrigible

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Pourquoi changer ?

Aïoli les sapiens,

Faut que je vous raconte, l’autre jour j’ai emmené Dromadine chez une copine de classe. Négligemment posé sur la bannette près de l’entrée se trouvait un courrier à l’attention de la maman de ladite copine, à l’en-tête du Max-Planck-Institut für Plasmaphysik. Il se trouve en effet que cette personne est docteur en physique atomique et effectue à Cadarache des recherches sur les turbulences des plasmas. Une prise de conscience relativement douloureuse pour nous, dont le prestige voire l’utilité sociale tiennent essentiellement aux marmites de tripes et aux blagues de bites sur des sites footballistiques douteux. On ne peut donc que se sentir une certaine proximité avec cet Olympique de Marseille, assez cuistre pour tenir dix minutes de conversation avec tout ce que la région compte de chercheurs (un peu plus longtemps avec Médéric Gasquet-Cyrus, mais lui c’est justement parce qu’on peut faire des blagues de bite), mais ataviquement trop limité pour atteindre quoi que ce soit qui ressemble à un semblant de réussite.

La soirée d’hier n’a pas fait exception, puisque l’entrée dans la cour des grands s’est invariablement achevée par un fracassage en grande pompe et à pleine vitesse sur un mur (de Planck). Tant qu’à parler de physiciens, c’est à ce point qu’on invoquera une certaine forme théorie de la relativité footballistique, selon laquelle la perception de la défaite varie grandement du point de vue de celui qui l’observe. Prenons par exemple le cas d’une équipe remaniée à 80 % à l’intersaison, dont l’entraîneur a été remplacé au pied levé par un autre professant des principes de jeu totalement différents, et dont la présence ainsi que l’expérience au plus haut niveau sont on ne peut plus irrégulières : sous cet angle, ce 2-0 subi à Tottenham, après une très honorable résistance pénalisée par un coup du sort, relève de ce que l’on peut qualifier de défaite encourageante®.


Considérons maintenant le même objet, mais en quittant la perspective d’une équipe naissante pour adopter celle de suiveurs réguliers du club depuis DIX ans : entre 2012 et 2022, ces suiveurs ont assisté au total de UNE victoire en Ligue des Champions (ici) et de UNE victoire contre un adversaire présumé supérieur (). On se mortifiera un peu plus encore en rappelant que si Lyon a montré des moments à peu près aussi anaux que les nôtres dans ce même laps de temps, eux au moins se sont offert des soirées à taper des Manchester City.  Ce contexte modifie considérablement l’analyse de cette nouvelle contre-performance, en aboutissant objectivement à la seule conclusion qui vaille : « défaite encourageante », mes couilles. En 2012 nous avons connu une défaite encourageante contre Arsenal (), une défaite tellement encourageante qu’elle a été suivie de DOUZE petites sœurs.

“Waking to these sounds again
I wonder how I’ll sleep
Passing out is taking off into the stubborn deep
I’d like to meet a human who makes it all seem clear
To work out all these cycles and why I’m standing here
I’m falling
Over and over and over and over again now
Calling and over and over and over and over again now”


Les hommes ont changé (sauf Payet mais pour le coup, lui n‘y est pour rien), et pourtant l’histoire se répète à la virgule près : l’OM résiste vaillamment et gâche tout sur une erreur de benêts. C’est plus qu’une constante, c’est une culture, un patrimoine génétique : l’OM ne sait pas se dépasser dès qu’il rencontre un club supposé plus fort que lui. L’OM fait bien, l’OM nourrit des espoirs, mais l’OM réussit invariablement à tout faire foirer et à ne jamais franchir la marche qui le ferait progresser. Pour être honnête, on peut y trouver des raisons objectives sans recourir à la psychanalyse profonde ou aux forces surnaturelles : par exemple, le fait que le club entrecoupe systématiquement ses campagnes de Ligue des Champions par des crises qui foutent tout à terre et le font à chaque fois repartir de zéro n’aide pas à entretenir la culture permanente du haut niveau.

On peut ainsi supposer que, si l’OM parvient à se qualifier plusieurs années de suite et ne change pas son staff et son effectif à chaque saison, les joueurs acquerront enfin l’exigence, l’expérience et le vice propres à l’élite pour ENFIN COMPRENDRE QU’IL EST PARFOIS NÉCESSAIRE DE FAIRE UNE FAUTE UTILE À 60 MÈTRES BANDE DE GROSSES TACHES.

Ça y est, vous m’avez énervé.


Concluons cette introduction sur une note d’optimisme : si l’on considère d’une part que nous subissons en Ligue des Champions une malédiction digne de celle des Bordeaux-OM, et d’autre part que notre dernière performance d’envergure a consisté en la qualification chez l’Inter de Milan grâce au dos de Brandao le 13 mars 2012, nous pouvons donc affirmer que le même délai sera nécessaire pour briser cette spirale négative et que nous retrouverons donc la joie en Ligue des Champions le 19 juin 2056.


Les Longorious Basterds

Lopez
Mbemba (expulsé, 48e) – Bailly – Gigot (Ünder, 87e)
Clauss (Kolasinac, 69e) – Rongier– Veretout (Gueye, 87e) – Tavares
Gerson (Balerdi, 50e) – Guendouzi
Suarez (Harit, 69e)

Alexis Sanchez purge une suspension acquise lors de son dernier match de Ligue des Champions, tandis que Payet est blessé au mollet. Ces deux absences mises à part, c’est une équipe-type qui se présente à Londres.


Le match

L’OM défend ensemble et en avançant : de ce point de vue, la première mi-temps se montre exemplaire et prometteuse si nos joueurs parviennent à maintenir ce niveau toute la saison. Certes, ce pressing haut se paie parfois de trous au milieu de terrain, mais ceux-ci sont brillamment rattrapés par un trio Mbemba-Bailly-Gigot. Ajoutons à l’autorité du trio les erreurs techniques commises par Tottenham, et les Londoniens évoquent irrésistiblement Renaud Muselier tentant de négocier avec la CGT Dockers.

Seuls deux bémols viennent entacher ces 45 minutes très encourageantes : sur le plan individuel, Nuno Tavares perd des ballons à foison et Gerson tend à ralentir le jeu plus que de raison. Surtout, sur le plan collectif, la philosophie « taper, taper, taper » de Tudor disparaît aux abords de la surface, noyée dans une inhabituelle prudence au moment d’aller faire mal à l’arrière-garde spur. Pour tout dire, on a parfois l’impression que l’OM sampaolise, gardant le ballon moins pour attaquer que pour priver l’adversaire de munitions. Par rapport au football châtré de l’Argentin, l’OM a cependant le mérite de presser haut sans relâche, et de maintenir le ballon dans le campa adverse plutôt que de proposer 628 échanges défenseur-gardien avant de franchir la ligne médiane. Aussi la pause survient-elle sur le constat d’un OM vraiment très séduisant défensivement (un seul tir dangereux de Kane, hors-cadre), mais manquant dramatiquement d’audace (un seul tir dangereux de Guendouzi, paré par Lloris).

On aurait tendance à dire que c’est typiquement le genre de matchquisejouesurdesdétails et où les erreursnepardonnentpasàceniveau (ce qui est à nuancer, puisque justement nous avons commis quelques erreurs et qu’elles ont pardonné).


Bref, chaque suiveur de l’OM sait déjà que le scénario de la seconde période est écrit d’avance mais garde néanmoins espoir que pour une fois, juste une seule putain de fois dans notre putain de vie de supporter, l’histoire pourrait peut-être s’écrire différemment. Mais non. A haut niveau, il faut que nous soyons des connards, c’est écrit, c’est la règle, on ne peut pas y déroger. Au moins peut-on saluer les joueurs d’avoir fait œuvre collective, plutôt que de faire reposer le sabordage rituel sur la bourde d’un seul homme.

« Récupérez-la, récupérez-la, récupérez-la », supplions-nous quand Veretout et Suarez se jettent au pressing à deux contre un sans obtenir le contre favorable. « Fautes la faute, faites la faute, faites la faute », supplions-nous quand Gigot puis Rongier et Nuno Tavares sont au duel en sous-nombre après que le pressing a été cassé. « Fais pas la faute, fais pas la faute, fais pas la faute », supplions-nous quand Mbemba poursuit Son, lancé après qu’aucun de nos viers marins n’ait été foutus de casser l’action. Un hippopotacle plus tard, nous voici partis pour jouer une mi-temps en infériorité, suite à une action qu’il aurait pourtant été facile d’éviter si un seul des six joueurs impliqués sur l’action avait réalisé un geste approprié (voire sept, si l’on juge sévèrement une hésitation de Bailly avant l’ouverture fatale de Kane).

L’essentiel du gâchis est accompli, il ne reste plus qu’à attendre le but de con qui viendra tout couronner. Tottenham y met de la mauvaise volonté, puisqu’infoutus de se procurer la moindre action dangereuse jusqu’au dernier quart d’heure : seuls se succèdent les centres certes dangereux mais à la réception desquels notre défense se montre toujours intraitable. Evidemment, il faut une occasion manquée pour ajouter un peu de sel à nos regrets, ce dont se charge Harit, gêné in extremis par la défense à la réception d’une belle action Harit-Tavares-Guendouzi-Kolasinac.


Cette formalité étant effectuée, Tottenham peut enfoncer le clou, un peu aidé par un changement malheureux de Tudor. En effet, si Tavares a été exfiltré du côté gauche où il se trouvait en grande difficulté face au nouvel entrant Kulusevski, c’est bien à la place de Clauss et non du Portugais qu’est entré Kolasinac. Nuno se trouve ainsi maintenu sur le terrain et reporté côté droit, où ses problèmes défensifs perdurent et finissent par nous anéantir : naïf, il laisse Perisic adresser un énième centre, sur lequel notre défense finit par craquer. Kane et Richarlison croisent leur déplacement, Gigot et Bailly se retrouvant à deux au marquage du premier et laissant le second allumer Lopez de près (1-0, 76e).

Vaillant jusqu’ici, Samuel finit par sombrer complètement en se faisant de nouveau manger de la tête par Richarlison, à la réception d’un long centre en profondeur (2-0, 81e). À l’ultime minute, Ünder récupère un bon ballon qu’Harit lui rend en position idéale, mais ici encore Cengiz se montre beaucoup trop tendre pour le haut niveau et laisse un défenseur le tacler in extremis pour empêcher un but tout fait.

C’est pourquoi on se gardera bien ici de dire qu’il ne manquait pas grand-chose à l’OM, puisque ce « pas grand-chose » est précisément le gouffre qui nous sépare de la table des grands. Et encore, si nous persistons à vouloir qualifier de « grand » ce Tottenham morose,  nous n’aurons pas fini de prendre des roustes complaisantes quand le destin nous mettra de nouveau en face de Manchester City ou autres adversaires d’un calibre supérieur.


Les joueurs

Lopez (2/5) : On aurait pu mettre Jean-Claude Gaudin dans les buts que le résultat n’aurait pas été différent. Oui, on a déjà fait cette vanne contre Clermont, sauf que cette fois-ci ce n’est pas un compliment.

Mbemba (2-/5) : En première mi-temps, quand Son essayait de le passer en dribble, on a pu mesurer le potentiel monstrueux de Chancel. En seconde mi-temps, quand Son a essayé de le passer à la course, on a aussi pu mesurer le potentiel monstrueux de Chancel, mais moins longtemps.

Bailly (3-/5) : Un match quasi-parfait sauf qu’en Ligue des Champions, quasi-parfait c’est insuffisant.

Gigot (1+/5) : J’ai l’impression de me sentir comme un juge de GRS obligé de sacquer à regret une petite gymnaste toute choupi. Mais t’as beau valoriser les efforts, quand tu dois déduire l’absence de faute tactique à l’origine du rouge de Mbemba,le marquage lâché sur l’ouverture du score etle duel perdu sur le second but, ta petite gymnaste que t’aimes bien, t’es bien obligé de lui mettre une note à lui faire chialer sa race.

Ünder (87e) : Y avait pas un gros enjeu sur son entrée mais en revanche, si tu foires la même occasion contre Francfort, je te conseille de dire à ta mère d’acheter des bouchons d’oreilles.

Clauss (3-/5) : Je me tâte. On peut soit louer le sérieux défensif, soit regretter la timidité offensive. Ce qui est certain en tout cas c’est que le remplacer à droite par Nuno Tavares a tout eu du coaching foireux (pour lequel nous sanctionnons l’entraîneur d’un point « Dehors » avec sursis).

Kolasinac (69e) : J’avais une vanne avec les gens qui n’aiment pas Tottenham et les histoires qui se joue sur des détails, mais je préfère la laisser aux académiciens niçois ou lyonnais.

Rongier (3-/5) : À une semelle près, celle qu’en bon capitaine il aurait dû coller à un adversaire pour péter la fameuse contre-attaque de la 48e, on est proche d’un match tout à fait satisfaisant.

Veretout (3-/5) : Ah, il y a comme un frémissement. Ça chasse du milieu adverse jusque dans son camp, ça coupe de la trajectoire, ça s’investit. On peut espérer que Jordan trouve enfin son rythme. Et bien sûr, on ajoute le « moins » qui va bien pour cette 48e minute et son pressing trop gentil qui n’attrape ni le ballon ni le joueur.

Gueye (87e) : Brancardier de nos espoirs tombés sur le champ de bataille.

Tavares (1+/5) : Le joueur d’Arsenal a complètement sombré face à l’ennemi héréditaire de son club. Il a irrémédiablement souillé le maillot gunner, dont on comprendrait mal qu’il puisse le reporter un jour. Non, vraiment, c’est très dur pour Nuno mais après une telle performance il est impossible qu’Arsenal l’accueille au retour de son prêt, je crains malheureusement qu’il ne doive rester chez nous à la fin de la saison.

Gerson (2/5) : Le retour du Gerson qui ne fait pas des trucs. Il ne nous avait pas manqué.

Balerdi (3/5) : Entré avec une énorme pancarte « je suis le nouveau Jérémy Morel, celui qui va vous coûter le but à la con de la défaite », et finalement irréprochable. Ce qui ne nous a pas empêché de perdre quand même, certes.

Guendouzi (3/5) : Intense et juste, même si ça ressemble plus à une appréciation de dosettes de café que de footballeur.

Suarez (2-/5) : L’avantage c’est qu’il n’a pas l’air de rechigner au boulot ingrat. « Bon, Luis, ce soir tu vas avoir que des ballons de merde à jouer ; il y en a même où tu seras tout seul contre toute la défense, donc si tu pouvais nous aider à remonter le bloc en gagnant des coups-francs ce serait super. Ça te pose un problème ?  – Non coach, pourquoi, ça devrait ? »

Harit (69e) : Redonne un peu d’allant à une équipe qui se bornait à résister. Je n’arrive même pas à lui en vouloir de son occasion manquée, d’une part car elle était plutôt difficile à conclure, et que de toute façon il s’agissait d’un élément indispensable au scénario du match écrit à l’avance.  Autant à Schalke, avec le même centre et le même raté du défenseur devant lui, le ballon rebondissait sur son tibia et il marquait sans faire exprès.


L’invité zoologique : Heung-Min Sole

La sole est un poisson plat réputé avant tout pour son habileté à se camoufler. Tout les plongeurs sous-marins vous le diront : on peut passer et repasser à proximité du poisson pendant de longues minutes sans même soupçonner sa présence, et puis au moindre moment d’inattention, pfffffuit, il se glisse dans votre anus sans que vous ne l’ayez vu venir. (source : Merveilles du monde sous-marin par le Dr. Gwen Tagrenmer, édité aux Presses océanographiques de Bretagne).

  • Les autres : Je me répète, mais si l’on souffre déjà d’un complexe d’infériorité face à ce football sinistre, on n’a pas fini de recourir au baume anal contre des De Bruyne-Haaland, des Kimmich-Mané ou des Neymar-Mbappé. Bon, heureusement, cette année on n’a pas prévu de les rencontr… ah, merde.
  • Le classement : Supposé plus faible, le Sporting explose pourtant Francfort 0-3 et prend la tête du groupe. Autant dire qu’enterrer un peu plus les Allemands mardi au Vélodrome devient déjà quasi-indispensable pour espérer au moins la qualification en Ligue Europa.
  • Coming next : Avant Francfort mardi, donc, nous accueillons Lille samedi soir. Suivront Rennes, Angers et le Sporting : une séquence qui devrait bien se passer si nous confirmons le sérieux entrevu ce soir, mais qui peut tout aussi bien partir en couilles si nous ne nous attachons pas à assurer ces fameux détails®.
  • Les nouvelles des anciens : Pendant ce temps à Naples, il paraît qu’André-Frank Zambo Anguissa s’est métamorphosé en Zinedine Zidane le temps d’un match passé à uriner sur tout le milieu de terrain de Liverpool, but à la clé.
  • Le rendez-vous occitaniste : ces grands valables de Mauresca donnent un concert aouf ce samedi à 14h30 au Parc Jourdan d’Aix. Je serais toi, je viendrais.
  • Les réseaux : ton dromadaire préféré blatère sur Facebook, sur Instagram et sur Twitter. Johny Kreuz remporte le concours zoologique, ça fera au moins un Gunner content.


Bises massilianales,

Blaah.

1 thought on “Tottenham-OM (2-0), La Canebière académie est incorrigible

  1. Les mecs nous ont regardé sautiller une heure durant en essayant d’attraper le pot de confiture, puis on a entendu « suffit » et bim, on en a pris un mais dans le cul, de pot de confiture.

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