Le  Togo nous a offert son célèbre feuilleton « viendra /viendra pas[i] » provoquant une avalanche de lieux communs et autres raccourcis foireux se déversant du haut de la montagne de fainéantise caractérisant le bien nommé journalisme sportif.

Le nid des « éperviers du Togo » s’est condamné à une perpétuelle bataille de primes presque décennale[ii]. L’horreur de Cabinda[iii] n’aura pas amorcé la volonté d’un meilleur et, si certains acteurs changent, le scénario reste le même : à la fin  les africains sont perdants.

Le capitaine se rebiffe

Tout commence le 24 novembre par les déclarations d’Adebayor sur la radio togolaise Fréquence 1 FM[iv]. Le capitaine nous conte ainsi les formidables mésaventures de la sélection nationale. L’explication est claire et détaillée et ne se limite pas au désormais célèbre « C’est l’Afrique » ; « Ah ! C’est pour ça ». Le joueur a certes planifié sa carrière comme un braquage. Ses nombreux transferts houleux lui ont permis de figurer en bonne place dans le fichier du grand banditisme bosmanien. Mais rien dans le contexte actuel ne semble présumer d’une mauvaise foi sur de viles bases mercantiles.

On peut toutefois légitimement se demander pourquoi toujours ce même garçon au centre de ces bisbilles togolaises ?

Les primes de sélections représentant le budget chaussettes au sein du foyer Adébayor, l’ancien mancunien n’a qu’une vague idée des répercussions financières que pourraient occasionner un conflit avec sa fédération. La prime de qualification à la CAN s’élève à 15 millions de francs CFA pour les joueurs, soit un peu moins de 23 000 euros, « Sheyi » en touchait, l’année dernière, près de 200 000 par semaine hors primes. Une telle différence donnerai une liberté de ton au dernier des corrompus.

Emmanuel Adébayor est également, et de loin, le plus célèbre togolais de la planète. Il jouit d’une aura médiatique bien au-dessus de celle de n’importe quel responsable politique de son pays. Quand il parle, on l’écoute, pouvoir considéré comme surhumain pour la plus part des africains en général et des togolais en particulier. Tout naturellement ces coéquipiers le sortent régulièrement de son onéreuse insouciance et l’envoient au front dans les conflits récurrents opposant les joueurs et leur fédération.

La stratégie du Postérieur

Le Président de la Fédération Togolaise de Football (FTF), Gabriel Ayémi, confondrai donc gestion d’association et gestion du patrimoine, le sien en l’occurrence. Le système Ayémi serait basé sur une nébuleuse dont la complexité se situe à la hauteur du respect qu’éprouve le personnage pour sa fonction:

Phase 1 – Quelqu’un lui donne un truc en sa qualité de Président de la FTF ;

Phase 2 -Il le garde pour lui;

Phase 3 Il oriente toutes questions sur le sujet vers le bureau de renseignement autrement appelé son postérieur.

Une stratégie de communication bien rodée caractéristique de tout homme dont la vie est bercée par les douces notes de l’impunité. Ainsi lorsqu’un responsable de la fédération marocaine remettrait de l’argent à Mr Ayémi pour ce qui semble être les termes d’un accord régulant le déroulement du match Maroc-Togo, il le garderait.

En effet, le 14 novembre dernier, le Togo surprend le Maroc en match amical (0-1). Selon Adebayor, les joueurs se présentent devant leur capitaine/délégué syndical pour émettre un avis de recherche sur les primes de victoire. Déclenchant un plan alerte enlèvement, Adebayor obtient les coordonnées d’un responsable de la fédération marocaine auprès de Marouane Chamakh et se voit confirmer la remise de 35 000 euros aux représentants de la FTF. Selon Ayémi, cet argent aurait été investi dans l’organisation du déplacement de l’équipe (prime de campement, hôtel, nourriture, remboursement des billets d’avions etc….). Théorie rapidement mise à mal par la définition du mot inviter : « acte de convier, d’offrir, en assurant le coût d’une activité ». Le Maroc ayant invité la sélection togolaise, où sont passés les quelques euros de plus ?

Autre exemple narré par Emmanuel Adebayor, celui du prétendu détournement des maillots d’entrainement de la marque Puma, sponsor des éperviers. Le simple fait que de tels soupçons existent  est d’un pathétique insondable. L’amateurisme se corrige par l’expérience, pas le vol à la petite semaine. Quelques jours après les déclarations d’Adebayor, la FIFA envoie un courrier dénonçant la gestion calamiteuse des subventions qu’alloue l’instance internationale à la FTF (l’hôpital, la charité tout ça tout ça) et décide le 12 décembre de suspendre son aide au Togo[v].

Les héritiers de Johnny Fontaine

Devant l’iceberg impatient de faire connaissance avec le navire des éperviers togolais en route vers l’Afrique du Sud, Adebayor se dirige vers les issus de secours et annonce son retrait avec le soutien de bon nombre de ses camarades.

Le Togo vivant sur un arc en ciel sans histoire, le premier ministre saisit l’occasion de s’occuper un peu. Une intervention infructueuse plus tard, le Président Faure Gnassingbé décide logiquement de rencontrer le joueur de Tottenham et lui offre des garanties quant à la bonne gestion de l’équipe nationale à défaut de celle du pays. Episode désolant qui laisse sceptique les joueurs concernés par l’intervention du président de droit divin, « Va dire non au Président ! ». La précipitation avec laquelle les plus hautes instances de l’Etat ont vu dans cette affaire une opportunité populiste laisse pour le moins perplexe. La politisation du sport à outrance n’a rien de nouveau mais voir un Président se démener pour forcer la participation de joueurs de football est quand même d’une tristesse absolue. Ceci explique cela.

Six feet under

Vient alors le quiproquo de la liste du sélectionneur Didier Six, profession : sorcier blanc[vi]. Si Michel Dussoyer et Hervé Renard apparaissent en Gandalf et Dumbledore, laissez-moi vous présenter le Garcimore de la magie footballistique. Sa nomination sans aucune expérience en tant qu’entraineur professionnel est déjà des plus étranges. Le « bouche à oreilles » nous dit-on, tout dépend du carnet d’adresse des organes en question. Sa présence épisodique à Lomé, ses séjours en France réguliers  renforcent les soupçons de mercenariat pesant sur l’ancien international français.

Faire partie d’un système et le subir sont deux choses différentes, nuance que semble oublier la médiocre stratégie en communication du sélectionneur togolais « Je suis au courant de rien, j’étais en train de dormir ». Aucune réaction précise suite aux déclarations d’Adébayor, rien à dire sur l’absence de logement, de planification des entrainements seulement 1 mois avant le début de la CAN, la passivité de ce monsieur laisse pantois[vii].

Le silence n’étant pas un oubli, Didier Six s’est tout de même loué un caractère et refusa sans préavis de rejoindre ses joueurs pour le stage de préparation prévu initialement le 7 janvier à Accra, retardant ainsi le départ de 24h. Le boudeur réclamait le paiement de son salaire du mois de décembre, un contrat pour son adjoint, Alain Haap, et le remboursement de ses frais de déplacement[viii]. Tout cela fut réglé le lendemain et Didier repris son poste la légitimité en moins. Et l’épisode de la liste dans tout ça ? Un simple quiproquo apparemment. Selon la presse togolaise, Didier Six avait en effet sorti Agassa et Adebayor pensant avoir entendu un 72ème revirement de situations[ix]. Etrangement suite à l’épisode des impayés payés, aucune suite à cette histoire n’a été mentionnée par le sélectionneur ou la fédération.

La vie c’est comme une boite de chocolat

Question football, la stratégie du « tous derrière et lui devant » a permis à l’ancien attaquant de Valencienne de remettre les clés à son capitaine en lui demandant de le réveiller quand ils auront fini. Son bilan est à l’image du personnage, creux : 3 victoires, 3 défaites, 3 matchs nuls.

Les Eperviers seront finalement tous présent en Afrique du Sud pour affronter la Côte d’Ivoire, l’Algérie et la Tunisie dans ce qui semble être le groupe le plus relevé. Emmanuel « Eazy E » Adebayor aura la lourde tâche d’assumer et de mobiliser ses troupes dont le moral s’écrit en braille.

Tahar Fidile

Alors que revoilà la sous-préfète.

Bonus Track : Le récit accéléré d’ « Ayémi Eleven » (ceci est une œuvre de fiction)

-Absence de jeux de maillots avant l’entrainement

– « Capitaine, sont où nos maillots ? »

– « Le Président de la Fédération est occupé pour le moment veuillez rappeler ultérieurement…..Le Président de la Fédération est occu…… »

-« Allo, le mec de PUMA que je connais depuis Monaco ? N’y aurait-il pas des maillots que vous auriez oublié de nous envoyer ? – « Ben non, ça fait trois semaines qu’ils sont à Lomé je te montre les papiers si tu veux »

-« Le Président de la fédération est occupé pour le moment……..mais sachez qu’une vente privée Puma aura lieu très prochainement……..le Président de la fédération est…… »



[i] To go or not to go en anglais…….désolé je ne sais pas ce qui m’a pris.

[iv]   Un lien pour l’intégralité de l’interview: http://tadegnon.info/?p=1243

[v] Extrait du communique de la FIFA s’adressant directement à Mr Ayémi : « De nombreuses dépenses sans liens avec les objectifs du projet ont été effectuées : prise en charge de frais de l’équipe nationale alors que vous recevez d’autres subventions pour ce faire, vos propres déplacements ainsi que ceux de membres du comité exécutif à l’étranger, frais de télécommunications et d’électricité exorbitants, frais de manutention et d’essence de véhicules personnels ou encore, avances de sommes importantes au personnel de la FTF sans raisons ou justifications appropriées »

[vi] 23 sélectionneurs non africains sur 55 sélections

[vii] Ces silences contrastent avec la vision que l’homme a de lui-même :  « J ai un caractère à positiver, un caractère de battant et c’est ce qui fait que je n’ai pas envie de lâcher quoi que ce soit mais devant l’impossible personne n’est infaillible »

[viii] Cette situation aurait eu des répercussions sur la gestion du match Niger-Togo (3-1) joué à Niamey le 5 janvier.

[ix] La version de l’Equipe.fr expliquant le refus d’Adebayor par le tripatouillage de la liste est démentie par l’intéressé.

6 thoughts on “CAN 2013: TWA (Togolese With Attitude)

  1. Article intéressant mais malheureusement gâché par un style un peu lourd et ampoulé, ça manque de clarté. Dommage…

  2. aaahh le togo ! :p
    bien vu les reference du genres easy e , le silence n’est pas un oubli … ;)

  3. A chaque CAN son histoire de primes non payés et de gros sous. Bel article un peu triste quand même.

  4. @Romek Je comprend que le style ne plaise pas à tout le monde, après c’est comme ça que je prend du plaisir.
    Au sujet de ce qui te semble être des exagérations, comme le dit @David Scie Mal, elles traduisent une réelle tristesse, un agacement violent et une honte profonde de la médiocrité de nos dirigeants.

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