Les fables de Just La Fontaine : épisode 2
Just, c’est juste son prénom.
Le Tchèque qui voulait se faire aussi gros que le Russe.
Un Tchèque vit un Tsar
Qui lui sembla de belle taille.
Lui qui était à la recherche de son passé de star,
Envieux, il attaque, se découvre et se travaille
Pour mettre cet équipe au cimetière
Disant : « Regardez bien mon frère ;
Est-ce assez ? Dites-moi ; n’y suis-je point encore ?
– Nenni ? – M’y voici donc ? – Point du Tout. – Ai-je réussi ?
– Vous n’en approchez point. » Le chétif pécore,
Perdit si bien son football, que quatre il s’en prit.
Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages :
Tout champion veut entrer dans les mœurs,
Toute petite équipe veut jouer le rôle d’outsider,
Tout favori croit que la victoire est son apanage.
Un Portugais se voyant à l’Euro.
Dans le match d’un Euro
Un Portugais se mirait avec fierté,
Louait la beauté de ses individualités
Et ne pouvait qu’avec peine, lancer l’assaut
Avec son collectif tremblant
Dont il voyait l’objet se perdre avec le temps.
Quelle affaire de faire tourner un ballon !
Disait-il en courant après avec douleur :
Passes courtes ou en profondeurs sont une abomination ;
Mes individualités ne me font point d’honneur.
Tout en parlant de la sorte,
Un allemand le fait pâtir ;
Il tâche à bien réussir ;
Toutes les passes que le football comporte.
Ses individualités, dommageables ornements,
Passant à coté à chaque moment,
Nuisent au collectif que lui rendent
Ses joueurs, de qui ses jours dépendent.
Il se dédit alors, et maudit les présents
Que le Ciel lui fait tous les ans
Nous faisons cas du beau, nous méprisons l’utile ;
Et le beau souvent nous détruit.
Ce Portugais blâme son collectif qui le rend agile ;
Il estime l’individualité qui lui nuit.
Le Hollandais aux pieds d’or.
La suffisance perd tout en voulant tout gagner.
Je ne veux, pour le témoigner,
Que celui dont le hollandais, a ce que dit la fable,
Jouait tous les jours avec des pieds d’or.
Il crut que dans cet Euro il remporterait le trésor.
Il entama la compétition et la trouva semblable
A celles dont il avait déjà succombé en finale,
Se baladant en qualification, pour en compétition être mis a mal.
Belle leçon pour les équipes favorites :
Pendant ces derniers temps, combien en a-t-on vus
Qui du soir au matin sont éliminés devenus
Pour avoir trop tôt voulu gagner le titre.
L’Italien s’en allant en guerre.
L’Italien dans sa tête avait une entreprise.
Il tint conseil d’avant match, envoya ses joueurs,
Fit avertir les meilleurs :
Tous furent du dessein, chacun selon sa guise.
Le Gardien devait, de par son âge,
Porter l’attirail nécessaire
Et arrêter à son ordinaire,
Les Défenseurs s’aligner suivant les usages ;
L’Organisateur distiller des secrètes ouvertures
Et les ailiers dribbler, les
Renvoyer, dit quelqu’un la Presse qui nous prend en grippe
Et les deux attaquants, instables créatures.
– Point du tout, dit le sélectionneur, je veux les employer.
Notre troupe sans eux ne serait pas complète.
La presse soudera le groupe, du bout de leur baïonnette
Et nos attaquants ont trop de talents cachés.
Le sélectionneur prudent et sage
Des moindres aléas sait tirer quelque usage,
Et connaît les divers talents :
Il n’est rien d’inutile aux personnes de sens.
Le Français, L’Anglais et le Maître d’un stade.
Certain Français qui avait des antécédents,
Doublement sot et doublement fripon
Par l’égo, et par l’argent
Qu’ont les Anglais de proposer plus que raison
Chez un ancien soviet jouait, se dit-on
Pour se racheter. Cet ancien soviet par le passé,
Nous avait offert une équipe des plus estimées :
Elle avait les joueurs, elle avait le collectif.
Chaque saison, elle remplissait son objectif :
Au printemps c’était une coupe d’Europe encore,
Après vint individuellement le ballon d’or.
Un jour dans son stade, il vit notre Français
Qui jouait sans vie, à faire nombre de passes en retrait,
Centrait sans précision, douce et frêle espérance,
Tirait de loin sans conviction en espérant l’abondance.
Même il ennuyait tellement, et fit tant à la fin
Que le possesseur du stade
Envoya faire plainte à l’inventeur du jeu.
Celui-ci vint, suivi d’un cortège de blessés
Voilà le stade plein de bras cassés
Pire que le premier. L’Anglais, avec si peu,
Accrut le mal en amenant
Cette jeunesse trop classique :
Le tout à ce qu’il fait pour paraître impressionnant
Ce qui pût servir d’exemple, fut de parler physique
Pour marquer sur coup-de-pied arrêté.
La dessus, il se regroupa devant son gardien
Pour ne plus jamais se montrer dangereux.
Le match dura tant que les malheureux
Eurent le temps d’endormir en cent lieux les plus humains.
Je hais les matchs ennuyeux
Avec des tirs lointain, et qui n’ont point de fin,
Et ne sais bête au monde pire
Que le Français, si ce n’est l’Anglais.
Les meilleur des deux pour gagnant, à vrai dire,
Ne me plairait aucunement.
Just La Fontaine.
Les images illustratives proviennent de l’album panini crée conjointement par le site oldschoolpanini et les cahiers du foot. Si tu n’as pas eu la présence d’esprit de le faire avant, il n’est pas en encore trop tard pour commencer ton album.