Tunisie-Mauritanie (1-1) : L’Hariss Académie se met à la peinture
2 juillet 1816, le navire français « La Méduse » fait naufrage au large des côtes de la Mauritanie. La frégate s’échoue sur un banc de sable, un obstacle pourtant bien connu des navigateurs de l’époque. Sur les 147 naufragés qui s’entassent sur un radeau de fortune, seules sept personnes survivront. Les autres succomberont après avoir enduré la faim, la déshydratation, la folie et même l’anthropophagie. Ouais ouais je te parle bien d’un genre de cannibalisme, des mangeurs d’hommes oui, et les juge pas t’y étais pas. Alors pas de « haram » ici. Les types avaient pas prévu ce mauvais délire et n’étaient pas passés par la boutique « Tout pour la pêche » avant de monter sur leur embarcation. Et pas moyen de faire griller des merguez non plus. A l’époque, l’évènement provoque un scandale d’ampleur internationale, notamment en raison de l’incompétence avérée du capitaine français du navire, jugé responsable du désastre, un dénommé Hugues Duroy de Chaumareys. Après bon j’veux pas dire mais c’est pas un nom de capitaine ça…je sais pas moi mais Jack Sparrow, Corto Maltese, Flamme, Haddock ou même Igloo ça inspire plus confiance non ? Enfin bref, ce drame affectera beaucoup le peintre Théodore Gericault qui nous livrera quelques années plus tard un chef d’œuvre pittoresque, son tableau « Le radeau de la Méduse ».
2 juillet 2019, un peu plus de 200 ans plus tard, le souvenir n’existe finalement plus que par cette œuvre romantique. 4,91 m x 7,16 m pour nous rappeler l’horreur et la petitesse humaine face à la grandeur de Mère Nature. Tristesse du temps qui passe et efface de nos mémoires les souvenirs lointains. Et les leçons à en retenir. Pourtant en cette journée noyée dans un calendrier qui n’en finit plus de commémorer des jours heureux, un homme s’est dressé de tout son être pour nous rappeler justement à cette petitesse. Qui mieux qu’Alain Giresse pouvait incarner cette insignifiance ? Lui qui semble encore ne pas avoir atteint toute sa taille. Lui si étroit d’esprit. Lui qui a le regard aussi vide que le corps visqueux et flétri d’une méduse. Lui à la tête du navire tunisien des fiers Aigles de Carthage. Lui qui affrontait donc ce 2 juillet 2019 la Mauritanie… terre de naufrage annoncé.
L’équipage :
Pour cette dernière croisière, Alain surprend une nouvelle fois son monde avec deux choix forts dans sa composition :
Notre navigateur Chaalali suspendu, véritable boussole de notre chaloupe depuis le début de la compétition, on s’attendait à voir le propre Sassi à la barre, son profil s’y prêtant parfaitement. Mais non. Que nenni. Que dalle. C’eut été bien connaître le ballon rond mais mal connaître le petit lutin farceur Alain. Verdict ? Karim Aouadhi, 1m94, 33 ans de makrout, signe particulier : ne sprinte qu’un mois dans l’année, pendant le ramadan au moment de la rupture du jeûne.
Devant, pour accompagner la MSK (Msakni, Sliti, Khazri pour les incultes du football total recall), notre lutin girondin tâtonne toujours. Pourtant la titularisation du matelot Khenissi face au Mali, à défaut d’être décisive, avait permis à tout l’équipage de remonter le bloc à la surface. Mais non. Que nenni. Peau de zob. C’eut été avoir une approche collective du terrain mais ça Alain il l’a oublié. Son adage « la star c’est l’équipe » avec. Non pour ce match la star ce sera Bassem Srarfi, 1m76, 22 ans à se demander quel « r » retirer dans son nom pour qu’on puisse le prononcer sans se racler la gorge, signe particulier : a deux pieds droits mais semble être gaucher.
On notera aussi la titularisation une nouvelle fois d’Hassen dans les buts, malgré sa savonnette face au Mali. Ses parades décisives en fin de match ont fait peser la balance de son côté comparé au cachalot Ben Mustapha, c’est dire leurs importances. Pour le reste Giresse calque sa compo sur celles des matchs précédents, faudrait pas lui en demander trop en réfléchissant à de vrais ajustements sur les carences évidentes de notre paquebot. Ah mais si ! Miracle ! On le voit s’agiter sur le banc avant le coup d’envoi. Poséidon nous aurait entendus ? Ah ben non en fait… il voulait juste qu’on l’aide à descendre de son siège ce con… bon bah levez l’ancre… et cap sur les huitièmes de final inchallah.
Une traversée du désert en guise de croisière :
En ce 2 juillet 2019 donc, Giresse a voulu nous rappeler à tous ce drame de la « Méduse ». Trop de choses coïncidaient pour passer à côté… cette date symbolique bien-sûr, la Mauritanie évidemment, l’absence de navigateur confirmé, et surtout de maître à bord compétent, aucune canne à pêche ou barbecue en vue, un capitaine français ; non pas Hugues Duroy de Chaumareys mais Alain Giresse de Gironde… ne manquait donc plus que le banc de sable.
Pas besoin de tout un banc. Un grain aura suffi pour nous faire chavirer. Un seul et unique putain de grain de sable. C’est dire la solidité de notre équipe. Ce grain a pris la forme d’un joueur tunisien habituellement cantonné au banc de touche, le niçois Srarfi. Il a été source de déséquilibre constant. Il nous a littéralement coupé les ailes. Non seulement incapable de gagner un duel, il a surtout brillé par l’inexistence de pressing sur l’adversaire. Face à une équipe mauritanienne dont l’essentiel du jeu dépendait des longues relances de sa ligne défensive, cela a été flagrant. Chaque remontée de balle passait par la zone de Srarfi sans que cela ne semble le déranger. Le mec était là, posé avec son verre de citronnade et regardait ses rouyas galérer…l’adversaire, lui non plus, ne se compliquait pas la vie. Et vas-y que j’t’envoie des parpaings devant dès que le bloc équipe tunisien n’est plus compact, trois sprinteurs devant et plouf la défense des Aigles a pris l’eau. Sans la maladresse de l’adversaire et surtout la grande performance de Hassen dans nos buts le verdict aurait sans doute été différent. Nos deux milieux récupérateurs n’ont pas su inverser la tendance et briser les vagues successives qui se sont abattus sur nous. En même temps sans Chaalalichalala pour donner le rythme on n’espérait pas grand-chose à ce niveau.
Offensivement, contrairement à Vin Khazri, ce fut très maigre…obligée de compenser les errements de Srarfi la MSK n’a pas pesé sur le match…une ou deux combinaisons entre Msakni et Wahbi Diesel et pis c’est tout.
Heureusement la mi-temps est arrivée. Et Srarfi s’en est allé recouper des citrons sur son banc suppléé par Khenissi. Un désaveu de Giresse envers ses propres choix. Pas grave il a pris l’habitude de faire de la merde et d’assumer derrière, c’est peut-être sa première qualité. La seconde mi-temps aura juste servi à mettre en avant la capacité qu’a cette équipe tunisienne à faire déjouer l’adversaire. Informés qu’un match nul les envoyait dans une partie de tableau plus abordable, les Aigles n’ont même pas eu à sortir leurs serres. Pendant que leurs supporters se rongeaient les ongles conscients qu’un but des hommes de Corentin « aka Passepartout » Martins suffirait à les éliminer.
Ce but n’arrivera heureusement jamais. Et pourtant on n’est pas passé loin de la noyade. En guise de radeau ou de bouée de sauvetage le seul Hassen a réellement surnagé. Pour le reste, Giresse a réussi son clin d’œil à Géricault en nous alignant une équipe de peintres…
Les notes de nos artistes :
HASSEN 4/5 : Et si c’était réellement les fortes rafales de vent qui lui avaient coûté cette boulette lors de la traversée précédente? Le doute était permis après sa fin de match face au Mali, mais là on est au-delà de la permission, le gars était juste infranchissable, un vrai iceberg bloquant l’accès à ses cages. Gare au réchauffement climatique face au Ghana des Ayew’s brothers.
KECHRIDA 1/5 : Plus les minutes passent sur le terrain et plus il déçoit…ridiculisé par un petit pont du quartier en fin de match on espère qu’il va enfin élever son niveau de jeu maintenant. Mais après avoir autant été sali par un obscur pêcheur mauritanien difficile d’y croire…
BRONN 3/5 : Le seul de la défense au niveau sur ce match, mais il doit maintenant apprendre à en être le vrai papa, que les trois fistons essaient de suivre un peu plus son exemple.
MERIAH 2/5 : Comme tout bon joueur de l’Olympiakos, s’est mis en mode Mikonos sur ce match et plutôt du côté passif pour le coup de rein. A oublier très vite ce match désastreux.
HADDADI 2/5 : Il a lui aussi passé son temps à quatre pattes sur le terrain, Haddadi sur mon bidet. Il serait pourtant temps de se mettre à galoper un peu plus et d’arrêter de défendre comme Wendy Renard. Parce que contrairement à elle pour le coup, lui ne plante pas des coups de casque à chaque match pour rattraper ses boulettes.
AOUADHI 1/5 : Putain de boulet humain sur ce match, je pense pas qu’on le reverra tant il a creusé sa propre tombe sur ce match multipliant les mauvaises relances et les fautes inutiles.
SKHIRI 1/5 : Brave type, en cette journée hommage il a souhaité faire un signe à Loulou Nicolin en faisant le mort tout le match. Avec l’autre boulet d’Aouadhi qui continuait à creuser à côté pas surprenant qu’on n’ait pas trop vu le ballon.
SRARFI 0/5 : Expert en citronnade et Ballon de plomb haut la main. A eu le mérite de donner de l’espoir pour toute une génération de jeunes footeux tunisiens. En le voyant titularisé avec ce niveau cataclysmique beaucoup peuvent croire à l’équipe nationale. Un p’tit moineau au milieu des Aigles. Allez t’es gentil avec ton vieux lissage de blédard mais maintenant tu retournes citronner sur le banc, merci.
SLITI 2/5 : Inexistant offensivement comme jamais mais précieux défensivement comme rarement. Comme d’habitude avec Sliti on ne sait jamais sur quel pied zouker. Allez une petite valse contre le Ghana et on oubliera le reste.
MSAKNI 3/5 : Enfin ! Un vrai match de capitaine pour Msakni. A l’origine des rares mouvements offensifs tunisiens, il n’a eu cesse de rameuter ses rouyas pour bloquer les mauritaniens. Bon ça n’a pas toujours marché mais l’idée était là. Il semble récupérer ses ailes au fil des matchs après sa longue blessure.
KHAZRI 3/5 : Dans la continuité de ses premiers matchs de la CAN, tente beaucoup, presse beaucoup, court beaucoup, tacle beaucoup, dribble beaucoup, passe beaucoup, feinte beaucoup, centre beaucoup…bref fait beaucoup de bien à cette équipe tunisienne.
KHENISSI 3/5 : Il a remplacé Srarfi à la pause et a confirmé les belles choses entrevues contre le Mali. Maintenant qu’il arrête d’appeler son coach Grincheux et il sera titulaire au prochain match, c’est drôle mais pas respectueux pour les sept nains. Ils étaient pas aussi petit qu’Alain.
DRAGER ?/5 : Le dragée, cette confiserie datant du Moyen-Age mais très appréciée des contemporains, est utilisée à différentes occasions comme les baptêmes, les mariages ou les communions. Généralement constitué d’un noyau dur enrobé de sucre, le Drager tunisien ne fait pas exception à la recette, mais lui sert plutôt à mettre fin à toute volonté de jeu pour le match en cours, d’où l’impossibilité de le noter.
Et maintenant ?
Je pensais que face aux amputés angolais on avait atteint le bas fond mais non Alain a réussi à nous emmener dans des fosses sous-marines encore inexplorées…je ne sais pas trop ce qu’il en ressortira ni comment on en sortira, une chose est sûre on avance dans le plus grand flou. Et nos Aigles semblent entraîner leurs adversaires avec eux dans ces abîmes, de façon presque inexorable et inexplicable.
Qualifié après trois matchs nuls, (au sens premier du terme…) la Tunisie va affronter le Ghana en huitième de finale ce lundi à 21h. Passer sans gagner un match c’est propre ou moche selon les avis. L’éternel débat du résultat ou de la manière à défaut de pouvoir joindre les deux. Mais bon allez demander aux Ecureuils du Bénin si après avoir dégagé les Chatons marocains ils culpabilisent de n’avoir toujours pas gagné un seul match toutes CAN confondues…
Vu le niveau affiché, une élimination semble en effet très probable face au Ghana. Mais sur un malentendu ou plutôt une succession de malentendus (jurisprudence Portugal euro 2016 – France, ère Deschamps)…
Et on pourra toujours se consoler en se disant être tombé au même stade de la compétition que les marocains, égyptiens, camerounais et maliens/ivoiriens…