France – Maroc (2-0) : L’Académie française s’offre le droit d’y croire

1

L’archétype du match-piège. Si la France avait légitimement peur avant le duel face à l’Angleterre, elle s’avançait devant le Maroc avec confiance, c’est-à-dire sûre de ses forces, de ses qualités intrinsèques supérieures, de son expérience. La Suisse à l’Euro certainement toujours dans un coin de la tête, il fallait assumer son statut ou rentrait chez soi la tête basse. Qu’ont choisi les Bleus ?

Avant le match, c’était une rencontre inédite à ce stade de la compétition : le Maroc, historique, incarnait, et incarnera à jamais, le premier pays africain à se retrouver en demi-finale d’une Coupe du monde. La France, elle, inscrivait son nom dans une continuité assez extraordinaire. En effet, depuis 1998 et la première victoire, six éditions se sont déroulées en comptant celle en cours : six éditions, trois demi-finales (2006, 2018, 2022) suivies de trois finales (2006, 2018 et donc 2022) et, à ce jour, une victoire (2018).

Comme le disent en ce moment beaucoup de personnes qui n’ont pas eu cette chance de voir si souvent les Bleus si haut : profitons.

La compo :

Pour une fois, pas de bol pour DD : Adrien Rabiot et Dayot Upamecano sont sur le flanc, tombés malade depuis le quart face aux Anglais. Faut dire que passer pendant trois semaines de stade à ciel ouvert climatisé à désert à stade à ciel ouvert climatisé, ça peut finir par gratter la gorge. Pour le reste du onze : no surprises.

Le derrière : le central de Liverpool, Ibou Konaté, remplace donc le central du Bayern et secondera Varane dans l’axe de la défense. Au vu de son match face à la Tunisie (seul coiffeur à avoir été au niveau), on ne peut douter de son implication et de son application.

Le milieu : l’absence du Duc Rabiot fait, sur le papier, davantage mal à l’équipe car son remplaçant, Youssouf Fofana, n’a quant à lui montré que fébrilité et nonchalance face à la Tunisie. Au Monégasque de nous montrer son vrai niveau.

Le devant : same old, same old, but what a same old that is.

Le match :

Pour une fois, tout se passe comme prévu, et même mieux : première vraie incursion des Bleus côté droit avec Grizou qui sert Mbappé dont la frappe contrée arrive finalement côté gauche. Théo Hernandez propulse le cuir au fond d’une demi-volée assez acrobatique compte tenu de la hauteur à laquelle se trouvait le ballon avant qu’il ne le reprenne (1-0, 4e). « Le plus dur est fait » devient alors la phrase la plus prononcée instantanément dans toutes les chaumières de France et de Navarre.

On peut le croire en effet, tant l’équipe marocaine avait été présentée comme une forteresse, elle qui n’avait pris aucun but dans le jeu depuis le début de la Coupe du Monde. Deux-trois situations de break manquées plus tard dont un poteau de Giroud, puis les Bleus arrêtent de jouer. Le Maroc, peut-être d’abord pris par l’enjeu, sort la tête de l’eau. La volonté de DD est claire : on leur laisse le ballon et on contre.

Côté droit, Mbappé considère qu’il a assez défendu pendant trois semaines et qu’il n’est désormais plus besoin de se replier. Les Marocains insistent donc par là, profitant d’un Théo Hernandez pas assez muraille : Hakimi, Ziyech et Ounahi combinent bien, sont techniquement propres et obtiennent corners et coups-francs. A plusieurs reprises, c’est Captain Hugo qui nous sauve les miches, sur une frappe d’Ounahi par exemple ou en déviant sur le poteau un retourné magnifique d’El-Yamiq avant la pause.

Les Fès se contractent donc jusqu’à la mi-temps, qui soulage Français et sphincters. « Réajuster » dit Deschamps au retour des vestiaires : j’espère en effet qu’il a réajusté quelques relâchements mal placés et soufflé dans quelques bronches. Quand on peut faire le break, on le fait. Quand on est meilleurs dès qu’on appuie sur le champignon, on le fait et on va plier le match. On joue pas en sénateurs.

Le jeu reprend et… rien, en gros, ne change : pour une raison inconnue, notre « bloc-équipe » se situe aussi bas que Perpignan sur le territoire français (sud-est ou sud-ouest Perpignan par rapport à Béziers ?). Un peu plus et les onze joueurs trempaient leurs fesses aux Baléares. Les Marocains courent après le score et y vont à fond. Nous, on essaye de jouer les contres, mais c’est loin d’être une réussite. Le fait qu’on n’arrive pas du tout à relancer proprement quand on récupère le ballon n’aide pas, c’est sûr. Incapables d’exploiter les transitions, les Bleus sont des roseaux très, très souples.

Un petit miracle succédant à un autre, les Marocains n’égalisent pas. On a déjà vu mille fois cette situation. « Ce soir, ça veut pas ». Eh ben ce soir-là, ça voulait pas pour les Marocains. Toujours une tête française, un pied, un bras, une sortie de Lloris, une cagade de leur joueur devant le but, un dernier contrôle mal ajusté… Comme si les Lions de l’Atlas sentaient le poids du monde sur leurs épaules.

Et quand ça veut pas pour l’un, ça veut pour l’autre : à quinze minutes du terme, Marcus Thuram (entré à la place d’Oliv’) provoque à gauche, donne à Mbappé qui dribble, tchic-tchic, frappe détournée qui arrive vers Kolo Muani, lequel n’a plus qu’à pousser le ballon au fond (2-0, 78e). Deux frappes cadrées, deux buts. Trop forts, ces Bleus. La fin de match est conforme aux attendus : les Marocains se jettent encore plus à l’abordage, manquent encore la réduction du score, les Bleus laissent passer l’orage.

En fait, le match fut un orage permanent mais les Bleus étaient en tongs et t-shirts, assurés que ni la pluie ni les éclairs ne les toucheraient. Dont acte.

Le débrief :

Comme face au Danemark et face à l’Angleterre, les Bleus ont ouvert le score puis ont subi, encore plus longtemps. Si on avait eu 20 minutes difficiles face aux Danois et davantage face aux Anglais, là, on a défendu bloc (très) bas pendant une bonne partie du match. Pourquoi ? Comment ?

Alors oui, si on se raccroche aux stats, les Marocains n’ont cadré que trois tirs. Mais ils ont eu trois cents « situations ». Sauf qu’aucune n’a tourné en leur faveur (hormis l’arbitrage très souple sur les semelles). Subir n’est absolument pas un problème en soi. Le problème, c’est de ne faire que ça sans être capable de poser le pied sur le ballon cinq minutes et de gérer correctement les phases de transition – ce qu’on faisait parfaitement en 2018, par exemple.

Mais, car c’est un immense MAIS : on est en finale. Encore. Une dernière marche, la plus dure, pour le feu d’artifice final. Contre l’Argentine : une albiceleste qui est montée en puissance, qui a ses défauts mais de nombreuses qualités. Et Messi, comme DD, est aussi faiseur de miracles. Les romantiques seront pour lui. Mais nous n’avons cure du romantisme. Un seul credo : la gagne, la gagne, la gagne.

Les notes :

Lloris (5/5)

Sans aucun doute un connard de droite, mais pour son travail de gardien de football, y’a rien à dire.

T. Hernandez (2/5)

Buteur impromptu du soir, défenseur par mégarde le reste du temps. Tout est passé de son côté. Tout. Pas aidé par Mbappé, c’est sûr.

Konaté (5/5)

C’est pas faute de vous avoir prévenu. (Stat’ qui existe grâce à notre charnière : le 9 adverse a touché trois ballons. Trois. Alors qu’on a subi.)

Varane (5/5)

Sans doute que le Mancunien a pris des conseils auprès de son compère de Liverpool…

Koundé (3/5)

Appliqué et engagé, Julot a plutôt bien géré son couloir, mais pas trop non plus. Si Dembélé lui a souvent prêté main forte, la réciproque est fausse. Il sauve un ballon sur sa ligne.

Tchouaméni (3/5)

Un très bon début puis beaucoup de courses à courir derrière le ballon, faute d’avoir réussi à poser le jeu quand on le récupérait. Ses relances en transition auraient dû être meilleures.

Fofana (1/5)

Un seul fils-à-maman vous manque et tout est dépeuplé. Le Monégasque n’a tout simplement pas eu le niveau. L’a-t-il ?

Dembélé (2/5)

On lui demande de défendre, il défend. So Matuidi 2018. Offensivement, je n’ai pour l’instant aucun souvenir d’une percussion ou d’une différence faite face à l’adversaire (et je parle pas que de ce match). Remplacé par R. Kolo Muani (non noté), pour un des buts les plus faciles de sa jeune carrière, mais en demi-finale de CDM, il s’en souviendra plus que les autres.

Griezmann (20/5)

Monumental.

Mbappé (1/5) :

Peut-être que le nombre de semelles qu’il s’est mangé sans voir l’arbitre sortir un jaune a fini par l’agacer et le sortir du match. Brouillon et mauvais choix la plupart du temps, pas envie de défendre en première période, plus envie de courir à la fin du match. Mais sur l’action qu’il faut, il fait la diff’. T’as plus qu’à briller en finale mon grand.

Giroud (1/5) :

Avec ses dix potes dans le but d’Hugo, le registre du contre pendant 70 minutes n’a évidemment pas aidé son rendement. Il rate une balle de break. Remplacé par M. Thuram (non noté) qui a bien apporté offensivement et autant défendu que Mbappé.

Suivez Horsjeu, suivez-moi, suivez le compte de l’Académie Française pour ne rien manquer de l’histoire des Bleus, abonnez-vous, faites des dons. BA,

1 thought on “France – Maroc (2-0) : L’Académie française s’offre le droit d’y croire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.