L’apprenti Footballologue analyse Chelsea-Aston Villa (3-3)

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Le gamin lit même des sites anglais…

La confiance règne ou ode au changement en ré majeur. Le parcours de Chelsea et d’Aston Villa se ressemble. Deux équipes en perte de vitesse totale depuis un changement d’adjoint (Wilkins débarqué de son poste à Chelsea) et d’entraîneur (Houiller remplace McDonald à Villa). Mais peut-on seulement tout imputer à des changements internes ? Du côté de Birmingham tout n’allait déjà pas aussi bien que prévu, et les blessures n’arrangent rien. En revanche, Chelsea a vécu un remaniement sans conséquences sur le plan de la tactique et des joueurs alignés. Faut-il voir de la causalité à chaque coin de rue et imputer le soudain déclin des champions en titre à ce qui n’influerait que sur un plan mental ? Voir l’équipe en action est encore le meilleur moyen de s’en rendre compte.

Comme toujours, l’analyse d’un match précis n’a pas valeur de vérité générale, mais on retrouve toujours, par séquences ou en tant que valeur constitutive, les éléments types permettant de juger d’une dynamique. Et celle de Chelsea n’est assurément pas bonne. Intouchables en début de saison, les Blues sont depuis en manque de rythme. Pas question pour autant de faire de révolutions tactiques : ce qui a marché pendant plus d’un an n’a pas de raison objective d’être remis en cause. Ses vecteurs en revanche n’offrent pas le rendu espéré, on le verra plus loin.

Une fois le résultat entériné : victoire, nul ou défaite, l’élément principal à retenir est la maîtrise. Peu importe le nombre de buts marqués ou encaissés, l’analyse retiendra surtout une tendance. Telle équipe a marqué trois buts mais aurait pu en mettre beaucoup plus si… Telle autre en a marqué trois grâce à son adversaire sur le principe de l’opportunité. (voir l’analyse du match Stuttgart-Bayern). La feuille de match ne bouge pas, celle de la semaine suivante dépendra en revanche nettement des conditions dans lesquelles ont été obtenu les résultats précédents. La fameuse chance du champion est en réalité ce qui permet de limiter les dégâts dans les temps faibles d’une saison et non une hypothétique ligne directrice.

Pourquoi toutes ces considérations générales ? Pour en venir à un simple constat. Froid et sans appel. Chelsea a été incapable d’imposer son identité de jeu dans un contexte favorable. A domicile et face à un adversaire aussi dangereux que Ronald Pognon en finale olympique, Chelsea va pourtant lutter, galérer, tanguer. Et pas seulement parce que Gégé la Menace avait décidé que tous les tacles se feraient en retard et à hauteur de genou. Si l’on excepte la fin de partie, Chelsea n’aura presque jamais été menaçant. Seule occasion conclue, un penalty improbable sur une phase banale. Sino estn, quelques décalages ça et là, mais rien de concluant.

Le problème se situe au niveau des individualités. Bruma, remplaçant facilement devancé par Heskey de la tête sur le deuxième but de Villa, Paulo Ferreira latéral offensif absent défensivement et inutile devant, Cole bien muselé par le duo Young-Downing, Essien et Ramires plus que moyens à la récupération. La partie défensive laisse à désirer. Prendre trois buts est inhabituel à Stamford Bridge, le faire de cette façon (tacle aérien dans la surface mal maitrise, duel aérien perdu, marquage inexistant) est inquiétant. Devant, Lampard mène le jeu sans coups de génie tandis que sur les ailes Anelka et Malouda n’ont que très rarement passé les mythiques Clark et Cuéllar.

Reste la clé, la pierre angulaire du 4-3-3 : Didier Drogba. Cherché en permanence dans les airs dans la première partie du match, il a été progressivement abandonné, dominé qu’il était par Collins et Dunne. Les Blues ont cherchés des solutions au sol mais n’en ont jamais trouvés. Kalou entre ? Il tente un slalom aussi beau qu’inutile. Pas satisfaits de son choix individuel, ses partenaires ont visiblement oubliés qu’il fallait proposer une solution pour espérer recevoir la balle. Incapable de passer, Chelsea a recommencé à sauter les lignes dans les dernières minutes. Duel gagné par Drogba, balle qui lui revient dans les pieds et égalisation. Duel gagné par Drogba, balle qui revient sur Terry et prise d’avantage. Simple et direct comme un coup-franc de Tarnat.

Les batailles aériennes, élément-clé dans le football britannique, sont magnifiées par ce style de jeu tout en simplicité. Si l’on observe attentivement, on voit pourtant que les différences se font en toute fin de match, qui plus est face à une équipe de Villa qui n’a effectué qu’un seul changement, sur une blessure d’Agbonlahor à la 85ème, alors même que sept joueurs avaient reçu un jaune et que certains tenaient à peine debout, épuisés par une troisième rencontre en huit jours. Ce qui amène à une réflexion simple, si Didier Drogba a réussi à prendre l’avantage à la 90ème et non à la 45ème c’est en profitant de faiblesses adverses et non sur son niveau intrinsèque actuel.

La tactique de Chelsea n’est pas en cause, bien que plutôt bien ficelé, le système Houiller avait des failles. Le trident du milieu, Essien en tête, n’a pas su s’imposer alors même qu’il en avait le potentiel. Seule solution restante, se reposer sur un joueur aux qualités très spécifiques et qui ont fait leurs preuves. Efficace à court terme, presque mortel en cas de pépin pour l’intéressé. Car même s’il a réussi à débloquer la situation sans être dans la forme de sa vie, l’Ivoirien a de moins en moins l’âge d’être à la fois déménageur et efficace. Et car, fautes de menaces extérieures crédibles, il apparaît comme le joueur à neutraliser pour gagner. C’est ici l’exemple ultime de dépendance, quand vous connaissez le plan de votre adversaire, mais que vous n’avez rien à opposer pour le surprendre. « Tu sais que je vais faire tapis peu importe mes cartes et me suivre, mais je le fais quand même en espérant que la chance ne m’abandonne pas. » Avoir une chance du nom de Drogba c’est un peu truquer les cartes, mais c’est aussi prendre beaucoup de risques. Ce ne sera pas toujours Patrick Bruel en face…


schéma via zonalmarking.net

2 thoughts on “L’apprenti Footballologue analyse Chelsea-Aston Villa (3-3)

  1. J’applaudis des deux mains ! Jolie analyse qui nous change des « CHELSEA N’AVANCE PAS » habituels rencontrés sur différents sites d’analyse sportive.

    Un mot sur Albrighton (j’écorche surement son doux nom) le petit ailier de Villa, pas titulaire au coup d’envoi (je n’ai toujours pas compris pourquoi d’ailleurs) qui permet à l’équipe de Gégé d’égaliser en fin de match.

    Joueur très intéressant à mon avis, il risque d’aller plus loin.

  2. Très belle analyse. En effet, débarquer Ancelotti serait inefficace voire dangereux. Et le constat, comme tu le souligne, est sans appel : les individualités sont depuis un mois et demi loin d’être au niveau. Seulement, le moment où ces individualités commencent à baisser le pied coïncide avec le départ de Wilkins. Sans imputer ces défaillances exclusivement au licenciement de l’adjoint d’Ancelotti, on peut légitimement supposer qu’il y a un lien de cause à effet…

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