Aïoli les sapiens,

En ces temps troublés, la contrée était divisée en deux camps irréconciliables. La tribu des bouclettophobes constatait les innombrables occasions que parvenaient à se procurer l’Olympique, et le nombre de buts absolument dérisoire qui en résultaient. Pour eux, la stratégie du groupe était la bonne, puisque le ballon parvenait plus souvent qu’à son tour dans la surface adverse. Les responsables du fiasco étaient donc tout trouvés : il s’agissait de ces maudits chevelus incapables de faire preuve de la détermination et du sang-froid nécessaires pour concrétiser la victoire.

Face à eux se dressait la tribu des chauvophobes. Des occasions ? se gaussaient-ils. Comment sérieusement parler d’occasions quand le buteur en chef n’est servi en tout et pour tout qu’une seule fois au cours du match ? Des ballons qui traînent dans la surface, il y en a eu en pagaille, certes, mais tous destinés à se terminer en frappes improbables de la part de joueurs qui n’en sont pas capables. L’Olympique est en échec, assurent-ils, et le coupable en est son stratège chauve : le ballon est conservé, tourne et tourne encore dans les pieds de nos joueurs, dans la plus totale absence d’imagination et d’intensité lorsqu’il s’agit de percuter efficacement la défense adverse.


Sommés de choisir notre camp entre les bouclettophobes et les chauvauphobes, on serait tentés de répondre lâchement : « vous avez tous les deux raison, camarades ». Si sur le plan capillaire la position médiane est difficilement tenable, pour ce qui est des causes du marasme olympien, on peut légitimement piocher dans les arguments des deux camps. Oui, l’OM se procure des occasions, et oui, nos joueurs les salopent avec une constance dans la maladresse bordélique qui n’est pas sans évoquer une campagne électorale de gauche. Avec un poil plus de précision et de sang-froid, nous serions déjà en train de mordiller le derrière des parisiens sans plus nous préoccuper de ceux qui nous suivent.

Sauf que nous serions bien en tort de résumer notre production à une domination outrancière gâchée par des mastres aux pieds de plâtre. Les statistiques d’hier, dignes d’une élection en Centrafrique ou à Corbeil-Essonnes, sont particulièrement trompeuses. Si nous pouvons en effet enrager de n’avoir pas su convertir nos occasions, celles-ci sont essentiellement survenues en toute fin de rencontre, au cours de nos assauts aussi désespérés que désordonnés. C’est ce qui s’avère particulièrement agaçant avec cette équipe : comment peut-on à la fois faire preuve d’une force mentale aussi impressionnante pour éviter aussi souvent la défaite, et jouer avec une telle trouille de tenter un geste un peu percutant de peur d’entamer notre Sainte Possession ? Sur d’innombrables phases de jeu, notre adversaire n’a même pas à se déplacer pour suivre notre circulation de balle pépère, les prises de risques individuelles sont rarissimes et les projections des milieux inconstantes au possible. Sachant d’une part que nous sommes capables de nous lever les doigts une fois au pied du mur, et d’autre part qu’il nous faut environ seize situations de tir pour espérer marquer un but, on peut donc se demander pourquoi nous sommes infoutus de jouer avec agressivité dès la première période : dans une certaine mesure, c’est ce que l’OM produisait en tout début de saison. Certes, ce jeu tout-fou s’accompagnait d’une certaine ambiance « fête du slip » sur les contre-attaques, mais sur le plan du jeu aussi bien que de la comptabilité, on devine mal ce que nous avons gagné à jouer désormais la prudence jusqu’à la caricature. Nous en revenons à ce que nous évoquions en cette fin d’été enflammée : puisque nous avons vu ce dont vous êtes capables, ne comptez pas sur nous pour cesser de vous le réclamer toute la saison. Or aujourd’hui et depuis plusieurs semaines le compte n’y est pas, et c’est une remise en question qui s’adresse à tous, qu’ils aient de la peau de genou ou une forêt vierge sur le crâne.


Les Longorious Basterds

Lopez
Lirola – Saliba – Caleta-Car (Rongier, 68e) – Luan Peres
Guendouzi– Kamara – Gerson
Ünder– Milik (Harit, 84e) – Payet


Les soucis covidiens qui ont pesé sur notre petite mais historique victoire à Bordeaux ne semblent plus qu’un souvenir. Au rayon des départs, nous avons omis ici de mentionner le prêt d’Amavi à Nice. On peut s’interroger sur le fait de prolonger le joueur pour ne plus compter sur lui et le céder à un concurrent direct, qui plus est en assurant une partie de son salaire. Cette gestion douteuse du cas Amavi n’atteint certes pas les fantaisies de Jacques-Henri Eyraud, dont le recrutement de Pape Gueye au nez et à la barbe de Watford nous vaut aujourd’hui la menace d’une interdiction de recruter aux prochains mercatos. Cela étant, si cette sanction se confirme et nous empêche de dépenser n’importe comment l’argent que l’on n’a pas, il pourra s’agir d’un mal pour un bien. Dans l’immédiat, nous attendrons également beaucoup de notre nouvelle recrue offensive Cédric Bakambu, dont le surnom autoproclamé « Bakagoal » n’est pourtant pas fait pour nous rassurer.

Quant au XI de départ, rien de bien notable à signaler. La petite finesse du soir consiste à voir Ünder passer une bonne partie de la seconde période sur l’aile droite.


Le match

Le match débute par le rappel des consignes arbitrales, que l’on peut résumer par : « ya rien, jouez ». Guendouzi et Gerson passent ainsi les dix premières minutes à subir des prises de catch sans autre sanction qu’un carton jaune pour contestation envers Mattéo. Les Lillois sont ainsi mis en confiance dans les duels, peut-être un peu trop d’ailleurs comme nous le verrons ensuite.

Ayant bien révisé son manuel de « Comment ennuyer l’OM sans se prendre la tête », Lille nous oppose le bloc bas adéquat avec les deux options-bonus-emmerdement-suprême : la défense agressive, donc, et des contre-attaques meurtrières. Sur la première d’entre elles, Yilmaz oblige Lopez à une envolée spectaculaire. Sur le corner qui s’ensuit, Saliba laisse filer Botman, qui peut tranquillement décroiser sa tête hors de portée de Pau (0-1, 15e).

Peut-être William est-il amoureux, peut-être est-il au contraire angoissé à l’idée de quitter la plus belle ville du monde pour revenir déprimer dans la banlieue londonienne, toujours est-il que William n’a guère la tête à ce qu’il fait. Après une perte de balle de Caleta-Car, Sanches travaille en effet notre nounours croate avant de centrer pour Yilmaz, de nouveau parti dans le dos de Saliba. Il faut une RAIE autoritaire de Lopez pour parer la tête à bout portant du Turc.

Il faut quasiment attendre la demi-heure pour voir l’OM faire preuve d’initiatives un peu plus percutantes que ses approches dignes de feu le porno soft du dimanche sur M6. Guendouzi surprend ainsi la défense sur un démarrage et se procure un coup-franc, sur lequel Payet oblige le gardien à une belle envolée. Grbic finit le travail sur le corner qui s’ensuit, en posant ses gonades devant une reprise de Mattéo (ce qui n’est pas une image, il a vraiment réalisé un arrêt des couilles, faisant d’ailleurs preuve ensuite d’un remarquable stoïcisme).

L’OM se montre de plus en plus agressif dans le camp nordiste quand, sur une récupération haute de notre part, les Lillois délaissent inexplicablement le football pour la confection de pâté de cheville. La même action nous voit subir trois tacles de charcutiers, dont deux du seul Benjamin André dans le même mouvement. Déjà averti pour contestation une minute plus tôt, le défenseur est prié par l’arbitre d’aller rafraîchir aux vestiaires ce qui lui reste de cerveau.


À dix contre onze, l’OM est incapable de produire autre chose que des tirs pitoyables depuis l’entrée de la surface, ainsi que quelques têtes impossibles. Impuissants, nous sommes toujours menacés par les contre Lillois, dont les deux plus dangereux sont mis en échec par Saliba puis Lopez.

L’OM monopolise le ballon après la pause, dans le plus pur style dit « de la petite sœur », à savoir : on ne veut pas le ballon pour jouer avec, mais juste pour empêcher l’autre de l’avoir. L’OM tente bien de s’approcher de la surface adverse, mais ne parvient quasiment jamais à se procurer une position de frappe digne de ce nom. Le principal coup de chaud survient quand Gerson subit un nouveau waza-ari en pleine surface, sans que cela n’émeuve davantage M. Delerue. Le LOSC attend son heure, et la croit venue quand David sort de son camp en souillant Payet au passage d’un joli sombrero. La contre-attaque menée avec Ylimaz se termine au fond des filets, un hors-jeu de dix centimètres nous sauvant du ridicule.


Il faut attendre l’orée du dernier quart d’heure pour voir Milik enfin se procurer une occasion véritable, au demeurant expédiée hors-cadre. C’est finalement sur un corner de filou que la délivrance survient, quand Payet joue rapidement en retrait pour Ünder. À cette occasion, Cengiz nous montre que la qualité de ses enroulés du droit n’a rien à envier à celle de ses tirs du gauche : mauvais pied ou pas, c’est déposé dans le petit filet (1-1, 75e).

L’OM fait enfin le forcing pour arracher la décision mais, eu égard à la qualité de notre finition, il nous aurait fallu bien plus que dix minutes à ce régime pour espérer marquer. Gerson voit ainsi sa lourde déviée jute à côté du but, avant que Luan Peres n’envoie une tête plongeante à côté du but. Dans le temps additionnel, un gros cafouillage se termine par un sauvetage sur la ligne des Lillois, avant que Gerson n’oblige le gardien à une nouvelle claquette. Le dernier tir de la partie nous est proposé par Valentin Rongier, « comme un symbole » aurions-nous envie de dire.


Les joueurs

Lopez (4/5) : Notre déprime du lundi évitée grâce à un mec au charisme de punk à chien, voici une belle leçon de vie sur la vanité des apparences.

Lirola (2/5) : Remercions la Providence de l’avoir fait naître espagnol plutôt que norvégien : il y a moins de préjudice à le voir équipé de chaussures à crampons que d’une carabine de biathlète.

Saliba (2/5) : Des sauvetages de très belle qualité mais dérisoires, un peu comme un chauffard qui tenterait un massage cardiaque sur la mamie qu’il vient d’emplâtrer à deux grammes d’alcool dans le sang.

Caleta-Car (2/5) : Étant le défenseur le plus proche de vomiraprès s’être fait tourner et retourner par les adversaires, c’est logiquement Duje qui a fait les frais de la réorganisation tactique entreprise par Sampaoli.

Rongier (68e, 2+/5) : Au diapason pour ce qui est de récupérer la balle et la maintenir haut dans le camp adverse, le Rongieur n’a pas fait mieux que les autres en matière de création de danger. Ceci dit, il n’a pas fait pire non plus, son monopole sur les frappes pitoyables à l’entrée de la surface étant largement aboli.

Luan Peres (2/5) : Chacun, dans sa vie professionnelle, connaît de ces missions que l’on peut qualifier de « bâton merdeux ». En Ehpad, c’est ce dossier du nouvel arrivant où est inscrit en rouge « incontinence ++ ». Chez le fonctionnaire chargé des ressources humaines, c’est le compte rendu annuel des instances paritaires consacrées à la revalorisation des grilles indiciaires. A l’Éducation nationale, c’est recevoir n’importe quel message signé « Jean-Michel Blanquer ». Bref, ces corvées dont l’on se passerait bien, pour lesquelles on n’est pas à l’aise mais dont il faut bien s’acquitter. Bah Luan Peres, son bâton merdeux à lui, c’est défendre en reculant sur les contre-attaques adverses : autant dire qu’il a été servi ce soir.

Kamara (3-/5) : Le ballon pour Kamara, c’était comme le pouvoir pour Manuel Valls : l’intéressant c’est de le conquérir, pas de s’en servir pour faire quelque chose d’utile.

Guendouzi (2/5) : Les Lillois ont commencé par le descendre, en vain, avant d’user pour le contrer d’une méthode aussi subtile qu’efficace : ils se sont approchés de lui en lui murmurant « Au fait, ça s’arrange tes crises d’angoisses dans la surface de réparation ? Ca ne doit pas être facile à vivre, mon pauvre. »

Gerson (3+/5) : Présent à la récupération et n’hésitant pas à se projeter à la conclusion des actions, Gerson a assurément fait beaucoup de trucs ce soir. Certes, le rendement n’est pas plus élevé que lorsqu’il ne foutait rien, mais ce n’est pas une raison pour se décourager.

Ünder (4/5) : Même pas on regarde l’ensemble de son match: un type qui marque, par les temps qui courent, on le vénère et c’est tout.

Payet (2/5) : Les Lillois ont parfaitement réussi à neutraliser ses extérieurs voluptueux et ses transversales orgasmiques, tout ça pour se faire surprendre par un bête corner joué vite. Tant mieux pour Dimitri, qui soigne ses statistiques malgré un manque d’inspiration flagrant.

Milik (1/5) : On dit de lui qu’il est de cette race d’attaquants « à qui il ne faut pas cinquante occasions pour marquer ». Bah maintenant, on saura qu’il lui en faut quand même au moins deux.

Harit (84e) : Entré dans l’optique collective d’envoyer des centres à la pelle, dans une surface d’où l’on venait d’ôter notre buteur. Une logique belle comme un protocole sanitaire en milieu scolaire.


L’invité zoologique : Renato Sangsue

La sangsue est un animal peu attrayant au-delà du raisonnable. La seule raison d’être de ce ver est ainsi de s’immiscer en douce sur nos membres inférieurs et de les parasiter en leur pompant tout le sang qu’il lui est possible de sucer. Notons cependant que la sangsue revêt des vertus médicinales, notamment dans la lutte contre les varices : il s’agit donc de l’invité approprié pour commenter avec nous ce match, que nous avons mené complètement anémiés mais pourvus d’un bilan remarquable en matière de circulation.

– Les autres : On fait bloc, on attend, on contre. À un moment on ne va plus s’éterniser à commenter le jeu adverse, puisqu’il leur suffit tous de faire exactement la même chose pour nous annihiler.

Le classement : Nice nous montre ce qui s’appelle être une équipe efficace, et nous passe devant à la deuxième place. Derrière, Lens et Rennes ne semblent pas non plus être en proie longuement au doute.

Coming next : Gros match à Lens en perspective. On attend une revanche aussi spectaculaire qu’à l’aller, avec un résultat favorable cette fois-ci.

L’hommage : Qu’on l’ait lu ou écouté du temps du Provençal, de Radio France Provence ou de France Bleu Provence, Dédé De Rocca a accompagné de sa voix et de ses écrits tout un pan de l’histoire olympienne. Qu’il repose là-haut en paix – et en oai les soirs de matchs – avec tous les autres grands valables qui nous ont quittés ces derniers mois.

– La bonne résolution : j’en vois des parmi vous qui ne sont pas encore abonnés à Marsactu, ce qui est pourtant indispensable. Voici de quoi vous en convaincre.

– Les réseaux : ton dromadaire préféré blatère sur Facebook, sur Instagram et sur Twitter. Homerc remporte le concours zoologique.


Bises massilianales,

Blaah.

3 thoughts on “OM-Lille (1-1), La Canebière académie se lasse

  1. je suis donc un chauvophobe…qu’il arrête avec ses tactiques à la con de la passe vers l’arrière…on peut jouer contre une équipe à 9 et ne pas marquer…
    qu’on balance vers l’avant le plus souvent et on verra du mieux et des buts…
    aussi qu’on lui rappelle notre devise, Droit au but et non droit à la passe stérile et ridicule à 100.
    on dirait qu’il a déjà fait son temps….c’est ahurissant de penser cela d’une équipe potentiellement seule deuxième.., mais bon!
    allez l’OM

  2. Est-ce que Valentin Rongier a mis un but avec l’Olympique de Marseille ? Je ne crois pas.

    ………………… Allez l’O*M !!!………………….

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